Le Marxiste-Léniniste

Numéro 31 - 8 juillet 2015

L'amortissement accéléré du gouvernement Harper

Suncor saute sur l'occasion pour acheter de l'équipement lourd

Les camions sans chauffeur de Suncor vont-ils mettre
les camionneurs albertains au chômage?


Le référendum grec du 5 juillet sur les propositions des créanciers
Une bataille épique contre l'austérité et le pillage impérialistes
Le contexte de la crise de la dette grecque
Réquisitoire contre l'austérité
- K.C. Adams -


L'annexe secrète sur les services financiers
de l'Accord sur le commerce des services

Le Canada participe à des négociations secrètes qui visent à déréglementer davantage les marchés des services financiers mondiaux

Théorie économique
Termes, expressions et mots d'économie politique
La classe ouvrière et non le capital est au coeur de l'économie moderne
Un échange tout à fait extraordinaire, unique et désuet
Les travailleurs doivent augmenter la richesse sociale par le travail pour être considérés comme étant productifs
La source de la valeur dans la production des biens et services


L'amortissement accéléré du gouvernement Harper

Suncor saute sur l'occasion pour
acheter de l'équipement lourd

Qui devrait décider des questions importantes qui ont de bonnes et mauvaises conséquences
bien au-delà des intérêts privés des entreprises concernées ?

Le gouvernement Harper a récemment annoncé un remboursement d'impôt pour société qui est l'équivalent d'un cadeau de 1,1 milliard $ aux entreprises ne serait-ce que pour les cinq premières années. Avec cette manoeuvre pour payer les riches, des sociétés peuvent déduire 50 % par année du prix d'achat de nouvelle machinerie de leurs bénéfices imposables bruts. Cette pratique comptable qu'on appelle amortissement annuel accéléré permet aux entreprises de récupérer presque immédiatement le coût total de la machinerie à titre de réclamation à la valeur ajoutée, plutôt que d'attendre que la valeur transférée leur revienne graduellement avec la dépréciation de la machinerie et la réalisation du produit.

La société Suncor Energy Inc., la plus grande pétrolière au Canada, a immédiatement sauté sur l'occasion et a annoncé la conclusion d'une entente de cinq ans avec Komatsu Ltd, le fabricant japonais de machines de terrassement et de construction, pour l'achat de remorques entièrement automatisées pour ses opérations minières au nord de Fort McMurray, en Alberta. La manoeuvre comptable du gouvernement Harper permettra à Suncor de remplacer sa flotte de camions lourds opérés par des conducteurs sans investissement très onéreux puisque chaque camion sera presque entièrement payé par avantages fiscaux.

On estime que l'entente entre Suncor et Komatsu, qui prévoit l'achat de 175 camions sans conducteur téléguidés à partir d'un centre d'opération à l'aide d'ordinateurs, de GPS et de radars, éliminera au départ 800 emplois. Ces emplois, temps supplémentaire compris, sont parmi les emplois les mieux rémunérés de la classe ouvrière dans le secteur de l'extraction pétrolière.

L'effet pratique de la manoeuvre du gouvernement Harper pour payer les riches est d'accélérer l'élimination d'emplois par une introduction plus rapide de machinerie et un transfert de la richesse sociale de la classe ouvrière canadienne à de riches impérialistes, principalement étrangers. Le gouvernement ne prévoit aucune mesure pour compenser la perte d'emplois ni la perte de produit social encourue quand des fonds publics servent à subventionner l'achat d'une machinerie dispendieuse qui n'est pas fabriquée au Canada.

Les 1000 opérateurs de camions lourds de Suncor ont sonné l'alarme, non seulement sur les conséquences qui les attendent mais aussi à l'importante perte d'emplois que cet assaut de productivité accélérée et subventionnée par l'État entraînera dans tout le secteur.

« C'est très inquiétant pour nous qui ne savons pas ce que l'avenir nous réserve », a dit Ken Smith président de la section 707A d'Unifor, qui représente 3 300 employés de Suncor. Il prévoit que ce qui se produit à Suncor se répandra à toute l'industrie minière, où sont employés des milliers d'opérateurs de remorques de 400 tonnes.

Les camions sans conducteur ne sont pas nouveaux. Les monopoles miniers Rio Tinto et BHP Billiton s'en servent dans leurs opérations à différents endroits, notamment en Australie. Le directeur des finances de Suncor, Alister Cowan, cache mal son enthousiasme à l'idée d'éliminer des emplois en profitant de la manoeuvre fiscale du gouvernement Harper. Selon le Calgary Herald, lors d'une conférence de la RBC Capital Markets à New York au début de juin il a dit :

« Ce n'est pas un fantasme, dit-il du plan de la compagnie de remplacer sa flotte de camions lourds par des véhicules automatisés. D'ici la fin de la décennie, le plan éliminera 800 personnes de notre site. Vous pouvez imaginer les épargnes que nous allons faire du point de vue opérationnel ! »

Alister Cowan n'a cependant pas mentionné, du moins pas publiquement, que le nouvel investissement dans les camions automatisés sera rapidement remboursé non seulement à titre de valeur transférée mais aussi à titre de valeur ajoutée réalisée sur le tas grâce au dégrèvement d'impôt du gouvernement Harper. Le Calgary Herald ajoute : « L'utilisation de camions automatisés ne se limitera sans doute pas à Suncor, bien que les autres entreprises hésitent encore à confirmer leurs plans. Pius Rolheiser, porte-parole d'Imperial Oil, n'a pas voulu confirmer que son entreprise fait l'essai de ces camions à la mine de sables bitumineux de Kearl, qui prévoit doubler sa capacité de production à 220 000 barils par jour dans les semaines qui viennent. 'Bien qu'Imperial ne discute pas publiquement de ses plans spécifiques, il est une pratique courante pour nous d'examiner les nouvelles technologies et leur potentiel du point de vue de l'amélioration de la sécurité et de l'efficacité de nos opérations', a-t-il dit.

« De même, selon le porte-parole de la minière des sables bitumineux Shell Canada, 'nous explorons les possibilités de camionnage automatisé mais n'avons pas d'échéancier précis pour l'instant'. »

La machinerie mobile automatisée ne se limite pas au camionnage. Les plus grandes sociétés de forage pétrolier du Canada, Precision Drilling Corp et Ensign Energy Services, se servent déjà de plateformes de forage de haute technologie capables de se déplacer automatiquement d'un puits à l'autre. La chute du prix mondial du pétrole de pair avec la manoeuvre fiscale du gouvernement Harper pour payer les riches et le discours habituel selon lequel il faut le faire puisque les concurrents le font, vont à coup sûr pousser les entreprises à se procurer plus de machinerie sans opérateur.

Au-delà du secteur pétrolier, au Canada c'est plus de 600 000 travailleurs qui sont employés comme opérateurs de véhicules motorisés, soit 260 000 conducteurs de camions lourds, 900 conducteurs de camions de livraison du courrier et 97 000 opérateurs d'autres équipements lourds. Des milliers d'autres conduisent des autobus, des tramways et des trains utilisés dans le transport urbain. Il y a déjà plusieurs trains sans conducteur au Canada, comme le Sky Train à Vancouver. Beaucoup de postes de conducteurs seront menacés.

Qui décide et pour qui ?

Les questions entourant le développement des forces productives sont extrêmement importantes. Elles ne peuvent être laissées à la discrétion des monopoles et, comme l'affirme avec une telle arrogance le représentant du monopole pétrolier, « Imperial Oil ne discute pas publiquement de ses plans spécifiques ». La classe ouvrière qui en est directement affectée, ses alliés partout au pays et le peuple en général ne peuvent accepter que tout cela soit sujet à des ententes secrètes ou pas si secrètes. Ils doivent avoir voix au chapitre, ils doivent pouvoir exercer un contrôle, sinon l'intérêt public ne sera pas servi et la responsabilité publique envers l'environnement social et naturel ne sera pas respectée.

Il n'est pas exagéré de dire que les entreprises ont une vision étroite de la problématique des camions sans conducteur et de l'introduction de technologies nouvelles et controversées des forces productives. L'enthousiasme du directeur des finances de Suncor à « éliminer 800 personnes de notre site » est caractéristique de la vision tubulaire de ceux qui possèdent ou contrôlent les monopoles, sans parler de l'empressement du gouvernement Harper à servir les riches aux dépens de la classe ouvrière.

On ne peut pas s'attendre à ce que ceux qui possèdent et contrôlent les monopoles voient au-delà de l'intérêt privé et du bilan trimestriel. Leur objectif est de servir leur empire et sa rentabilité. Ils ne veulent pas assumer la responsabilité sociale pour le chômage, les inégalités, la pollution, l'anarchie de la montée en flèche et de la chute subite des prix, de la chute du taux de profit qu'entraîne l'augmentation de la productivité et l'effet destructeur des contre-mesures que prennent les monopoles pour se protéger, la disparition de l'industrie manufacturière au Canada et ainsi de suite. L'intérêt public n'est pas servi par ces capitaines mondiaux de l'industrie et leurs décisions et plans secrets basés sur l'intérêt privé étroit et à courte vue ni par l'aplaventrisme des élus comme ceux du gouvernement Harper.

La classe ouvrière doit s'attaquer à ces problèmes directement. L'économie est présentement contrôlée par des impérialistes mondiaux qui n'ont pas à coeur les intérêts des peuples. Les nouveaux développements dans les forces productives et leurs conséquences ne sont pas un problème comme tel. Ces problèmes peuvent être résolus par l'investigation scientifique et de grandes campagnes de discussion publique. Les problèmes qui ont à voir avec le développement des forces productives, y compris la pollution et les conséquences sociales, concernent d'abord qui décide : qui décide de ces enjeux et quel est le but de ceux qui sont en position de contrôle ? Le but est-il de servir l'intérêt public ou l'intérêt privé étroit ? La question de qui décide et contrôle les forces productives et leur utilisation est au coeur de la problématique à laquelle sont confrontés les opérateurs de camions lourds de Suncor, voire tous les travailleurs et toutes les communautés du Canada.

