Le
                              Marxiste-Léniniste

Numéro 105 - 20 juin 2013

La Corée est une!

Il faut oeuvrer à la paix sur la péninsule coréenne


Paix et réunification étaient à l'ordre du jour d'un rassemblement de Coréens Américains à
Los Angeles le 14 mai 2013 (Nodutdol)

La Corée est une!
13e anniversaire de la déclaration Nord-Sud
Récents développements dans les rapports nord-sud - Entrevue avec H. P. Chung, porte-parole du Comité canadien du 15 juin
Révocation du plan de transfert du contrôle militaire des États-Unis
La rapporteuse spéciale de l'ONU critique la restriction de la liberté d'expression en Corée du sud

À titre d'information
La nécessité d'oeuvrer pour la paix dans la péninsule coréenne - Marty Hart-Landsberg


La Corée est une!

13e anniversaire de la déclaration Nord-Sud


Le président Kim Dae-Jung est accueilli à Pyongyang par le chef de la RPDC Kim Jong Il le 15 juin 2000 pour l'historique sommet qui a donné lieu à la Déclaration Nord-Sud.

Le 15 juin était le 13e anniversaire de la signature de la Déclaration conjointe Nord-Sud du 15 juin 2000 entre le nord et le sud de la Corée. Cet événement historique avait donné un grand élan au mouvement populaire pour la réunification du pays divisé.

Ce sont les États-Unis qui ont maintenu la Corée divisée par la force des armes pendant plus de 60 ans, pour servir leurs visées impérialistes. Les impérialistes américains espèrent encore aujourd'hui pouvoir s'emparer de toute la Corée et s'en servir comme tremplin pour des agressions contre la Chine et la Russie et utiliser les Coréens comme chair à canon. Après la Deuxième Guerre mondiale, les États-Unis se sont retranchés dans le sud pour s'emparer des usines, mines et industries que les impérialistes japonais avaient construites sur la péninsule pour alimenter leur machine de guerre. Ils ont ensuite divisé le pays le long du 38e parallèle pour pouvoir implanter leur système grâce à un coup d'État, la répression brutale et l'occupation militaire. Ils provoquèrent la Guerre de Corée en 1950 pour étendre leur occupation à l'ensemble de la Corée, mais ce plan se heurta au peuple coréen uni autour de l'Armée populaire de Corée et ils furent forcés de signer l'Accord d'Armistice en 1953.

Les États-Unis maintiennent un climat d'hostilité sur la péninsule en sabotant tous les efforts de normalisation des rapports avec la République populaire démocratique de Corée (RDPC), y compris par leur refus de signer un traité de paix conformément aux termes de l'Accord d'Armistice qui a mis fin à la guerre. La signature d'un traité de paix contribuerait non seulement à la paix et la stabilité sur la péninsule coréenne mais aussi à la stabilité dans la région, ce qui serait à l'avantage du peuple coréen mais aussi des peuples de l'ensemble de l'Asie du Sud et du monde. Ce serait un pas important vers la réunification nationale.

Si l'on mettait fin à l'occupation militaire américaine du sud de la Corée et qu'on laissait les Coréens régler leurs problèmes sans ingérence extérieure, le pays avancerait vers la réunification puisque c'est ce que désirent les Coréens depuis près de 70 ans.

Les États-Unis ont peur d'une Corée réunifiée qui serait une puissance économique et un champion de l'indépendance et de l'autodétermination de toutes les nations et tous les peuples, un clou au cercueil de l'impérialisme anglo-américain. C'est pourquoi, pour bloquer tout mouvement vers la réunification et maintenir leur présence militaire dans le sud, les États-Unis battent les tambours de la guerre et répandent la désinformation à propos de la RPDC.


Le Monument aux Trois Chartes pour la réunification nationale (ou Arche de la réunification) à Pyongyang, RPDC. Les jumelles symbolisent l'union des deux Corée. Les trois chartes comprennent «les trois principes de la réunification nationale (indépendance, réunification pacifique et grande unité nationale), la proposition de fonder la République démocratique fédérale du Koryo et le programme en dix points pour la grande unité de la nation».

