Le Marxiste-Léniniste

Numéro 46 - 30 novembre 2015

La nécessité d'une nouvelle direction prosociale de l'économie

Essar Algoma Steel sous la protection de la faillite


«La Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies est du vol légalisé.»

La nécessité d'une nouvelle direction prosociale de l'économie
Essar Algoma Steel sous la protection de la faillite

À titre d'information
Essar, encore une fois sous la protection de la faillite, doit des millions aux entreprises et à la ville de Sault Ste. Marie


La nécessité d'une nouvelle direction prosociale de l'économie

Essar Algoma Steel sous la protection de la faillite

Les métallos, les travailleurs miniers et du pétrole, leurs alliés et les communautés réfléchissent sérieusement à un projet prosocial qui va fournir une nouvelle direction à l'économie. La direction actuelle ne fonctionne pas. US Steel est présentement sous la protection de la faillite et est en train de détruire sa capacité de production. Les mines et les installations pétrolières qui produisent des biens variés sont en sérieuse crise et voilà qu'Essar Algoma Steel s'est placée sous la protection de la faillite pour la troisième fois en 25 ans.

« Une situation qui n'est pas bonne du tout », disent plusieurs. « Nous avons besoin d'une nouvelle direction qui sert le peuple et l'économie, nos communautés et l'intérêt général. Nous n'avons pas besoin et ne voulons pas de cette concurrence perpétuelle, de ces coups dans le dos et de ces manoeuvres à courte vue qui servent uniquement les intérêts privés d'une petite minorité qui vit Dieu sait où. » La classe ouvrière doit donner une nouvelle direction à l'économie.

Le moins qu'on puisse dire c'est qu'Essar Algoma Steel est un monopole digne du temps du Far West. Cette entreprise sidérurgique moderne qui emploie 3000 travailleurs produit de l'acier de haute qualité depuis plus de 100 ans. Elle admet elle-même que son carnet de commandes est plein et pourtant elle n'est pas capable de se maintenir à flot et vient de mettre à pied 200 travailleurs. Dans les documents qu'elle a soumis à la cour, elle dit avoir une dette de 1,2 milliard $. Les détenteurs de cette dette ont une réclamation de 133 millions $ par année en intérêt à la nouvelle valeur que créent les travailleurs, et les détenteurs du capital-actions disent qu'il ne reste rien pour eux. La compagnie dit aussi ne pouvoir assumer ses obligations envers les pensions et ses autres obligations sociales, ce qui prouve bien que sa direction actuelle est antisociale et en mal d'une nouvelle direction prosociale. Aucun système qui s'attaque aux producteurs véritables de la valeur ne peut durer bien longtemps.

Intrigues et concurrence intermonopolistes

Comme c'est le cas de tous les monopoles qui oeuvrent dans les secteurs de base de l'économie, Essar est imbriquée dans un réseau d'intrigues internationales et de luttes internes qui se mènent au sein des riches du monde. La maison-mère est enregistrée aux îles Caïmans, un paradis fiscal notoire, et elle opère à partir de Mumbai en Inde. Le monopole mondial Essar comprend un ensemble d'entreprises qui ont un revenu réalisé annuel combiné de plus de 35 milliards $ -- le fruit de la production effectuée par 73 000 personnes qui travaillent dans des installations réparties dans 29 pays.

On lit sur le site Web d'Essar que la compagnie « vient de compléter des investissements substantiels de capital de plus de 17 milliards $ US dans des avoirs clés de son portefeuille d'entreprises ». On est en droit de se demander si elle a drainé du revenu de certaines composantes de son portefeuille d'entreprises, Algoma par exemple, pour faire ces investissements dans « des avoirs clés de son portefeuille d'entreprises » ou si elle a contracté un excès de dettes dans des unités comme Algoma, non pour servir des besoins locaux mais pour transférer ces montants ailleurs pour des investissements dans des « avoirs clés de son portefeuille d'entreprises ».

Chose certaine cependant, les créanciers garantis d'Essar Algoma ne semblent pas trop inquiets de la sécurité de leurs prêts à Algoma parce qu'ils se bousculent à la porte pour prêter encore plus d'argent aux installations canadiennes. La Deutsche Bank, qui détient la moitié des prêts garantis d'Essar Algoma, est bien contente d'être le débiteur-exploitant, pour une valeur de 200 millions $, de cette protection de la faillite en vertu de la LACC, la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies, qui est contrôlée par les monopoles.