La classe ouvrière doit voir qu'elle seule peut faire une différence en se plaçant au centre des prises de décisions concernant le développement des forces productives et en s'assurant que tous les aspects, bons et mauvais, soient discutés pleinement et les décisions appliquées en toute responsabilité sociale. Le chômage n'est pas quelque chose qui peut être laissé au hasard ou à la volonté de ceux dont l'intérêt privé international passe avant toute chose. La pollution et le changement climatique, le bien-être de la population en général, le sort de l'industrie canadienne de fabrication de l'équipement lourd et la direction générale de l'économie ne peuvent non plus être laissés à l'abandon.

Les changements dans les forces productives ne se produisent pas en vase clos. La manoeuvre fiscale du gouvernement Harper pour payer les riches et la mondialisation impérialiste créent des problèmes réels pour le peuple. Il ne s'agit pas de développements inoffensifs sans conséquence pour le peuple et l'économie. C'est pourquoi la classe ouvrière doit se placer au centre et exiger que l'intérêt public soit défendu et non enterré sous l'euphorie de ceux qui comptent les profits à tirer. Il faut changer le centre d'attention du débat et le ramener à l'intérêt fondamental du peuple, au bien-être de la population et à la nécessité de changer la direction de l'économie pour servir le bien public. Il faut le ramener à notre droit de décider et de contrôler les développements qui nous affectent.


L'arrivée de camions sans conducteur facilitée par d'énormes subventions de l'État montre clairement qui l'économie sert et qui elle devrait servir. Les conséquences brutales de ces développements, soit le chômage pour la multitude et le transfert d'une importante partie de la richesse sociale dans les poches des monopoles privés Suncor et Komatsu, ne peuvent être balayées sous le tapis. La responsabilité sociale dans l'économie doit être défendue et pour ce faire le peuple doit avoir les moyens de contrôler le processus décisionnel. La classe ouvrière ne peut se permettre d'être sentimentale ou d'être manipulée à ce sujet, elle doit exiger que l'économie serve l'intérêt public et non l'intérêt privé étroit des monopoles. Le fait que la manoeuvre fiscale du gouvernement Harper serve quelques actionnaires de New York et les propriétaires de Komatsu au Japon et non les Canadiens doit nous éveiller à la nécessité de s'opposer à la mondialisation impérialiste et de nous imposer comme décideurs des choses qui nous concernent.

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Les camions sans chauffeur de Suncor vont-ils mettre les camionneurs albertains au chômage?

Voici des extraits d'une entrevue avec des travailleurs des sables bitumineux qui a été diffusée le 19 juin à l'émission de radio Day 6 du réseau CBC animée par Brent Bambury.

***

Au début juin, Suncor Energy Inc. a confirmé avoir signé un contrat de cinq ans avec le fabricant japonais Komatsu pour l'achat de véhicules sans chauffeur.

La compagnie a déjà conclu l'achat de 175 camions sans chauffeur et un porte-parole a dit que l'entreprise prévoit remplacer toute sa flotte de camions d'ici la fin de la décennie.

Les membres du syndicat local craignent que cette technologie ne leur fasse perdre des centaines d'emplois.

Barrie Kirk est le directeur exécutif de la firme de consultants Centre d'excellence des véhicules automatisés canadiens (le CAVCOE).

Steve Kelly est le trésorier de la section locale 707A du syndicat Unifor à Fort McMurray. Il est opérateur d'équipement lourd chez Suncor depuis dix ans.

CBC : Suncor se prépare à acheter 175 camions sans chauffeur et veut renouveler toute sa flotte avec ce type de camions d'ici la fin de la décennie. Est-ce que la compagnie est en avance sur son temps en faisant appel à cette technologie ?

Barrie Kirk : Non, c'est la tendance actuelle. Les camions sans chauffeur sont chose commune dans les opérations minières en Australie depuis un an ou deux. Ce que l'industrie est en train de faire dans ce cas-ci c'est de faire ces changements là où c'est le plus simple. C'est plus facile de concevoir et de faire rouler un camion sans chauffeur sur un territoire privé comme les sables bitumineux que sur une route publique.

Malheureusement, des emplois vont disparaître.

CBC : Ces entreprises vont-elles perdre de l'argent si elles ne suivent pas le rythme de l'industrie ?

BK : Elles vont perdre de l'argent et une partie de leur position concurrentielle. Si elles ne le font pas, d'autres vont le faire.

Malheureusement, cette technologie va faire perdre beaucoup d'emplois, pas juste dans l'industrie du camionnage mais dans le transport en général.

CBC : Le long terme a vraiment l'air d'un court terme. On parle d'une pleine utilisation de ces véhicules d'ici la fin de la décennie. Quel va être le coût en emplois ? Pensez-vous qu'on va être capable de s'occuper de ceux qui vont perdre leur emploi à cause des nouveaux camions ?

BK : Au CAVCOE, nous travaillons avec le Conference Board of Canada et l'Institut Van Home. Nous avons montré que ces camions automatisés, une fois pleinement déployés, vont apporter 65 milliards $ par année à l'économie canadienne. Beaucoup d'emplois vont disparaître. J'espère que les gouvernements à tous les niveaux vont prendre au sérieux leur responsabilité d'aider les travailleurs à se recycler et ainsi adoucir la transition pour ceux qui sont affectés par les changements.

CBC : Steve, vous conduisez un de ces camions de chargement lourds. Craignez-vous pour votre sécurité d'emploi ?

Steve Kelly : C'est inquiétant. L'idée même d'avoir des camions de chargement sans chauffeur fait peur. Quand vous pensez aux pertes d'emploi qui, chez nous, pourraient se chiffrer à 800, c'est angoissant.

CBC : Si Suncor met à exécution son plan de remplacer toute sa flotte de camions d'ici 2020, à combien estimez-vous les pertes d'emplois que ça va causer ?

SK : Suncor nous a dit qu'ils en sont à la phase des tests en ce moment, qu'il n'est pas possible de renouveler toute la flotte d'ici 2020. Cela dit, une perte d'emploi est une perte d'emploi. Ça ne concerne pas juste moi et mes collègues. C'est l'avenir qui est en jeu. Qu'on parle d'un conducteur de camion lourd ou de 800, c'est nous tous qui en souffrons et il y a un effet domino. Nous allons sans hésiter protéger un camionneur en chair et en os qui soutient sa communauté plutôt qu'un ordinateur.

CBC : D'accord, mais le secteur pétrolier est mondial et l'industrie pétrolière canadienne doit être concurrentielle. Pensez-vous que c'est inévitable que Suncor et les autres pétrolières prennent ce tournant ?

SK : Je pense que c'est inévitable qu'ils vont l'expérimenter. Quant à savoir s'ils vont l'adopter ou non, ce n'est pas certain. L'avenir nous le dira.

CBC : Mais est-ce qu'ils ont le choix d'aller de l'avant si ça devient le standard mondial ?

SK : La question est bien plus profonde. Il ne s'agit pas seulement de savoir si les camions automatisés apporteront un avantage financier.

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Le référendum grec du 5 juillet sur les propositions des créanciers

Une bataille épique contre l'austérité
et le pillage impérialistes


Le 5 juillet 2015, le peuple grec a remporté un succès historique pour lui-même et les peuples du monde en rejetant par référendum les mesures brutales d'austérité de la Commission européenne, du Fonds monétaire international et de la Banque centrale européenne. Il a résisté à la très forte pression exercée par les représentants de l'oligarchie financière et les médias monopolisés, une pression qui s'est accentuée à mesure que s'approchait le jour du référendum, à l'effet qu'il devait voter oui sinon c'en était fait de la Grèce et le peuple grec serait privé des produits de première nécessité et connaîtrait des tragédies encore plus grandes que celles qui lui ont été imposées jusqu'à maintenant. Alors que les médias monopolisés prédisaient un vote divisé 50-50 ou remporté par une infime majorité, c'est à 61 % des votes exprimés que le peuple a voté non. Le premier ministre Alexis Tsipras est maintenant fort de ce « non » retentissant pour soutenir la demande du peuple grec d'une entente qui lui permette de vivre dans la dignité. Le peuple grec livre une lutte résolue pour la défense de son droit d'être et sa résistance est devenue une source d'inspiration pour tous, en particulier les peuples d'Europe. Il s'est organisé pour résister à l'Union européenne des monopoles et priver ses institutions de son pouvoir de dicter et de priver non seulement les Grecs mais tous les peuples et les nations d'Europe de leur droit démocratique et souverain de se gouverner et de décider de la direction de leur économie. Une nouvelle bataille commence. Les Grecs doivent maintenant défendre leur décision souveraine et intensifier leurs efforts pour bâtir une alternative prosociale. Le Marxiste-Léniniste félicite de tout coeur le peuple grec pour son vote tranchant au référendum et se tient fermement à ses côtés dans la lutte contre l'austérité et le pillage impérialistes.

Le référendum sur le programme d'austérité des monopoles européens

Le dimanche 5 juillet, les Grecs se sont mobilisés pour participer à un référendum national qui demandait aux électeurs d'indiquer leur approbation ou leur rejet d'une proposition faite le 25 juin à la Grèce par la Commission européenne (CE), le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque centrale européenne (BCE). La proposition de la CE, du FMI et de la BCE (« la troïka ») comportait deux documents, « Réformes pour la réussite du programme actuel et au-delà », et « Analyse préliminaire de la soutenabilité de la dette ». Le référendum a été organisé par le gouvernement de Syriza, élu le 25 janvier par un vote du peuple grec contre l'austérité.

La troïka exigeait l'imposition de mesures d'austérité encore plus sévères que ce qui a été imposé par le précédent gouvernement grec déchu en échange d'un paiement « de sauvetage » pour couvrir « les dettes », en particulier celles imposées depuis la crise financière de 2008 et la restructuration de l'État grec par l'impérialisme. Le gouvernement grec exige une restructuration de la dette, dont une grande partie a été jugée illégale et illégitime par une étude parlementaire. Les plus grands détenteurs de la dette grecque sont l'Allemagne, suivie de la France, l'Italie, l'Espagne, le FMI et la BCE.