Les Coréens ont fait de grands progrès sur tous les fronts vers la réunification entre 2000 et 2007 parce que les deux parties étaient guidées par l'esprit de l'ouverture véritable et de la coopération tel que codifié dans la Déclaration conjointe du 15 juin. Lorsque le gouvernement pro-américain de Lee Myung Bak est arrivé au pouvoir dans le sud en 2007, les États-Unis ont pu introduire un esprit d'hostilité dans les relations entre le nord et le sud et le mouvement pour la réunification a connu un important revers. Cette hostilité est maintenue par la présidente actuelle, Park Geun Hye, arrivée au pouvoir en février 2013. Park Geun Hye est la fille du dictateur anti-communiste et pro-américain Park Jung Hee qui a mené la Corée du sud avec une poigne de fer de 1961 à 1979, avant d'être assassiné par le chef de son propre service de sécurité. La présidente Park est très hostile au mouvement indépendant pour la réunification et dit ouvertement que l'avenir de la Corée du sud est dans l'établissement de rapports économiques et militaires plus étroits avec les États-Unis. En fait, son gouvernement a annoncé le 1er juin qu'il prolongeait le contrôle opérationnel militaire des États-Unis au-delà de l'échéance de décembre 2015, en violation d'un accord antérieur entre les deux pays. De plus, son gouvernement a accepté d'assumer une plus grande partie des coûts « non militaires » de la présence militaire américaine en Corée, de l'ordre de plusieurs milliards de dollars par année, au grand regret du peuple coréen. Le départ de l'occupant militaire américain est une précondition à la réunification nationale.

Cette attitude pro-américaine est également évidente dans les mesures du gouvernement de Park pour criminaliser le mouvement pour la réunification et l'emprisonnement d'activistes de ce mouvement. Le gouvernement Park a interdit à toute organisation patriotique de Corée du sud de se rendre dans le nord à l'occasion du 13e anniversaire de la Déclaration Nord-Sud. Il a saboté les efforts en vue d'un sommet pour faire le bilan du mouvement de réunification.

Il appartient aux États-Unis et à la Corée du sud de montrer en paroles et en actes leur sincérité envers les propositions de paix et de réunification faites par la RPDC depuis 1953, suivant les voeux des Coréens du nord, du sud et d'outre-mer.

Malgré les défis, les Coréens s'appuient sur la justesse de leur cause, sur leur unité politique et sur leurs efforts pacifiques pour avancer le mouvement pour la réunification nationale. Ils sont convaincus que, aussi certain que le soleil se lève à l'Est, ce mouvement sera victorieux. Ils ont en cela l'appui des Canadiens et des peuples du monde épris de justice et de paix.

Vive le 13e anniversaire de la Déclaration Nord-Sud!
Les États-Unis doivent signer un traité de paix avec la RPDC!
Troupes américaines, hors de Corée!
La Corée est une!

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Récents développements dans les rapports nord-sud

LML : Il devait y avoir une rencontre ministérielle les 12 et 13 juin entre la République populaire démocratique de Corée (RPDC) et la République de Corée pour discuter du rétablissement des relations nord-sud. La rencontre a été annulée à la dernière minute. Que s'est-il passé selon vous ?

H. P. Chung : À mon avis, même si le gouvernement sud-coréen a accepté de participer à la rencontre, il n'avait pas l'intention de discuter de l'établissement de relations sur une nouvelle base. Lors d'une rencontre préliminaire il a donné le nom d'une personne qui, selon lui, devait absolument mener la délégation du nord. Lorsqu'il s'est rendu compte que cette personne n'était pas sur la liste des délégués venant à Séoul, il a accusé le nord de manque de sincérité. La RPDC a proposé la composition de la délégation en fonction de ce qui était convenable pour le niveau politique des pourparlers. À mon avis, puisque les deux parties sont le gouvernement chez elles, la Corée du sud n'a pas raison de s'objecter.