Les créanciers garantis qui sont en « haut de la liste », advenant que les avoirs d'Essar Algoma soient liquidés dans le cadre des procédures en vertu de la LACC, sont les suivants :

Prêt garanti par des actifs
Deutsche Bank Ag Toronto
55 731 766 $

Prêt à terme
Deutsche Bank Ag New York
494 861 449 $

Billets garantis de premier rang
Wilmington Trust Guilford Ct
512 638 558 $

Billets garantis de rang inférieur
Wilmington Trust Guilford Ct
377 264 683 $

Selon la procédure de la LACC qui est sous contrôle monopoliste, les fonds de pension ne sont « pas garantis » et viennent derrière les prêteurs d'argent en ce qui concerne le droit de réclamation aux avoirs. On dit que les fonds de pension d'Algoma feraient face à un manque de 500 millions $ par rapport à leurs obligations actuelles s'ils devaient être liquidés. Essar a acheté Algoma il y a huit ans seulement, ce qui amène plusieurs à se demander comment elle peut devoir autant d'argent sur ses avoirs à moins bien sûr que ces emprunts aient servi à d'abord financer l'achat d'Algoma ou ont été utilisés ailleurs dans l'empire mondial d'Essar.

La production à Essar Algoma ces dernières années a été constante, contrairement à ce qui a été le cas à US Steel, alors où est allée la valeur ajoutée réalisée, mis à part la réclamation annuelle de 133 millions $ des prêteurs ? C'est donc possible qu'elle ait quitté Sault Ste. Marie pour se retrouver dans le portefeuille mondial d'investissements d'Essar et notamment juste au sud de la frontière, dans les gisements de minerai de fer du Minnesota où se joue un bras de fer d'intrigues et de luttes intestines.

Le journal local Sault Star a rapporté que « l'élément déclencheur » de la requête de protection de la faillite d'Essar pourrait bien ne pas avoir été les paiements des intérêts ou des pensions mais son dur conflit avec le monopole américain Cliffs Natural Ressources qui lui fournit le minerai fer nécessaire à la production de l'acier. Essar Algoma a essayé de réduire le prix qu'il paie pour le minerai de fer en vertu de son contrat avec Cliffs dans un contexte où le prix du minerai a chuté dramatiquement sur les marchés internationaux. Cliffs a utilisé la demande d'Essar pour un prix plus bas comme prétexte pour cesser ses livraisons, ce qui a placé Algoma en position vulnérable face à l'hiver.

Il est donc possible qu'Essar Algoma ait demandé à se placer sous la protection de la LACC, quelque chose qu'elle avait refusé de faire il y a seulement deux mois, à cause de son conflit intermonopoliste avec son principal fournisseur de minerai de fer qui a maintenant interrompu ses livraisons. On dit que la rupture n'est pas causée par une guerre de prix, mais par la nouvelle mine de fer qu'Essar est en train de construire au Minnesota qui va être un concurrent direct de Cliffs.

Dans ses procédures en vertu de la LACC, Essar essaie d'obtenir une ordonnance de la cour pour forcer Cliffs à continuer à l'approvisionner en minerai de fer. Cela tend à donner raison à ceux qui disent que la protection de la faillite ne tient pas à des problèmes chez Algoma mais plutôt au conflit de la maison-mère du monopole avec Cliffs. Son conflit avec Cliffs ne reposerait pas sur le prix du minerai de fer, mais sur l'approvisionnement ou l'approvisionnement éventuel qu'Essar va fournir aux marchés mondiaux une fois qu'il aura entrepris la production à sa nouvelle mine et sa nouvelle usine au Minnesota. Cliffs a dit qu'il ne va plus fournir de fer à Essar peu importe le prix. Si cela est vrai, cela veut dire que le tribunal chargé des procédures de la LACC aurait accordé la protection de la faillite à Essar Algoma non pas à cause de quelque problème interne à Algoma relatif à la production et aux ventes d'acier, mais au nom de l'empire mondial d'Essar et de son conflit intermonopoliste avec Cliffs sur la question de l'avenir de la production de minerai de fer aux États-Unis.

Cliffs et d'autres producteurs de minerai de fer ferment des mines à cause de la crise tandis qu'Essar se prépare à en ouvrir une nouvelle

Cliffs est en train de cesser ses opérations à Northshore Mining au Minnesota, lesquelles représentent un quart de sa production de minerai de fer aux États-Unis, après avoir fermé ses installations de United Taconite en 2014, qui représentent un autre cinquième de sa capacité de production. Même s'il ferme ces installations en invoquant l'engorgement du marché et le faible prix du minerai de fer, Cliffs est si en colère contre Essar, qui est en train d'ouvrir une nouvelle mine et une nouvelle usine, qu'elle ne fournira pas de minerai à Algoma quoi qu'il en soit. Cela représente un sérieux problème pour Algoma alors qu'approche la fin de la saison des expéditions sur le Lac Supérieur. Cliffs semble vouloir mettre en faillite ou en liquidation les unités minières et d'acier nord-américaines d'Essar ou possiblement même s'en emparer. Cliffs semble vouloir éliminer Essar en tant que concurrent dans le secteur du minerai de fer avant même que la concurrence ne débute. Cliffs pourrait avoir été poussé à agir de la sorte à cause des rumeurs selon lesquelles Essar a eu du mal à amasser l'argent nécessaire pour payer les entrepreneurs et d'autres clients au Minnesota, ce qui l'a forcée à reporter le démarrage du projet minier.