Le 26 juin, le premier ministre grec Alexis Tsipras a annoncé la tenue du référendum, après une réunion du cabinet. Il a déclaré que les propositions « violent clairement les règles européennes et les droits fondamentaux au travail, à l'égalité et la dignité, et révèlent que l'objectif de certains des partenaires et des institutions n'est pas une entente viable pour toutes les parties, mais probablement l'humiliation de tout un peuple ».

Dans son allocution, Tsipras a dit : « Je vous demande de décider dignement et souverainement, comme l'histoire de la Grèce nous enseigne à le faire, si nous devrions accepter l'ultimatum et le chantage qui entraîneront une austérité humiliante sans fin, et la perspective de ne jamais pouvoir nous tenir debout sur nos deux pieds, socialement et financièrement.

« Nous devons répondre à l'autoritarisme et l'austérité draconienne par la démocratie, calmement et de façon décisive. »

De grands rassemblements ont eu lieu presque chaque jour dans la capitale, Athènes, pour dénoncer l'austérité, rejeter la proposition de la troïka et défier le diktat de l'UE, le premier a eu lieu tout de suite après l'annonce de la tenue du référendum. Le plus grand a été le rassemblement final le 3 juillet en soirée pour appeler à voter non. La place Syntagma n'était pas assez grande pour contenir tout le monde. Selon certains, il s'agissait là d'une des plus grandes manifestations politiques que la Grèce ait connues depuis la fin de la dictature en 1974. Le premier ministre Tsipras s'est adressé à la foule qui scandait « Non ! » et il a appelé les Grecs à demeurer unis et à ne pas plier devant le chantage.


Vue aérienne du rassemblement du Non ! du 3 juillet à Athènes

Le premier volet de l'ensemble des propositions soumises au vote par référendum énonçait une série de mesures d'austérité draconiennes, qui devaient être imposées au gouvernement et au peuple grecs, comprenant « des finances publiques durables qui soutiennent la croissance et l'emploi »,« la réforme de la TVA [taxe sur la valeur ajoutée] », « la réforme des retraites », « des mesures paramétriques budgétaires supplémentaires », « les réformes dans l'administration fiscale », « la gestion des finances publiques », « préserver la stabilité financière »,« le marché du travail », « le marché des produits »,« la privatisation », « l'énergie », « l'administration publique », « la justice », « l'anticorruption » et « les statistiques ». Le deuxième volet demandait à la Grèce de ramener à 124 % le ratio de sa dette par rapport à son PIB d'ici 2020 par des compressions sévères dans les dépenses publiques.

Bien que compilé par la troïka et servant ses intérêts de même que ceux des États-Unis, des monopoles européens et des grandes puissances européennes comme l'Allemagne, le document sur les réformes d'austérité était rédigé comme s'il émanait du gouvernement grec. Pour dissimuler leur diktat ouvert sur la nation grecque souveraine, les autorités de l'UE et du FMI ont insisté pour que la proposition soit adoptée par le gouvernement grec comme étant la sienne. Par exemple, on lit dans le document que « les autorités grecques s'engagent à approuver et à procéder à un programme ambitieux de privatisation ».

Dans son allocution du 26 juin aux Grecs, le premier ministre Alexis Tsipras a déclaré que le gouvernement a dû « livrer un combat dans des conditions d'asphyxie financière inouïes pour aboutir à un accord viable qui mènerait à terme le mandat que nous avons reçu du peuple. ». Il a souligné que la troïka a maintes fois fait pression sur le gouvernement grec pour mettre en oeuvre des politiques que les Grecs ont rejetées. Les propositions de la CE, du FMI et de la BCE ciblent « la démocratie grecque et le peuple grec », a-t-il dit. Il a ajouté que la nouvelle proposition qui allait être soumise au vote le 5 juillet « va ajouter un nouveau poids insupportable sur les épaules du peuple grec et sape la relance de la société et de l'économie grecques ». Il a souligné que la proposition va en outre déréglementer le marché du travail, réduire les pensions, réduire les salaires du secteur public et accroître la pression sur les régions et les produits de première nécessité.

Le chantage et la déstabilisation impérialistes pour saboter le vote


Rassemblement du Non ! du 3 juillet à Athènes

Dès que le référendum a été appelé, la Commission européenne est intervenue de façon cynique ; elle s'est opposée à son échéancier et à ses questions et a recommandé aux Grecs de voter « Oui » sous la menace de mesures d'austérité encore plus sévères. Après que la troïka et les puissances européennes eurent soulevé l'hystérie sur les conséquences d'un vote en faveur du « Non », le gouvernement grec a été contraint de mettre en place des mesures de contrôle des capitaux et de fermetures sélectives des banques pour prévenir la déstabilisation de son économie, laquelle, a dit Tsipras, est une tentative de chantage sur les Grecs pour leur arracher un « oui ».

À mesure que la date du référendum approchait, les puissances européennes et les médias monopolisés mondiaux ont accru leur pression sur les Grecs afin qu'ils renoncent à leur position contre l'austérité.

Les dirigeants de l'UE ont dit qu'un vote en faveur du « Non » pourrait mettre fin au statut de la Grèce comme membre de l'UE, laissant entendre que les Grecs iraient à la catastrophe s'ils exerçaient leur souveraineté sur leur économie et leur devise. Ils ont dit que peu importe ce que les Grecs décident, la troïka ne va pas cesser son pillage et que le peuple n'a d'autre choix que d'accepter que son destin va être décidé par les exigences des monopoles européens. Les journaux européens ont affiché à grands titres qu'un vote pour le « Non » exclurait la Grèce de l'Union européenne, tandis qu'un magazine financier allemand représentait Alexis Tsipras tenant un fusil sur sa tempe. Les pages éditoriales des médias monopolisés étaient remplies d'appels aux Grecs à demeurer au sein de l'Europe. D'autres ont déclaré que le « Oui » est la seule option et que bien que l'austérité ait des conséquences négatives, la résistance au diktat du capital financier va amener des souffrances encore plus grandes dans l'avenir. Les porte-parole des impérialistes n'ont cessé de répéter que la « vraie » question du référendum c'est le choix entre l'euro ou le drachme comme monnaie pour la Grèce.

L'élite dirigeante grecque et ses représentants, sous le joug de qui les programmes d'austérité et de restructuration les plus draconiens ont été mis en oeuvre, ont aussi appelé à voter « Oui ». À la veille du vote, Nouvelle Démocratie et PASOK (le parti socialiste panhellénique) ont tenu à Athènes un rassemblement sous le thème « Nous restons dans l'Europe ».

La semaine précédant le vote a été marquée par une campagne frénétique de rumeurs, avec de nouvelles insinuations chaque jour à l'effet que le gouvernement grec pourrait annuler le référendum, accepter la proposition, que peut-être il était divisé, à la veille de tomber, que le référendum est peut-être juste une manoeuvre, et ainsi de suite. Les Grecs ont affronté des intrigues impérialistes à grande échelle visant à semer doute et confusion et à briser l'unité du peuple pour un rejet des propositions d'austérité.

Les Grecs luttent pour une nouvelle direction qui défend le droit public

Le peuple grec a appris de sa propre expérience qu'il est nécessaire de prendre position contre l'austérité et d'affirmer sa souveraineté, de renverser l'offensive antisociale néolibérale et de tracer la voie à une nouvelle direction prosociale. C'est bien connu que le capital financier allemand et européen et leurs gouvernements n'ont pas à coeur les intérêts du peuple grec, et c'est cette vérité qui frappe aujourd'hui de plein fouet les Grecs qui en ont subi les affres. En réitérant sa position contre l'austérité, la Grèce défend les droits de tous les peuples.

Le coeur des Canadiens ne fait qu'un avec le peuple grec dans cette bataille épique pour défendre le droit public contre le droit de monopole. Les peuples ont enclenché une lutte héroïque contre les forces du capital monopoliste contrôlé par les grandes puissances d'Europe et de l'impérialisme américain et contre leurs sinistres intentions d'imposer leurs intérêts privés étroits au détriment de l'intérêt public et du bien commun.

Le peuple grec se bat pour le droit de se gouverner lui-même, pour une alternative prosociale souveraine et pour une nouvelle direction à son pays ancien et à son économie moderne en opposition au diktat et aux catastrophes qu'ils ont vécus au sein du système impérialiste d'États.

Le Parti communiste du Canada (marxiste-léniniste) lui souhaite plein de succès dans cette bataille épique contre l'austérité et le pillage impérialistes.

(Photos : J. Roos, Xinhua, Aerialtale, M. Lowen)

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Le contexte de la crise de la dette grecque


Manifestation du 29 juin 2015 organisée par le gouvernement grec contre les conditions du plan de sauvetage de l'UE

Extraits d'un article intitulé « Un guide simple sur le drame financier en cours en Grèce » de Kavaljit Singh, directeur de Madhyam, un institut de recherche sur les politiques basé à New Delhi. Il fut publié dans The Wire le 3 juillet 2015.

***

La saga de la dette grecque se poursuit sans résolution en vue. Comme prévu, les dirigeants européens ont rejeté une proposition de dernière minute d'Alexis Tsipras, premier ministre de la Grèce, demandant une prolongation du programme de sauvetage qui expirait le 30 juin et cherchant un nouveau plan de 29,1 milliards d'euros qui aurait pu couvrir les obligations du pays envers la dette pour les deux prochaines années.

Ce rejet a mené le pays au défaut de paiement de son remboursement de 1,6 milliard d'euros au Fonds monétaire international. La Grèce est le premier pays développé à faire défaut. Bien que le FMI n'utilise pas le terme, il classera la Grèce comme étant « en défaut de paiement » et le pays ne recevra des fonds à l'avenir que lorsque les arriérés auront été réglés. [...]

Aucune discussion sur la crise de la dette grecque ne serait complète sans analyser comment la dette publique du pays s'est accumulée au cours des années. En 2004, la dette publique du pays était de 183,2 milliards d'euros. En 2009, elle atteignait 299,5 milliards d'euros, ou 127 % du PIB du pays. En ce moment, la dette publique grecque s'élève à 323 milliards d'euros, près de 175 % du PIB du pays.