LML : Quelle est l'attitude du nouveau gouvernement de Park Geun Hye en Corée du sud vis-à-vis le mouvement pour la réunification ?

HPC : L'attitude du nouveau gouvernement est la même que celle du gouvernement précédent, celui de Lee Myung Bak, et pourrait même être pire. La présidente Park Geun Hey insiste pour dire qu'il n'y aura pas de rencontre intergouvernementale tant que la RPDC n'accepte pas de discuter de dénucléarisation. À mon avis elle a une très piètre compréhension de la situation sur la péninsule si elle croit que c'est cela la source des tensions.

LML : Quels sont les développements dans le mouvement pour la réunification depuis un an ?

HPC : Sous le gouvernement de Lee Myung Bak, au pouvoir de 2008 à 2013, le mouvement pour la réunification de la Corée a été réprimé dans le sud. Cela se poursuit avec le nouveau gouvernement. Cela fait en sorte que le mouvement pour la réunification subit beaucoup de pression. En juin 2012, à l'occasion du 12e anniversaire de la Déclaration Nord-Sud, un moment joyeux et historique pour l'ensemble des Coréens, des groupes de Coréens d'outre-mer ont tenu un rassemblement à Moscou pour remonter le moral du mouvement. Il y avait des délégués de la RPDC. Il y avait aussi un délégué coréen canadien. Mais le gouvernement sud-coréen n'a pas permis que des délégués sud-coréens y participent.

LML : Cette année est le 60e anniversaire de la fin de la Guerre de Corée. Comment les patriotes coréens vivant à l'étranger vont-ils célébrer cet événement ?

HPC : Il va y avoir une grande célébration à Pyongyang. De nombreux patriotes vivant à l'étranger vont y participer, y compris une délégation de la communauté coréenne vivant au Canada. Il va également y avoir de grandes célébrations au Japon et en Chine.

LML : Quelle est la signification de la proposition de nouvelle structure pour le Commandement des forces combinées des États-Unis et de la République de Corée annoncée par la Corée du sud le 1er juin ?

HPC : Quand Rho Moo Hyun était président de la Corée du sud, de 2003 à 2008, il insistait pour que le commandement de l'armée du sud passe du général américain à la Corée. Le 2 octobre 2009, la Corée du sud et les États-Unis ont confirmé que le transfert aurait lieu le 12 avril 2012. Puis il y a eu des protestations de la part de généraux anticommunistes dans le sud. Lorsque Lee Muyng Bak est devenu président, il a reporté le transfert à décembre 2015. Dans ces circonstances, à mon avis la proposition du 1er juin pourrait être une autre manoeuvre de temporisation, pour maintenir le commandement entre les mains de l'armée américaine. Récemment il y a eu une entente à l'effet que le gouvernement sud-coréen paie une plus grande part des coûts associés au maintien de l'armée américaine sur son territoire. Les Coréens veulent que l'armée américaine quitte la Corée parce qu'elle est un obstacle à la réunification. Nous ne voulons pas que l'armée américaine prolonge son séjour en Corée du sud.

LML : Que voulez-vous nous dire sur la situation actuelle sur la péninsule coréenne en conclusion ?

HPC : À mon avis le gouvernement sud-coréen n'a pas l'autonomie nécessaire pour prendre des décisions concernant la réunification de la Corée parce qu'il est sous l'influence des États-Unis. La clé, ce sont les relations entre la RPDC et les États-Unis. La solution du conflit passe par la normalisation de ces relations, à commencer par la signature d'un traité de paix tel que stipulé par l'Accord d'armistice signé le 27 juillet 1953. J'espère sincèrement que les Canadiens vont soutenir de tout coeur l'appel à un traité de paix.

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Révocation du plan de transfert du contrôle
militaire en temps de guerre des États-Unis

Les militants antiguerre en Corée du sud s'opposent à la nouvelle structure de commandement combiné américano-sud coréen annoncée le 1er juin, qui s'avère être de la poudre aux yeux pour masquer l'intention du gouvernement de maintenir la domination américaine sur les affaires sud-coréennes.