Essar a investi et emprunté des milliards de dollars pour construire ses installations de production de boulettes de minerai de fer et de production d'acier au Minnesota, mais elle reconnaît avoir eu des difficultés à amasser les fonds et à respecter les échéances du projet. Selon Metal Miner, « l'installation [d'Essar] devrait quand même commencer à produire des boulettes de minerai de fer vers la fin 2016 ». La production initiale annuelle de 7 millions de tonnes de boulettes de taconite transformées a déjà été achetée par contrat par l'aciérie d'ArcelorMittal près de Chicago en Indiana et par l'aciérie d'Essar Algoma au nord de la frontière, à Sault Ste. Marie.

Metal Miner écrit : « Ceux qui ont critiqué la mise en chantier de l'usine disent qu'elle est construite au moment où on n'a absolument pas besoin de son produit. Il n'y a pas de nouvelle demande pour le minerai de fer aux États-Unis et son prix continue de subir des pressions à la baisse ». Cliffs a dénoncé le projet de développement de minerai de fer d'Essar et les médias locaux ont dit qu'elle a fait usage de ses contacts sociaux, économiques et politiques pour tenter de le tuer dans l'oeuf. Cliffs accuse Essar d'agir de manière irresponsable en ouvrant une nouvelle mine et une nouvelle usine alors que les producteurs de taconite de l'État ont été forcés de fermer leurs opérations ou de réduire leurs activités. Cliffs et d'autres fabricants comme US Steel, Magnetation et Steel Dynamics ont tous mis à pied des travailleurs au Minnesota cette année. Cliffs fait campagne pour qu'Essar soit forcée de rembourser immédiatement les 70 millions $ qu'elle a reçus en subsides et en prêts du Minnesota pour construire l'usine parce que « le projet n'a pas respecté les échéances de construction et de développement du projet et d'autres engagements ».

Essar admet qu'il y a eu des délais et « des problèmes de financement » mais elle vient de contracter un prêt de 800 millions $ pour compléter le projet. Cette admission a de quoi surprendre les gens au nord de la frontière qui se sont fait dire que la protection de la faillite était due à « un excès de dettes » qui draine le revenu réalisé d'Algoma.

La concurrence et la lutte intermonopoliste n'a rien à voir avec l'édification nationale et tout à voir avec la destruction antisociale et antinationale. Une économie stable qui connaît des prix stables et la sécurité d'emploi et où la planification scientifique crée une harmonie entre la production et la consommation serait bénéfique aux travailleurs et à l'économie intégrée et aux besoins du peuple et de la société. L'expérience a montré qu'il est impossible de bâtir une économie stable intégrée qui est au service du peuple lorsque ce sont les intérêts privés étroits des monopoles mondiaux rivaux qui dominent les secteurs de base de l'économie. Il faut mettre un terme aux faillites et aux fermetures à répétition de même qu'aux intrigues et aux conflits incessants entre les unités économiques des secteurs qui devraient être intégrés. Une économie moderne requiert une vaste coopération entre des unités économiques plutôt qu'une concurrence pour des motifs étroits. Il nous faut une nouvelle direction prosociale et de plus en plus de Canadiens sont convaincus de sa nécessité et s'unissent et s'organisent pour la créer.

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À titre d'information

Essar, encore une fois sous la protection
de la faillite, doit des millions aux entreprises
et à la ville de Sault Ste. Marie

En plus de ses obligations sociales envers les pensions et les avantages sociaux, qui sont menacés, et de la mise à pied de 200 travailleurs, la restructuration en cours à Essar Steel Algoma affecte 125 créanciers de Sault Ste. Marie à qui Essar doit 38 millions $. Ces montants et paiements sont gelés en vertu de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies, qui est contrôlée par les monopoles.

Le plus gros créancier local est la ville de Sault Ste. Marie à qui Essar doit 14 millions $.

Parmi les 125 créanciers locaux, les plus gros sont :

La ville de Sault Ste. Marie
13 998 028 $

Triple M Metal LP
4 051 098 $

Algoma Tubes Inc.
1 566 395 $

Superior Industrial Services
1 477 928 $

R.F. Contracting
1 400 747 $

Inter Ontario Equipment Rental
1 197 130 $

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