Les détracteurs et partisans du gouvernement grec admettent qu'un ratio dette/PIB aussi élevé est insoutenable. Le gouvernement actuel cherche une annulation substantielle de la dette du pays afin de le remettre dans une trajectoire de croissance. Tout en cherchant un allègement de la dette pour la Grèce, plusieurs économistes et experts juridiques ont fait référence à l'Entente de Londres en 1953 qui donna à l'Allemagne de l'Ouest un généreux allègement de la dette en effaçant 50 % de sa dette, accumulée après les guerres mondiales. Cet allègement de la dette fut un des facteurs clés qui a permis la ré-émergence de l'Allemagne en tant que puissance économique mondiale dans la période d'après-guerre.

En 2015, le parlement grec a mis sur pied une Commission pour la Vérité sur la Dette publique pour enquêter sur comment la dette étrangère du pays s'est accumulée de 1980 à 2014. La Commission a récemment publié un rapport préliminaire dans lequel elle déclare que la dette publique grecque est largement illégitime et odieuse. Je voudrais sincèrement inviter les lecteurs à lire ce rapport, car il remet en question plusieurs mythes populaires associés à la dette publique grecque. Selon le rapport, l'accroissement de la dette avant 2010 n'était pas dû à des dépenses publiques excessives mais plutôt au paiement de taux d'intérêts extrêmement élevés aux créanciers et à la perte de revenus d'impôt en raison de sorties illicites de capitaux. Des dépenses militaires excessives ont aussi eu lieu avant 2010.

Chose plus importante encore, le rapport révèle comment la première entente de prêt de 2010 fut utilisée pour sauver les banques privées grecques et européennes (notamment allemandes et françaises). Les ententes de prêt de 2010 (et 2012) ont aidé les banques privées et les créanciers à se décharger de leurs obligations risquées émises par le gouvernement grec. En d'autres mots, les avoirs risqués des banques privées ont été transformés en dette du secteur public par l'entremise des plans de sauvetage. Comme le souligne Tim Jones de la Jubilee Debt Campaign, ce n'est pas le peuple grec qui a bénéficié des plans de sauvetage de la troïka mais les banques européennes et grecques qui ont prêté de l'argent de manière imprudente au gouvernement grec en premier lieu. [...]

Qui détient la dette publique grecque ? Actuellement, près de 80 % de la dette publique grecque est détenue par des institutions publiques, principalement de l'Union européenne (États membres de l'UE, Banque centrale européenne, Fonds européen de stabilité financière et le FMI). Le reste est détenu par des créanciers privés. [...]

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Réquisitoire contre l'austérité

Comment ruiner une économie déjà en difficulté qui a besoin
d'être aidée au lieu d'être maltraitée


Autocollants pour appeler les gens à voter en masse « non » à l'austérité lors du référendum du 5 juillet 2015

La crise économique mondiale a frappé en 2008. Les grandes puissances, sous la direction de l'impérialisme américain, ont pris immédiatement des mesures pour protéger leurs puissants monopoles. En Europe, les monopoles situés en Allemagne, en Grande-Bretagne et en France ont commencé à passer les conséquences de la crise aux peuples et aux pays plus faibles qu'ils dominaient, notamment la Grèce, l'Irlande, Chypre, le Portugal et l'Espagne. Les grandes puissances ont imposé à ces pays des mesures d'austérité sévères en utilisant leur domination économique, les armes institutionnelles de l'Union européenne des monopoles et leurs apologistes politiques régionaux.

De 2010 à 2013, les grandes puissances ont contraint la Grèce à appliquer sept plans d'austérité différents pour défendre le droit de monopole, supplanter le droit public et détourner la richesse sociale pour payer les riches. Leurs mesures antisociales, entre autres, ont consisté à couper des investissements dans les programmes sociaux et les services publics, à brader les biens publics, à licencier les travailleurs, à démanteler les régimes de retraites, à attaquer les plus vulnérables et à instituer des hausses importantes de l'impôt des particuliers et de la taxe de vente. Ces attaques du droit de monopole ont perturbé l'économie de façon importante et accéléré son déclin provoqué par la crise économique mondiale.

L'austérité en Grèce

En Grèce, le taux de chômage a fait un bond de 6,6 % à 24,8 % de 2008 à en 2014. Parmi les jeunes de moins de 25 ans, le taux de chômage a grimpé à un inadmissible 55 %.

À cause des concessions imposées par l'austérité, les salaires ont chuté à des niveaux qu'on n'avait pas vus depuis les années 1980. Le nombre de suicides a augmenté de 40 %.

Le produit intérieur brut a chuté de 26 % de 2008 à 2014. En comparaison, le PIB de l'Allemagne a augmenté de 14 % durant la même période.

En Grèce, les dépenses publiques pour les programmes sociaux ont diminué de 28 % de 2008 à 2014, malgré la demande accrue. Les recettes publiques ont diminué de 17 %. En Allemagne, les dépenses du gouvernement ont augmenté de 15 % de 2008 à 2014 tandis que ses revenus ont augmenté de 16 %.

Les grandes puissances ont imposé des mesures d'austérité malgré les avertissements de leurs propres économistes concernant les effets négatifs que cela aurait sur l'économie. Wikipédia souligne que « dans une étude de 133 programmes d'austérité du FMI réalisée en 2003, le Bureau indépendant d'évaluation du FMI a trouvé que les décideurs ont sous-estimé constamment les effets désastreux des compressions rigides des dépenses sur la croissance économique ».

En février 2012, le journal The Guardian a réitéré les avertissements antérieurs du FMI dans un article : « La semaine dernière, le parlement grec a adopté son cinquième plan d'austérité en moins de deux ans. L'austérité en Grèce est particulièrement sévère. Bien que la Grèce soit dans la quatrième année d'une récession grave marquée par une baisse de la production réelle de 12 % depuis 2007, le déficit budgétaire par rapport au PIB a été réduit de sept points de pourcentage, un exploit presque unique dans l'histoire. Mais ces politiques étaient contre-productives. Le ratio de la dette au PIB a explosé, les rendements des obligations d'État sont restés très élevés et les indicateurs de la confiance des entreprises et des consommateurs sont en chute libre. Le taux de chômage se situe maintenant à 21 %. Les jeunes sont particulièrement touchés : le chômage parmi les personnes âgées de moins de 25 ans, déjà élevé avant la crise, se situait à 40 % en 2011. Par conséquent, les faillites d'entreprises, les taux de suicide et de criminalité ont augmenté.

« Fortement influencée par le ministère des Finances de l'Allemagne, la solution de la troïka (la Commission européenne, le FMI et la BCE) à l'échec de l'austérité est encore plus d'austérité. Tout comme la Commission européenne et la BCE, le ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble, reste convaincu que l'austérité budgétaire crée la confiance, même s'il a déjà été prouvé que ce n'est pas le cas. Ces convictions sont à la base de l'ensemble des prévisions de croissance de la troïka sur lesquelles reposaient les objectifs de réduction du déficit. Puisqu'il n'y n'avait aucune reprise de la confiance, la croissance a chuté brusquement et le gouvernement a raté systématiquement les objectifs fixés.

« Tout cela était prévisible — et en fait, prévu. Dans une étude de 133 programmes d'austérité du FMI réalisée en 2013, le Bureau indépendant d'évaluation du FMI est arrivé à la même conclusion : que le régime d'austérité est voué à l'échec à cause de la sous-estimation de ses effets désastreux sur la croissance économique. »

Un communiqué Eurostat 21/2012 indique : « Le pourcentage de la population [grecque] à risque de pauvreté ou d'exclusion sociale... a été établi à 27,6 % en 2009 et à 27,7 % en 2010 (légèrement moins bon que la moyenne de l'UE des 27 à 23,4 %), mais pour 2011, l'estimation a fortement augmenté pour se situer au-dessus de 33 %. »

Reflétant cette réalité, dans un article de 2012 qui avait pour titre : « J'ai peur d'une explosion sociale : Les Grecs ne peuvent pas encaisser plus de sanctions » le Guardian indique : « La vérité, tout aussi incompréhensible que cela puisse paraître pour le FMI, l'Union européenne et la Banque centrale européenne, la troïka des créanciers de la Grèce, est que, loin de boucher les trous noirs de son budget, l'austérité sévère poursuivie dans l'objectif de réduire le déficit a poussé la Grèce vers l'effondrement économique et social. Les impitoyables réductions des salaires et des retraites, les hausses d'impôt et les coupures budgétaires ont fait du pays une ombre de lui-même. Dans sa cinquième année de récession, la Grèce n'est qu'une version évidée de ce qu'elle était autrefois et se désintègre un peu plus à chaque jour. Des hommes et des femmes fouillent des poubelles tard la nuit. Un nombre grandissant de personnes dorment dans la rue. La semaine dernière, en même temps qu'Eurostat, qui produit les statistiques officielles de l'Union européenne, annonçait que la pauvreté touche plus d'un tiers de la population du pays, on apprenait que le chômage touchait un million de personnes et était passé de 19 % à 20,9 % en un mois.

« Rien ne fonctionne. Personne ne paie plus personne et l'État n'est pas juste en train de s'effondrer, il est complètement paralysé, dit Giorgos Kyrtsos, un éminent commentateur politique. « Ces gens, dit-il au sujet des fonctionnaires de la troïka des agences européennes responsables de négocier le plan de sauvetage, devraient vraiment perdre leur emploi. Ils ont tout mal calculé. Je ne comprends pas... le syndicat de la police a réclamé leur arrestation. »

Dès 2011, l'expert indépendant des Nations unies chargé de la dette extérieure et des droits de l'homme avait mis en garde : « Les mesures d'austérité et de réformes structurelles proposées pour résoudre la crise de la dette de la Grèce peuvent entraîner des violations des droits humains fondamentaux de la population... La mise en oeuvre d'un second paquet d'austérité et de réformes, qui inclut la privatisation des entreprises et des actifs de l'État, aura un impact significatif sur les services sociaux de base et, par conséquent, sur la jouissance des droits de l'homme par le peuple grec, surtout dans les couches les plus vulnérables de la population, comme les pauvres, les personnes âgées, les chômeurs et les personnes ayant une déficience, dit Cephas Lumina, rapporteur du Conseil de droits de l'homme des Nations unies à Genève.