Le 3 juin, l'organisation Solidarity for Peace And Reunification of Korea (SPARK) a tenu une conférence de presse devant le ministère de la Défense nationale. Sur la banderole on lisait: « Dénonçons l'annulation du plan de transférer le contrôle en temps de guerre: Non à la création d'une nouvelle structure de commandement combiné États-Unis-Corée du sud. Transférez le contrôle en temps de guerre ! »

Yu Yeong Jae, un organisateur de SPARK, a fait remarquer: « En transférant le contrôle opérationnel, l'armée sud-coréenne a l'avantage de maintenir son propre commandement séparé. Puisque cette clause a été exclue de l'accord opérationnel, ce n'est pas mieux que si nous avions abandonné le transfert du contrôle opérationnel. »

Le communiqué publié par SPARK souligne que les États-Unis et la Corée du sud brandissent l'épouvantail de l'agression par la RPDC pour justifier la révocation du plan de transférer le contrôle en temps de guerre aux militaires de la Corée du sud. La déclaration ajoute que l'objectif est également à des fins d'encercler la Chine.


Le 3 juin 2013, des militants sud-coréens tiennent un rassemblement et une conférence de presse à l'extérieur
du ministère de la Défense nationale à Séoul (SPARK)

Les activistes de Sauvons maintenant Jeju, une organisation qui travaille pour arrêter la construction d'une base navale américaine sur l'île de Jeju, en Corée, soulignent que la Corée du sud est actuellement le seul pays au monde qui n'a pas le droit de contrôler sa propre armée en temps de guerre. C'est le cas depuis 60 ans, depuis que l'Accord d'armistice a mis fin aux opérations militaires de la guerre de Corée. Sauvons maintenant Jeju explique que le contrôle opérationnel de l'armée sud-coréenne a été un problème depuis la guerre de Corée lorsque le président Rhee Syng Man a transféré en 1950 ce droit au général américain Douglas MacArthur, commandant des forces de l'ONU à l'époque. Sous le gouvernement de Kim Young Sam, le contrôle en temps de paix de l'armée sud-coréenne a été transféré des États-Unis vers la Corée du sud le 1er décembre 1994. Le transfert vers la Corée du sud du droit de contrôle en temps de guerre a été soulevé pour la première fois en 2005, lors de l'initiative en matière de politique de sécurité entre les États-Unis et la Corée du sud. Le gouvernement de Roh Moo-Hyun a mis beaucoup d'efforts en 2006 pour que cette question progresse.

Un article paru dans l'édition du 3 juin du journal sud-coréen de langue anglaise Hankyoreh explique:

« La nouvelle proposition annoncée le 1er juin pour la structure de commandement combiné États-Unis-Corée du sud est presque identique à la structure existante du commandement des forces combinées. Le changement majeur est que la personne de plus haut rang dans la structure de commandement combiné passe du commandant des forces américaines en Corée au président du chef d'état-major sud-coréen. [...]

« Conséquemment, le chef d'état-major sud-coréen et les forces américaines en Corée sont regroupés en un commandement interarmées sur le terrain, et les forces terrestres, marines et aériennes ainsi que les forces spéciales sont placées sous ce commandement commun qui les sous-tend. [ ...]

« Toutefois, en temps de guerre un commandant américain gardera le contrôle de l'armée de l'air, la force clé dans une guerre contemporaine. Cette mesure est considérée comme la reconnaissance de la suprématie aérienne écrasante et de la longue expérience de la 7e Force aérienne des États-Unis, qui se trouve à la base aérienne d'Osan située à Pyeongtaek, province de Gyeonggi.

« Cet accord est très différent de la structure de base préparée par l'ancien président Roh Moo-hyun, qui a oeuvré pour regagner le contrôle opérationnel en temps de guerre. L'essentiel de la passation du commandement en temps de guerre, tel qu'endossée par l'administration Roh, a été le principe de défense autonome, l'idée que la Corée du sud doit être défendue par les Sud-Coréens.

« Bien que les deux pays aient convenu en février 2007 de transférer le 17 avril 2012 le contrôle opérationnel en temps de guerre à l'armée sud-coréenne, le président Lee Myung-bak, qui a pris le pouvoir, peu après, l'a repoussé de trois ans, jusqu'à décembre 2015, après que son mandat de président ait pris fin.

« Quand je regarde la dernière proposition publiée par le ministère de la Défense, il est difficile de voir qu'ils ont l'intention d'obtenir une défense nationale indépendante, qui est la raison de l'idée originale de transférer le contrôle opérationnel en temps de guerre », a déclaré Kim Jong-dae, rédacteur en chef de Defense 21+. « Il n'est pas certain que l'armée sud-coréenne, qui a été si dépendante des États-Unis, sera en mesure de donner des ordres à l'armée américaine, et il est également difficile de savoir si les États-Unis vont accepter cela. » Les objectifs et les intérêts nationaux de la Corée du sud et des États-Unis seront assurément différents si une guerre éclate. Le ministère de la Défense ne respecte pas la position stratégique de la Corée du sud de déterminer son propre destin et continue de se mettre à la remorque des États-Unis pour des raisons tactiques qui l'accommode », a suggéré Kim.

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La rapporteuse spéciale de l'ONU critique la restriction de la liberté d'expression en Corée du sud

La Rapporteure spéciale des Nations unies sur la situation des défenseurs des droits de l'homme, Margaret Sekaggya, a exhorté le 7 juin le gouvernement de la République de Corée à s'assurer que l'ensemble de ses lois et de ses pratiques soient conformes aux normes internationales des droits de l'homme.

« La société civile de la Corée du sud est dynamique et engagée, notamment dans le domaine des droits de l'homme. Elle est néanmoins confrontée à un nombre de défis qui rendent son travail plus difficile », déclare Mme Sekaggya dans un communiqué de presse à la fin de sa première mission dans le pays.

La Rapporteure spéciale a notamment souligné que certaines dispositions légales, telles que la loi qui pénalise la diffamation, la définition trop vague de la sécurité nationale ou encore les lois qui régulent le contenu de l'internet, pourraient être utilisées pour punir les détracteurs du gouvernement et restreindre la liberté d'expression.

« Le dispositif d'autorisation des manifestations impose des limites à l'organisation de rassemblements pacifiques tout en prévoyant de lourdes amendes pour ceux qui manifestent pour défendre leurs droits », explique Mme. Sekaggya.

L'usage de la force de la police lors des manifestations « non autorisées » est une autre préoccupation de la Rapporteure spéciale, qui a souligné la nécessité d'une meilleure formation des forces de sécurité dans le domaine de contrôle des foules.

« Je suis préoccupée par les restrictions injustifiées du droit d'association de certains groupes de défenseurs des droits humains, en particulier ceux qui défendent les droits des travailleurs et des migrants. Les dispositions contre « l'obstruction du travail » du code pénal criminalisent de façon injuste ceux qui utilisent les rassemblements ou recourent à la grève pour défendre leurs droits », souligne Mme Sekaggya.

Selon elle, de nombreuses catégories de défenseurs des droits de l'homme sont particulièrement visées, dont les journalistes, les syndicalistes et les militants environnementaux.

(Centre d'actualité de l'ONU)

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À titre d'information

La nécessité d'oeuvrer pour la paix
dans la péninsule coréenne

S'il est vrai que les relations entre les États-Unis et la Corée du Nord sont compliquées lorsqu'on les examine de près, la base de ces relations, par contre, est relativement simple. En un mot, le gouvernement des États-Unis continue d'être réfractaire aux ouvertures permettant de normaliser les relations avec la Corée du Nord et de promouvoir la paix dans la péninsule coréenne tout en privilégiant la politique périlleuse de changement de régime. Malheureusement, bien que sans grande surprise, les médias aux États-Unis appuient ce choix politique en présentant délibérément les événements de façon unilatérale, pour présenter la Corée du Nord comme un interlocuteur de négociations incertain et indigne de confiance.