Une des nombreuses manifestations anti-austérité à Athènes, le 20 octobre 2011

« Les droits à l'alimentation, à l'eau potable, à un logement adéquat et au travail dans des conditions acceptables et équitables ne devraient pas être compromis par la mise en oeuvre de mesures d'austérité, a-t-il dit. Il a exhorté le gouvernement à tenir compte de la primauté des obligations relatives aux droits humains des États. M. Lumina a également appelé les autorités à maintenir une certaine marge de manoeuvre budgétaire pour répondre aux droits humains fondamentaux, en particulier les droits économiques, sociaux et culturels ....

« Une économie en décroissance ne peut pas générer des recettes et contribue à une capacité réduite de remboursement de la dette... Il a appelé le Fonds monétaire International (FMI), l'Union européenne (UE) et la Banque centrale européenne (BCE) à tenir compter de l'impact sur les droits humains des politiques qu'ils conçoivent pour tenter de résoudre la crise de la dette souveraine en Grèce et dans d'autres pays. Il n'y aura aucune solution durable au problème de la dette souveraine si les droits de l'homme ne sont pas pris en compte, a dit M. Lumina, qui intervient à titre bénévole. » (Centre d'actualité de l'ONU, 2011)

L'économiste britannique Roger Bootle a déclaré en février 2012 : « Une baisse de 25 % [du PIB] est à peu près ce qu'ont connu les États-Unis durant la grande dépression des années 1930. L'ampleur des mesures d'austérité déjà adoptées [en Grèce] fait tiquer. En 2010 et 2011, la Grèce a fait des compressions budgétaires d'une valeur de près de 17 % du PIB. Mais parce que cela a entraîné une baisse du PIB, chaque euro de resserrement budgétaire a réduit le déficit de seulement 50 cents .... les tentatives de réduire la dette seulement par l'austérité ne peuvent entraîner que la misère. »[1]

John Milios, professeur d'économie politique à l'Université technique nationale d'Athènes, écrit dans son article du 29 mai 2015 intitulé « La logique de classe intrinsèque des politiques d'austérité » :

« À la suite de l'éclatement de la crise économique mondiale de 2008, des politiques extrêmes d'austérité se sont imposées dans de nombreux endroits du monde capitaliste développé, en particulier au sein de l'Union européenne (UE) et dans la zone euro. L'austérité constitue la pierre angulaire des politiques néolibérales.

« Elle est complétée par une économie dans l'utilisation de 'capital matériel' (hélas, une autre stratégie diminuant la demande !) ainsi que par des changements institutionnels qui, d'un côté, améliorent la mobilité du capital ainsi que la concurrence alors que, de l'autre, ils renforcent le pouvoir des gestionnaires dans les entreprises ainsi que celui des actionnaires et des détenteurs d'actions comme d'obligations. Pour ce qui a trait à l'assainissement budgétaire, l'austérité accorde une priorité aux coupes dans les recettes publiques, réduisant les impôts sur le capital ainsi que sur les hauts revenus et réduisant 'l'État social'.

« Elle promeut constamment les intérêts du capital contre ceux des travailleurs, de membres des professions libérales, des retraités, des chômeurs et des secteurs sociaux économiquement vulnérables. Sur le long terme, son but est de créer un type de forces de travail (de salariat) possédant des droits plus réduits ainsi qu'une moindre protection sociale, conjointement à des salaires bas et flexibles. À cela s'ajoute l'absence d'un quelconque pouvoir de négociation substantiel des salariés. »

Milios écrit que l'austérité augmente le taux d'exploitation de la classe ouvrière, la plus-value absolue que les employeurs extraient au cours du temps de travail en réduisant la réclamation des travailleurs à la valeur produite avec les salaires, les avantages sociaux et les retraites, la valeur de leur capacité de travail et la valeur d'usage potentielle. Ces mesures sont prises par les monopoles mondiaux le plus puissants pour contrer la loi de la baisse tendancielle du taux de profit et les crises économiques récurrentes que connaît le système capitaliste. Les mesures pour défendre le droit de monopole et priver les gens de leurs droits sont désastreuses pour le peuple et destructrices pour l'économie.

« [Les capitalistes tentent] de consolider [leurs] marges de profit au moyen de coupes salariales, de l'intensification du procès de travail, de la violation des législations du travail comme des droits des travailleurs, de licenciements massifs, etc. Du point de vue des intérêts du grand capital, la récession donne ainsi naissance à un 'processus de destruction créatrice' : une redistribution des revenus et du pouvoir au bénéfice du capital, une concentration de la richesse dans un nombre encore plus réduit de mains (alors que les petites et moyennes entreprises, en particulier dans le commerce de détail, sont 'balayées' par les grandes entreprises et les grands centres commerciaux). Cette stratégie a sa propre rationalité, laquelle n'est pas tout à fait évidente au premier regard. Elle saisit la crise [économique] comme une occasion de réaliser un basculement historique dans le rapport des forces au bénéfice de la puissance capitaliste et soumet les sociétés européennes aux conditions des marchés financiers fonctionnant de manière débridée. Cela en visant à déposer toutes les conséquences de la crise du système capitaliste sur les épaules des travailleurs.

« Lorsqu'une grande entreprise dépend des marchés financiers pour son financement, toute suspicion de valorisation inadéquate augmente les coûts de financement, réduit la possibilité d'obtention de financement et fait baisser le prix des actions et des obligations. Faisant face à un tel climat, les salariés, au sein de l'environnement politisé de l'entreprise, se trouvent face au dilemme de soit accepter les conditions défavorables présentées par les employeurs [des concessions antiouvrières] — ce qui implique une dégradation de leurs capacités de négociation —, soit être devant la possibilité de perdre leur emploi : accepte les 'lois du capital' ou vis dans l'insécurité et le chômage. Cette pression touche l'ensemble de l'organisation du procès de production. Elle présuppose donc non seulement l'accroissement du 'despotisme' des managers sur les travailleurs, mais aussi la flexibilité du marché du travail ainsi qu'un chômage élevé. Il en découle que 'la discipline de marché' doit être conçue comme un synonyme de 'discipline du capital'.

Il faut restreindre le droit de monopole !
Non au droit de monopole ! Oui au droit public !

John Milios caractérise la lutte contre l'austérité comme étant une lutte pour mobiliser les gens afin de priver les forces du droit de monopole à droite du pouvoir d'imposer leur diktat antisocial, ce qui détruit l'économie.

« La majorité laborieuse dans pratiquement tous les pays capitalistes sera toujours opposée à la réduction des salaires et à la précarisation de l'emploi, à la dégradation et au démantèlement des services publics, à l'augmentation des coûts des systèmes éducatifs et de soins, à l'affaiblissement des institutions démocratiques, au renforcement de la répression. Ils concevront toujours 'la crise du travail' (c'est-à-dire le chômage, le travail précaire et non payé, etc.) comme une maladie sociale qui doit être traitée en tant que telle et non comme un effet secondaire de la restauration des profits.

« La poursuite de l'austérité est par conséquent une question de rapports de forces sociaux. Ainsi que le commentait Karl Marx au sujet des limites de la journée de travail : 'le capitaliste se réclame donc de son droit d'acheteur quand il cherche à rendre la journée de travail aussi longue que possible [...]. D'un autre côté, le travailleur se réclame de son droit de vendeur quand il veut limiter la journée de travail à une grandeur normale déterminée. Il y a donc ici une antinomie, droit contre droit, l'un et l'autre portant le sceau de la loi de l'échange marchand. Entre des droits égaux, c'est la violence qui tranche. »

Note

1. « It may well turn out that we are watching not a Greek but a euro tragedy », The Sunday Telegraph, Londres

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L'annexe secrète sur les services financiers de l'Accord
sur le commerce des services

Le Canada participe à des négociations secrètes qui visent à déréglementer davantage les marchés des services financiers mondiaux

Le 19 juin 2015, WikiLeaks a publié le projet de texte secret pour le TISA (Trade in Services Agreement - Accord sur le commerce des services) et services financiers annexes. Ce texte exfiltré montre que le Canada participe aux côtés de 49 autres pays à des négociations secrètes qui couvrent 68,2 % du commerce mondial des services.[1] Le projet de texte provient de la ronde de négociations d'avril 2014, la sixième depuis avril 2013. Les États-Unis et l'Union européenne sont les principaux promoteurs de l'accord et les auteurs de la plupart des changements conjoints, qui couvrent également le flux de données transfrontalières.

Prenant des mesures antitransparence importantes, les parties ont décidé de tenir secret le projet non seulement pendant les négociations, mais également pendant cinq ans après l'entrée en vigueur du TISA. Dans un mémoire sur le texte exfiltré du TISA Services Financiers, le professeur Jane Kelsey, de la faculté de Droit de l'Université d'Auckland, Nouvelle-Zélande, souligne :

« La note explicative note que l'ébauche du texte sera classée secrète pendant cinq ans après que le TISA aura été mis en application ou que l'on aura mis fin d'une autre façon aux négociations. On peut supposer que cela s'applique à d'autres documents en dehors du texte final. Cette disposition dépasse les 4 ans prévus dans l'Accord de partenariat transpacifique super-opaque (APTP) ! Elle est également en contradiction avec la transparence remportée de haute lutte à l'OMC, qui publie des documents relatifs aux négociations sur l'Internet depuis un certain nombre d'années.[2]

« L'opacité pendant les négociations pour un traité commercial obligatoire et exécutoire est répréhensible et peu démocratique, et invite des décisions mal documentées et partiales. Il est évident que l'opacité après coup est destinée à empêcher que les gouvernements soient tenus comme responsables par leurs législatures et leurs citoyens.