Pour corriger le tir, je propose avec ce qui suit un aperçu historique plus complet des relations États-Unis-Corée du Nord, en m'arrêtant aux principaux événements qui ont mené aux tensions actuelles autour du programme nucléaire de la Corée du Nord. Cet examen historique permet de voir que ces tensions sont en grande partie le résultat de provocations répétées et délibérées de la part des États-Unis. Une population informée aux États-Unis et prête et apte à remettre en cause et à changer la politique étrangère des États-Unis serait en définitive un important facteur contribuant à la paix dans la péninsule coréenne.

Le contexte historique

Sans doute le point de départ le mieux indiqué pour comprendre la logique qui sous-tend les relations États-Unis-Corée du Nord serait la fin des hostilités de la Guerre de Corée en 1953. Les États-Unis ont insisté pour que la guerre soit conclue par un armistice et non par un traité de paix. Une conférence a eu lieu à Genève l'année suivante, mais n'a pas réussi à stabiliser la paix et la réunification de la Corée et les demandes étasuniennes sont la principale raison de cet échec.

Les États-Unis ont rejeté les demandes de la Corée du Nord à l'effet de tenir des élections à l'échelle de la Corée, supervisée par une commission composée de représentants de pays neutres et visant à former un nouveau gouvernement coréen unifié, une proposition que même plusieurs alliés des États-Unis jugeaient raisonnable. Plutôt, les États-Unis ainsi que la Corée du sud ont insisté pour que des élections se tiennent seulement en Corée du Nord et sous la supervision des Nations unies dominées par les États-Unis. Évidemment la conférence s'est terminée sans déclaration finale, laissant une Corée divisée et les États-Unis et la Corée du Nord en état de guerre perpétuel.

Jusqu'à la fin des années 1980 et au début des années 1990, un ensemble de relations litigieuses quoique relativement stables entre les États-Unis et l’Union soviétique et entre la Corée du Nord et la Corée du sud a calmé les hostilités entre la Corée du Nord et les États-Unis. La chute de l'Union soviétique, la transformation de la Russie et d'autres pays de l'Europe centrale en pays capitalistes a tout changé.

La Corée du Nord ayant perdu ses principaux partenaires économiques, son économie a été en proie au chaos et les périodes d'inondations et de sécheresse qui ont suivi n'ont fait qu'aggraver la situation. Le gouvernement de la Corée du Nord, maintenant dans une position relativement vulnérable, a réagi en cherchant de nouveaux partenaires commerciaux et d'investissements. Pour ce faire, le prérequis était de normaliser les relations avec les États-Unis. La réponse du gouvernement étasunien aux nouvelles circonstances a été tout autre : il a cherché à profiter des difficultés économiques de la Corée du Nord et de son isolement politique en rejetant toute négociation et en cherchant à imposer un changement de régime.

L'interaction des efforts des États-Unis et de la Corée du Nord pour atteindre leurs objectifs respectifs est au coeur d'une tendance générale : le Nord tente de forcer les États-Unis à des pourparlers directs en faisant valoir qu'il peut très bien intensifier ses capacités militaires et menacer les intérêts des États-Unis. En même temps, elle offre en guise de négociation de laisser tomber cet accroissement de son potentiel militaire en échange de relations normalisées. Pour les États-Unis, ces démonstrations de puissance militaire servent à justifier des sanctions économiques encore plus draconiennes, ce qui fait que la Corée du Nord doit à nouveau hausser le ton.

Cette tendance connaît des interludes. Parfois les États-Unis, inquiets du potentiel militaire grandissant de la Corée du Nord, vont se mettre à la table des négociations. Parfois aussi on en arrive à des ententes. Par contre, les États-Unis respectent rarement leurs engagements. Et puis la tendance reprend de plus belle. Le point à retenir est que c'est la Corée du Nord qui veut conclure un traité de paix mettant fin à la Guerre de Corée et normalisant ses relations avec les États-Unis. Le partenaire récalcitrant dans toute cette affaire, ce sont les États-Unis, qui préfèrent vivre au bord de la guerre dans l'espoir de faire tomber le régime nord-coréen.