« La suppression des documents d'information (travaux préparatoires) crée également des problèmes de droit. La Convention de Vienne sur le droit des traités (The Vienna Convention on the Law of Treaties) reconnaît que ceux-ci constituent un outil essentiel pour l'interprétation des textes juridiques. La non-divulgation fait qu'il est impossible pour les preneurs de décisions, les régulateurs, les agences de supervision non-gouvernementales, les partis d'opposition, les sociétés de services financiers, les universitaires, et les autres commentateurs de comprendre la signification voulue ou appliquer le texte avec assurance. »

Le professeur Kelsey souligne que les États qui poussent TISA ont été responsables des règles financières pro-industrie de l'OMC. Elle note que les principaux acteurs de l'OMC, dirigés par les États-Unis, le Canada, l'Australie, la Suisse et l'UE, ont toujours refusé d'accepter qu'il y ait un rapport quelconque entre les règles de l'OMC sur les services financiers et la crise financière mondiale de 2007-2008 : « Au lieu de cela, ils ont continué à négocier des traités bilatéraux de libre-échange et d'investissement qui enferment les gouvernements encore plus dans ces systèmes et étendent encore plus leurs obligations. »

Les documents exfiltrés montrent que, malgré les échecs de la régulation des marchés financiers évidents lors de la crise financière mondiale et les appels à l'amélioration des structures réglementaires pertinentes,[3] les partisans de TISA visent à déréglementer davantage les marchés des services financiers mondiaux. Le projet de services financiers annexes fixe des règles qui aideraient l'expansion des multinationales financières, dont le siège est principalement à New York, Londres, Paris et Francfort, dans d'autres pays par la prévention des obstacles réglementaires. Le projet exfiltré montre également que les États-Unis sont particulièrement soucieux du renforcement des flux de données transfrontalières, ce qui permettrait l'échange sans entrave des données personnelles et financières.

Les négociations du TISA ont lieu en ce moment, à l'extérieur de l'Accord général sur le commerce des services (AGCS) et du cadre de l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Toutefois, l'accord est conçu pour être compatible avec l'AGCS afin qu'une masse critique de participants soient en mesure de faire pression sur les autres membres de l'OMC pour qu'ils signent dans l'avenir. Les grands absents des 50 pays couverts par les négociations sont les pays du BRICS (le Brésil, la Russie, l'Inde et la Chine). La nature exclusive de TISA va affaiblir leur position dans les futures négociations sur les services.

En plus du Canada, les parties actuelles de l'OMC qui négocient TISA sont : l'Australie, le Canada, le Chili, Taïwan (Taipai chinois), la Colombie, le Costa Rica, Hong Kong, la Chine, l'Islande, Israël, le Japon, le Liechtenstein, le Mexique, la Nouvelle-Zélande, la Norvège, le Pakistan, le Panama, le Paraguay, le Pérou, la Corée du sud, la Suisse, la Turquie, les États-Unis et l'Union européenne, y compris ses 28 États membres, l'Autriche, la Belgique, la Bulgarie, la Croatie, Chypre, la République tchèque, le Danemark, l'Estonie, la Finlande, la France, l'Allemagne, la Grèce, la Hongrie, l'Irlande, l'Italie, la Lettonie, la Lituanie, le Luxembourg, Malte, les Pays-Bas, la Pologne, le Portugal, la Roumanie, la Slovaquie, la Slovénie, l'Espagne, la Suède et le Royaume-Uni. La Chine et l'Uruguay ont exprimé leur intérêt à se joindre aux négociations, mais jusqu'à présent n'en font pas partie.

La septième ronde de négociations devait avoir lieu du 23 au 27 juin à Genève, en Suisse.

Notes

1. Swiss National Center for Competence in Research : A Plurilateral Agenda for Services ? : Assessing the Case for a Trade in Services Agreement, Working Paper No. 2013/29, May 2013, p. 10.
2. https ://www.wto.org/french/tratop_f/serv_f/finance_f/finance_f.htm
3. Par exemple, en juin 2012, l'Équateur a déposé des propositions pour repenser les règlements et les règles de l'AGCS ; en septembre 2009, la Commission d'experts sur les réformes du système monétaire et financier international, convoquée par le président de l'Organisation des Nations unies et présidée par Joseph Stiglitz a publié son rapport final dans lequel on lit : « Tous les accords commerciaux doivent être examinés pour s'assurer qu'ils concordent avec la nécessité d'un cadre réglementaire international global et inclusif qui est propice à la prévention des crises et la gestion, aux mesures anticycliques et prudentielles, au développement et à un secteur financier plus ouvert ».

(Source : Wikileaks.org)

Note sur le texte exfiltré du TISA Services financiers

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Théorie économique
- Articles de discussion du Centre ouvrier du PCC(M-L) -

Termes, expressions et mots d'économie politique

Les termes, expressions et mots utilisés en économie politique sont le reflet d'une analyse sous-jacente. L'économie politique centrée sur l'humain place la classe ouvrière et le travail, et non le capital, comme point de départ et au coeur de son analyse. Il y a un parti pris dans l'analyse centrée sur l'humain, un parti pris pour la classe ouvrière et sa lutte pour transformer la base économique en lui donnant une nouvelle direction vers le socialisme et l'élimination de la relation sociale qu'est le capital et du privilège de classe.

Si les termes posent problème, c'est en raison du conflit entre le caractère intégré et socialisé de la production moderne, d'une part, et la propriété privée de sections de l'économie en concurrence, de l'autre. Les termes utilisés dans le cadre de l'économie politique officielle reflètent non pas l'économie socialisée mais plutôt le parti pris des détenteurs de capital. En conceptualisant ce qui est absent de l'analyse centrée sur le capital, nous découvrons l'absence de termes, d'expressions et de mots qui décrivent de façon correcte la réalité du capitalisme monopoliste de même que le rôle central de la classe ouvrière dans l'économie moderne et sa détermination à édifier le nouveau.

Par exemple, en utilisant le mot « coût » pour décrire la contribution et les réclamations du facteur humain à la production et à la reproduction de la valeur, on déforme la réalité économique. Le mot « coût » ne peut pas non plus décrire de façon adéquate le rôle des matériaux produits par le travail précédent qui sont transférés dans le nouveau produit, ni les réclamations des gouvernements et des prêteurs à la valeur ajoutée.

Le mot « coût » est un exemple parmi d'autres de comment les mots servent présentement à déformer l'analyse économique afin de servir l'objectif des détenteurs de capital qui est de maintenir le statu quo de privilège de classe et d'avilir la classe ouvrière par le biais d'une pensée et d'une théorie désuètes. Le mot « coût » en particulier est devenu un champ de mines centré sur le capital tellement déformé qu'il n'a plus aucun lien avec la réalité économique, et ce, à tel point qu'on dit régulièrement de toute réclamation, à l'exception de celle faite par les détenteurs de capital, qu'elle est un « coût ».

Selon les détenteurs de capital, le « coût » qu'ils encourent comprend aussi le facteur humain au travail et sa réclamation à la valeur qu'il produit et reproduit par son travail. Dans leurs colonnes de chiffres et leurs rapports trimestriels, ils parlent aussi de « coûts » qu'ils encourent en vertu de la valeur matérielle transférée qui résulte d'un temps de travail antérieur (les machines et les matières premières extraites et partiellement raffinées, etc.), des réclamations des détenteurs de dette (intérêt) et des réclamations des gouvernements (impôts et frais). Cette interprétation déforme ce qui en réalité est la réclamation, le transfert et la distribution de la valeur au cours du processus de production et de sa réalisation. Le but des détenteurs de capital est de marginaliser les producteurs de la valeur, la classe ouvrière, et de faire de la relation sociale qu'est le capital le centre de toute pensée et théorie économiques.

La classe ouvrière doit prendre en main la tâche théorique de développer les termes, expressions et mots qui reflètent fidèlement l'économie moderne et le rôle central du facteur humain dans la production de biens et de services. La terminologie d'aujourd'hui qui place le capital au centre était nécessaire au 19e siècle pour expliquer l'économie politique du capital en relation avec les formations économiques qui ont précédé le capitalisme, en particulier les relations de production féodales. La théorie centrée sur le capital a été développée afin de répondre aux besoins du capitalisme naissant et surmonter le pesant fardeau idéologique de la théorie précapitaliste. Aujourd'hui, non seulement cette théorie est-elle désuète et requiert-elle un renouveau, elle empêche carrément la société d'avancer.

À mesure que la classe ouvrière a gagné en maturité et est devenue capable, en tant que force sociale, de faire progresser la société au socialisme au-delà de la formation économique transitoire que fut le capitalisme, il est donc devenu nécessaire de développer une nouvelle économie politique centrée sur l'humain. Ceci est devenu encore plus évident avec la victoire de la révolution socialiste de 1917 en Russie, le premier projet d'édification nationale de l'histoire dirigé par la classe ouvrière qui a duré toute une génération avant de se briser sur l'alliance internationale du capital monopoliste et son assaut militaire, économique, culturel, et avant tout, idéologique.

La classe ouvrière possède maintenant une vaste expérience de plus de cent ans de lutte de classe contre le système capitaliste monopoliste mondial. Les travailleurs et leurs alliés ont la responsabilité de développer leur propre pensée et théorie indépendantes conformément au besoin de la classe ouvrière d'assumer sa position centrale et dirigeante dans les domaines politique, économique, social, culturel et, en particulier, idéologique, et de faire progresser la société vers le nouveau. Un aspect de ce travail consiste à développer les termes, expressions et mots qui reflètent fidèlement l'économie socialisée moderne.

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La classe ouvrière et non le capital est
au coeur de l'économie moderne

L'économie politique centrée sur le capital suppose que les instruments de production tels les édifices et les machines forment le capital fixe tandis que le matériel entièrement consommé dans le processus de production est le capital circulant. Elle qualifie le temps de travail de la classe ouvrière et sa réclamation à la valeur qu'elle produit de coût pour les détenteurs de capital.

Cette hypothèse désuète déforme la conscience sociale de la classe ouvrière et des sections intermédiaires de la société. En affirmant que les moyens de production et la valeur du temps de travail sont du capital plutôt que la richesse sociale appartenant de droit aux véritables producteurs, elle cherche à semer dans le cerveau des travailleurs et des intellectuels la notion que le capital est la force motrice nécessaire à la création de moyens de production modernes et à la production de tous les autres biens et services. Selon cette fable qu'on répète sans relâche aux travailleurs, sans le capital et ses détenteurs, aucune production moderne ne serait possible. Cette fable leur est enfoncée par la force par le mouvement mondial de la richesse sociale contrôlée par les détenteurs de capital sans égard au bien-être de la classe ouvrière, de l'économie et de la société.

L'hypothèse de la nécessité du capital pour qu'il y ait production est une fraude. Les moyens de production sont le produit du temps de travail des êtres humains qui les fabriquent. Les êtres humains ont toujours lutté pour retirer le contrôle des moyens de production et des biens et services qu'ils produisent des mains des classes sociales qui en ont usurpé la propriété et le contrôle des mains des vrais producteurs. C'est cette lutte de classe menée par le peuple qui est la force motrice de la société.

Dans la société moderne, les détenteurs de capital ont usurpé la propriété, le contrôle et l'utilisation des moyens de production et des biens et services que la classe ouvrière produit. Les véritables producteurs d'aujourd'hui sont cependant aussi déterminés que ne l'étaient leurs ancêtres à contrôler et à s'approprier la richesse sociale qu'ils produisent, soit leurs moyens de production et les autres biens et services produits par leur temps de travail. Si les esclaves pouvaient produire sans les propriétaires d'esclaves, et les paysans, sans les propriétaires fonciers, la classe ouvrière peut elle aussi produire et s'épanouir sans les détenteurs de capital.

Le capital est une relation sociale qui réduit les producteurs véritables, la classe ouvrière, à l'esclavage aux mains des détenteurs de capital. La relation sociale qu'est le capital n'existe qu'au sein d'une période historique spécifique très brève des forces de production, celle du passage de la petite production dispersée à la production industrielle de masse. La classe ouvrière au sein de la relation sociale qu'est le capital est le producteur de fait des biens et des services, y compris les moyens de production, mais elle ne s'approprie ni ne contrôle les moyens de production qu'elle utilise.

La relation sociale qu'est le capital a été nécessaire à la transition entre les petits moyens de production et les moyens de production modernes socialisés de production de masse. La classe ouvrière n'avait ni la capacité ni le nombre requis pour renverser le féodalisme ni pour faire progresser la société vers une production de masse moderne fondée sur l'application de la science et de la technologie. La classe ouvrière a dû vivre sous l'oppression au sein de la relation sociale qu'est le capital dans cette période du passage de la petite production à la production industrielle de masse, jusqu'à ce que l'économie soit suffisamment socialisée et que la classe ouvrière elle-même eut atteint la force requise en nombre, en éducation, en expérience et en maturité, ce qui lui a permis de saisir le pouvoir politique dans une épreuve de force avec les détenteurs de capital.

La première tentative de la classe ouvrière pour se libérer de la relation sociale qu'est le capital fut la Commune de Paris de 1871, et celle-ci n'a duré que deux mois. Par contre, elle a contribué à la conscience de la classe ouvrière, aux possibilités de produire et de vivre libérée des chaînes de la relation sociale qu'est le capital. La lutte de classe pour établir et défendre la Commune de Paris a permis à la classe ouvrière de tirer des leçons pratiques en matière de tactique et de stratégie qui lui ont permis de mener la bataille pour se libérer de son esclavage au sein de la relation sociale qu'est le capital. Karl Marx a fait avec brio le bilan de ces leçons dans son oeuvre, La Guerre civile en France.

La période de transition a pris fin de façon décisive avec la montée du capitalisme monopoliste autour du début du 20e siècle. Les travailleurs et les paysans de la Russie en ont fait la preuve en 1917 lorsqu'ils ont mis fin à la période transitoire et ont entamé le premier projet d'édification nationale dirigée par la classe ouvrière. Cet effort de la classe ouvrière pour mettre fin à la période de transition et ouvrir un chemin sur la base de sa propre force, un effort qui a duré 72 ans, a prouvé de façon irréfutable que la classe ouvrière n'a plus besoin de vivre dans les confins de la relation sociale antagoniste qu'est le capital.

Ces deux évènements, en particulier la formation de l'Union des Républiques socialistes soviétiques, ont démontré incontestablement que la relation sociale qu'est le capital n'est qu'une forme transitoire que doit surmonter la classe ouvrière si elle veut faire progresser la société et rompre une fois pour toutes avec l'ancien système féodal de petite production dispersée et de privilège de classe dominé par l'obscurantisme clérical.

Les détenteurs de capital prétendent que l'histoire a cessé de progresser vers l'élimination des classes sociales et de la société de classes, et que la relation sociale qu'est le capital sera à tout jamais nécessaire. Les moyens de production des formations économiques d'avant l'avènement du capitalisme étaient le produit des producteurs véritables au sein de ces systèmes depuis l'époque communale et les sociétés d'avant les classes. La relation sociale qu'est le capital n'était pas nécessaire à cette époque pour produire les moyens de production et de services et ne l'est pas davantage à l'époque contemporaine, qui est celle de la classe ouvrière, de sa propre émancipation et de la fin de toute exploitation de classe.

Les détenteurs de capital ont servi seulement en tant que force sociale nécessaire pour faire sortir la société de la petite production féodale dispersée et permettre l'application généralisée de la science et de la technologie à la production de masse. Dès que la production industrielle de masse s'est répandue à l'échelle mondiale en tant que système dominant, l'existence même de la relation sociale qu'est le capital et sa personnification en une classe sociale privilégiée de détenteurs de capital qui exploitent la classe ouvrière est devenue superflue, désuète et un obstacle au progrès.

La classe ouvrière est la force sociale nécessaire pour terminer le passage de la petite production dispersée vers une production industrielle de masse intégrée à l'échelle mondiale et gouvernée en vertu d'une nouvelle relation de production socialisée en harmonie avec l'économie socialisée.

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Un échange tout à fait extraordinaire,
unique et désuet

Bien que les travailleurs puissent penser que l'échange de leur capacité de travailler contre un salaire est la chose la plus ordinaire qui soit, ils se trompent : il s'agit là de la chose la plus extraordinaire, unique et désuète qui soit.

Dans un échange ordinaire, une valeur d'usage est échangée contre une autre valeur d'usage, habituellement une valeur d'usage contre de l'argent, qu'on peut ensuite échanger contre une valeur d'usage équivalente : une pointe de tarte contre de l'argent, une auto contre de l'argent, un jouet, un outil, une machine contre de l'argent, et ensuite, l'argent contre une valeur d'usage équivalente.

Une valeur d'usage est échangée contre une valeur équivalente d'argent. L'acheteur jouit de la valeur d'usage et le vendeur jouit de la valeur équivalente de sa vente déterminée en grande partie par le coût de production. L'argent peut ensuite servir à acheter une valeur d'usage. Ainsi, il s'agit essentiellement d'un échange entre une valeur d'usage et une autre valeur d'usage.

Le vendeur peut aussi jouir de la pleine valeur de la valeur d'usage si tel est son souhait. Il peut refuser de vendre ce qui lui appartient et tout simplement manger la tarte, conduire l'automobile, s'amuser avec le jouet ou utiliser l'outil et la machine pour fabriquer quelque chose.

Or, la situation est différente lorsque les travailleurs vendent leur capacité de travail. Ils ne se vendent pas en tant que valeur d'usage puisque le capitalisme interdit l'esclavage. Ils vendent plutôt la valeur d'échange de leur capacité de travailler, qui représente leur propre prix de production en tant que travailleurs potentiels, le temps de travail qui a contribué à créer leur capacité de travail.

Dans cet échange des plus extraordinaire et unique, les travailleurs sont floués puisque la valeur qu'ils reçoivent en échange de leur capacité de travailler est inférieure à la valeur d'usage qui est créée et qui est entre les mains des détenteurs de capital ou de leur État qui achètent ce qui existe en potentiel et emploient la valeur d'usage réelle dans le travail.

Les travailleurs ne peuvent vendre ni jouir de la pleine valeur de leur valeur d'usage, soit leur capacité de travailler en action, puisque, pour eux, celle-ci existe uniquement en tant que potentiel. Pour permettre à la capacité de travailler de devenir une valeur d'usage dans le contexte des relations de production actuelles, cette capacité de travailler doit tomber sous l'emprise et se soumettre au contrôle de la relation sociale qu'est le capital. Les détenteurs de richesse sociale se servent du fait qu'ils possèdent et contrôlent les moyens de production ainsi que de leur domination de l'État pour empêcher les travailleurs de se mobiliser et de déployer leur potentiel de travailler sur des moyens de production qu'ils contrôlent dans leurs propres intérêts et dans l'intérêt général de la société.

Par exemple, quelle est l'utilité pour un chômeur d'avoir une capacité de travailler ? Celle-ci n'existe qu'en tant que temps de travail figé dans le travailleur en attendant d'être exploitée par les détenteurs de richesse sociale ou leur État au moment de la vente de sa valeur d'échange. Sans ce processus de vente, la valeur d'échange existe en vertu de la capacité de travailler qu'elle représente en tant que valeur d'usage potentielle et non pas comme une réalité mise en oeuvre par le travail, comme une valeur d'usage réelle qui peut reproduire non seulement sa capacité de travailler, mais aussi produire la pleine valeur additionnelle de sa valeur d'usage.

Leur capacité de travailler n'est d'aucune utilité pour les travailleurs sans emploi, puisqu'ils ne possèdent pas de richesse sociale suffisante pour embaucher des travailleurs dans le contexte de la relation sociale qu'est le capital. S'ils avaient une telle richesse sociale, ils ne seraient pas des travailleurs et encore moins des chômeurs. Leur capacité de travailler est mise en veilleuse et ne devient une valeur d'usage réelle que lorsque leur valeur d'échange est vendue et appliquée et utilisée sur les moyens de production au sein de la relation sociale qu'est le capital.