L'accord-cadre, 1994-2002

Le gouvernement étasunien a commencé à soulever des inquiétudes au sujet d'une possible menace nord-coréenne immédiatement au lendemain de l'effondrement de l'Union soviétique. La motivation des États-Unis venait de plusieurs facteurs, en particulier la nécessité de se trouver un nouvel ennemi pour justifier le niveau élevé de leurs dépenses militaires. Colin Powell, qui était alors chef conjoint d'état-major, avait expliqué dans un témoignage devant le Congrès que faute de l'Union soviétique, les États-Unis allaient devoir se trouver de nouveaux ennemis. Il ne restait, selon lui, que Fidel Castro et Kim Il Sung.

La Corée du Nord avait fermé son seul réacteur fonctionnel en 1989 à des fins de réparation. En 1992, la CIA a prétendu que cette fermeture avait servi de couverture pour retraiter du plutonium et que la Corée du Nord possédait maintenant deux armes nucléaires, ce qui fut même remis en question à l'époque par le département d'État. La Corée du Nord a aussi nié cette affirmation tout en offrant aux États-Unis d'atténuer leurs inquiétudes au sujet du nucléaire à condition qu'ils participent à des pourparlers de normalisation.

L'administration de Clinton a rejeté l'invitation et s'est mise sur un pied de guerre, laquelle fut évitée grâce à l'intervention de Jimmy Carter. Celui-ci avait voyagé en Corée du Nord et avait négocié un accord avec Kim Il Sung, accord que Clinton a accepté non sans objections. L'accord- cadre de 1994 qui en a résulté obligeait la Corée du Nord à mettre en suspens son réacteur modéré au graphite et de suspendre la construction de deux réacteurs plus importants. Il obligeait aussi la Corée du Nord à stocker le combustible ayant servi à ses réacteurs fonctionnels sous supervision de l'Association internationale de l'énergie atomique (AIEA).

En échange, les États-Unis avaient accepté de coordonner la construction de deux réacteurs à eau ordinaire, que l'on considère moins menaçants d'un point de vue militaire et qui devaient être terminés avant 2003. Dès leur achèvement mais avant qu'ils ne deviennent fonctionnels, ces réacteurs ainsi que toutes les installations nucléaires de la Corée du Nord devaient être soumis à des inspections de l'AIEA. Pendant la période de construction, les États-Unis ont accepté d'approvisionner la Corée du Nord en pétrole lourd devant servir à la production d'électricité et au chauffage.

Aussi, l'accord appelait les États-Unis à « tout mettre en oeuvre pour la normalisation intégrale des relations politiques et économiques » avec la Corée du Nord et à s'engager à « fournir des assurances formelles à la Corée du Nord que les États-Unis n'auraient pas recours aux menaces ou à l'utilisation d'armes nucléaires ».

Les médias aux États-Unis ont rarement rendu compte du peu d'effort déployé par le gouvernement des États-Unis pour respecter leurs engagements. Les livraisons de pétrole n'ont connu que des retards et les sanctions n'ont commencé à être levées qu'en juin 2000. Aussi, le béton pour le premier réacteur à eau ordinaire n'a été coulé qu'au mois d'août 2002. Des années plus tard, des documents du gouvernement étasunien ont révélé que les États-Unis avaient lésiné parce que les représentants du gouvernement étasunien étaient convaincus que le régime de la Corée du Nord allait s'effondrer.