Pour que la valeur d'usage des chômeurs prenne vie et devienne utile, les chômeurs doivent être embauchés par les détenteurs de richesse sociale ou par l'État en vertu de la relation sociale qu'est le capital. Ces derniers doivent les déployer sur les moyens de production qu'ils possèdent et qu'ils contrôlent. En retour, ils paient aux travailleurs la valeur d'échange de leur capacité de travailler, leur valeur d'usage potentielle, et reçoivent en échange la valeur d'usage réelle mise en action. La valeur d'usage en action des travailleurs produit sa pleine valeur, qui comprend la valeur d'échange de la capacité de travailler qui a été achetée de même que la valeur ajoutée qui devient le profit des détenteurs de capital, des prêteurs et de l'État. La valeur d'usage en action facilite aussi la préservation et le transfert au nouveau produit de la valeur figée des moyens de production consommés au cours du processus de production.

Les détenteurs de richesse sociale et leur État, qui possèdent et contrôlent les moyens de production, saisissent et contrôlent la valeur d'usage des travailleurs ainsi que toute la valeur qu'elle produit, reproduit et transfère. Dans l'échange, ils ne paient pas aux travailleurs la pleine valeur de leur valeur d'usage mais seulement la valeur d'échange de leur capacité de travailler, leur valeur d'usage potentielle, qui est moindre.

Contrairement à la tarte, au jouet, à l'outil et à la machine, la valeur de la capacité de travailler lorsque consommée est supérieure à sa valeur d'échange lorsque vendue. La différence entre la valeur d'échange de la capacité de travailler, la valeur d'usage potentielle et la valeur de la valeur d'usage en action est la valeur ajoutée, qui augmente la richesse sociale et rend les capitalistes riches et privilégiés.

L'échange de la capacité des travailleurs de travailler contre un salaire est tout à fait extraordinaire, unique et désuet. Le système salarial au sein de la relation sociale qu'est le capital prive les travailleurs du droit de déployer et de contrôler leur travail et de diriger leur valeur d'usage, leur capacité de travailler en action, et d'en récolter les fruits. La classe ouvrière doit s'organiser pour priver la relation sociale qu'est le capital et son État du pouvoir de priver les travailleurs du droit de veiller à ce que leur travail et la pleine valeur produite par ce travail puissent bénéficier aux véritables producteurs, à leur économie et à l'intérêt général de la société.

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Les travailleurs doivent augmenter la richesse
sociale par le travail pour être considérés
comme étant productifs

Sous le système capitaliste, la capacité de travailler est inutile à moins qu'elle n'augmente la richesse sociale par le travail ou serve à protéger la relation sociale qu'est le capital et son État. Les détenteurs de la richesse sociale n'emploieront pas les travailleurs à moins que leur capacité de travailler ne cadre dans leur plan d'ensemble pour augmenter leur richesse sociale ou ne serve leur État d'une manière ou d'une autre. Le système perpétue les privilèges de classe, l'emprisonnement des travailleurs au sein de la relation sociale antagoniste qu'est le capital et son État capitaliste monopoliste.

Si les travailleurs demandent à recevoir en salaire la pleine valeur de leur valeur d'usage, qui est leur capacité de travailler en action, les détenteurs du capital ne les engageront pas. Pourquoi le feraient-ils lorsque la seule raison d'acheter la capacité de travailler du travailleur est d'augmenter la richesse sociale ou la protéger et protéger l'État ? La différence entre ce que les travailleurs reçoivent en salaire et la valeur qu'ils produisent par le travail est la valeur ajoutée que saisissent les détenteurs du capital, ce qui les rend riches et perpétue leur privilège de classe.

Si la valeur ajoutée approche zéro, les détenteurs de la richesse sociale refuseront d'acheter la capacité des travailleurs de travailler. Telle est la réalité de la relation sociale qu'est le capital, qui emprisonne présentement la classe ouvrière. Pour que cela change, le système doit être transformé, de l'État capitaliste monopoliste actuel en un nouveau système socialiste de production industrielle de masse sous le contrôle des producteurs, la classe ouvrière, sans le poids mort sur leurs épaules de la relation sociale qu'est le capital.

Les travailleurs doivent se retirer de la relation sociale qu'est le capital et son État et faire un geste audacieux pour assumer le plein contrôle de leur valeur d'usage, qui est leur capacité de travailler en action. Les travailleurs pourront alors façonner leur propre projet d'édification nationale, un État à leur image qui investit le peuple de la souveraineté. Ils détiendront et contrôleront les fruits de leur travail, en particulier les moyens de production, et seront à même de déployer leur capacité de travailler, leur valeur d'usage en action, de même que de contrôler la distribution de la valeur que leur travail crée en transformant les richesses de la Terre-Mère.

La classe ouvrière n'a pas besoin de la relation sociale qu'est le capital et son État capitaliste monopoliste pour travailler et produire. Au contraire, pour jouir des fruits de leur travail et façonner de nouvelles relations harmonieuses entre eux et un nouveau système économique sans crises, chômage, pauvreté, insécurité et guerre, les travailleurs doivent conquérir leur indépendance et leur liberté par rapport à la relation sociale qu'est le capital et son État.

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La source de la valeur dans la production
des biens et services

La valeur économique provient du travail de la classe ouvrière utilisant des moyens de production déjà produits pour transformer des matériaux d'origine naturelle en biens utilisables et fournir des services. La valeur que les travailleurs produisent et reproduisent dans le cadre du travail à même les moyens modernes de production est soit transférée dans d'autres moyens de production ou consommée en tant que biens et services.

La valeur que les travailleurs reproduisent et transfèrent dans les biens et services ne peut pas et ne devrait pas être appelée un coût. La valeur transférée des biens précédemment produits se maintient dans le bien ou service nouvellement produit. La valeur transférée est payée à même la valeur dans laquelle elle réside maintenant lorsque celle-ci est réalisée (par la vente du produit). La valeur transférée ne peut pas devenir et ne devient pas un coût dans le processus de production. L'affirmation des détenteurs du capital à l'effet que la valeur transférée est un coût pour eux simplement parce qu'ils la paient est subjective et unilatérale.

Les détenteurs des moyens de production achètent des matériaux et des instruments de production lorsqu'ils organisent leur entreprise. La valeur des moyens de production qu'ils achètent est transférée dans les biens et services que leurs travailleurs produisent. La valeur transférée des moyens de production achetés et consommés est retournée aux détenteurs lorsque le bien ou service nouvellement produit est vendu à quelqu'un d'autre. Les travailleurs par leur travail transfèrent la valeur déjà existante dans de nouveaux produits et services. Ce transfert a lieu d'un coup avec des matériaux comme le minerai de fer ou au fil du temps avec la machinerie, les outils, les bâtiments et les équipements.

La théorie centrée sur le capital appelle systématiquement une machine ou un bâtiment un « coût fixe », le minerai de fer un « coût circulant » et les travailleurs un « coût de production ou de ventes ». C'est faux. Cela déforme le processus moderne de production intégrée.

La valeur contenue dans la machine, le bâtiment et le minerai de fer est préservée lorsque transférée dans le processus de travail pour produire des biens et services. La valeur de la capacité de travailler de la classe ouvrière est reproduite lors du travail et incorporée dans le bien ou service. Lorsqu'elle est achetée, une valeur ne disparaît pas pour devenir soudainement un coût pour ses détenteurs. La valeur transférée, la valeur reproduite et la valeur ajoutée que la classe ouvrière produit sont retournées lorsque le bien ou service est réalisé. La valeur ne peut pas et ne doit pas être considérée comme un coût pour l'économie ou pour n'importe quel participant dans l'économie.

Une machine est un actif fixe représentant une valeur réelle attendant d'être transférée à la nouvelle production de biens ou services ; le minerai de fer est un moyen de production qui transfère sa valeur tout d'un coup lorsqu'il est utilisé ; la classe ouvrière reproduit par le travail la valeur de sa capacité de travailler et produit en plus une nouvelle valeur ajoutée. La classe ouvrière est le facteur humain actif qui transfère par le travail la valeur contenue dans les moyens de production, reproduit une nouvelle valeur qui contient la valeur de sa capacité de travailler et produit la valeur ajoutée, laquelle élargit le bassin de la richesse sociale disponible dans l'économie socialisée.

Dans la théorie économique, la machine et le matériau renferment le temps de travail cristallisé ou figé et sont capables, par le travail, de transférer la valeur de ce temps de travail cristallisé à la production de nouveaux biens et services.

Le temps de travail original pour produire la machine, moins la dépréciation, plus le temps de travail pour maintenir et renouveler la machine, donne à la machine sa valeur courante appelée valeur transférée fixe.

Le temps de travail original pour produire et livrer le matériel tel le minerai de fer lui donne une valeur courante, appelée valeur transférée circulante.

Le temps de travail original pour produire la classe ouvrière, par l'éducation familiale et les institutions sociales et par l'expérience, moins l'usure du corps et plus le temps de travail pour maintenir le facteur humain par les soins de santé et d'autres moyens donne à la capacité de travailler de la classe ouvrière sa valeur courante en terme économique, une valeur qu'elle reproduit constamment par son temps de travail et qui a le potentiel de produire la valeur ajoutée au-delà de sa valeur reproduite.

Le temps de travail vivant ou présent de la classe ouvrière reproduit sa capacité de travailler, tant sa formation individuelle et son éducation par la famille, appelée valeur individuelle reproduite, que sa formation sociale par des institutions de la société telles l'éducation et les soins de santé publics, appelée valeur sociale reproduite.

La valeur de la valeur reproduite en relation avec les biens et services qu'elle peut acheter au sein de l'économie est déterminée par la lutte de classe organisée de la classe ouvrière à la défense de ses droits, par le niveau de développement des forces productives, des programmes sociaux et des services publics, et par l'État du mouvement révolutionnaire international de la classe ouvrière, selon qu'il est en essor ou en retraite.

Le temps de travail vivant ou actuel de la classe ouvrière produit aussi une valeur additionnelle appelée valeur ajoutée, en plus de la valeur transférée existante qu'elle transfère dans la nouvelle production et de la valeur de sa capacité de travailler qu'elle reproduit.

Le temps de travail de la classe ouvrière utilisant des moyens de production déjà produits pour transformer des matériaux d'origine naturelle en biens utilisables et fournir des services est la source de leur valeur économique.

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