L'administration Bush ne voulait pas de l'accord-cadre et y a allègrement mis fin à la fin de 2002 sous prétexte que la Corée du Nord n'avait pas respecté les conditions de l'accord en préparant des armes nucléaires par le biais d'un programme secret d'enrichissement d'uranium. En janvier 2002, par ailleurs, le président Bush avait placé la Corée du Nord au rang des pays faisant partie de « l'axe du mal ». En mars de la même année, le contenu d'une nouvelle doctrine militaire a été éventé, révélant que les États-Unis se réservait le droit d'avoir recours à des attaques militaires préventives et à des actions secrètes contre des pays ayant en leur possession des armes nucléaires, biologiques et chimiques mais aussi d'avoir recours aux armes nucléaires advenant un confit. La Corée du Nord était l'un de ces pays ciblés. En juillet, le président Bush rejetait la proposition de la Corée du Nord de tenir une réunion des ministres des Affaires étrangères et disait de Kim Il Jong qu'il était un « pygmée » et « un enfant gâté à la table de cuisine ».

Il est possible que la Corée du Nord ait en effet entrepris un programme d'uranium enrichi à la fin des années 90, bien que l'administration Bush n'ait jamais fourni aucune preuve de l'existence d'un tel programme. Ce qui est clair cependant, c'est que la Corée du Nord a bel et bien cessé son programme de plutonium, a laissé ses installations péricliter sans recevoir grand chose en retour. Le refus des États-Unis de respecter leurs engagements se reflète dans le fait que les demandes actuelles de la Corée du Nord sont basées sur ces engagements pris par les États-Unis en 1994.

Le gouvernement nord-coréen a riposté à la fin de l'Accord cadre tel que prononcée par l'administration Bush en exigeant que les inspecteurs de l'AIEA quittent le pays. Aussi a-t-il repris son programme de plutonium tout en s'engageant à bâtir un arsenal nucléaire pour se défendre.

Pourparlers à six, 2003-2007

Craignant qu'une guerre n'éclate à nouveau dans la péninsule coréenne, le gouvernement chinois a organisé des pourparlers dans le but de réduire les tensions entre les États-Unis et la Corée du Nord. Les pourparlers ont débuté en août 2003 avec la participation de six pays : les États-Unis, la Corée du Nord, la Corée du sud, le Japon, la Chine et la Russie. Deux ans de pourparlers n'ont permis de résoudre aucun des litiges séparant les États-Unis et la Corée du Nord. Cela s'explique en grande partie par le fait que le porte-parole des États-Unis avait reçu l'ordre de ne pas s'adresser directement à ses homologues nord-coréens si ce n'est que pour exiger que la Corée du Nord mette fin à ses activités nucléaires, qu'elle détruise ses missiles, réduise ses forces conventionnelles et cesse de porter atteinte aux droits de la personne. La Corée du Nord, pour sa part, refusait de faire de son programme nucléaire une question séparée de ses relations plus larges avec les États-Unis.

En bout de ligne, en 2005 les Chinois ont annoncé que selon eux les pourparlers étaient un échec et qu'ils tiendraient les États-Unis responsables de cet échec. Peu de temps après, les États-Unis ont cessé de s'opposer à une entente. En septembre 2005, les six pays ont émis une déclaration conjointe qui ressemblait à toutes fins pratiques à l'Accord-cadre. Tandis que tous les pays se sont engagés à oeuvrer à la dénucléarisation de la péninsule coréenne, les pas concrets les plus importants relevaient des États-Unis et de la Corée du Nord « par étapes conformément au principe du donnant-donnant tant au niveau de l'engagement que de l'action ».

Malheureusement, au lendemain de la déclaration conjointe, les États-Unis l'ont sabordée. Le Trésor étasunien avait annoncé qu'il détenait des preuves que la Corée du Nord était engagée dans la contrefaçon de billets de banques de 100 $, les « super billets », et que cette contrefaçon allait mener à la guerre. Il a pointé du doigt le Banco Delta Asia établie au Macao et qui était l'une des principales liaisons financières de la Corée du Nord en Occident et l'a accusé de soutenir des activités illégales. Il a alors gelé les comptes en dollars et a émis un avertissement aux autres banques de couper tout lien d'affaires avec cette banque et de ne pas autoriser des transactions en dollars nord-coréens. Le but était d'isoler la Corée du Nord en lui niant accès aux marchés internationaux du crédit. L'accusation de contrefaçon a été rejetée par la Corée du Nord, mais aussi par la plupart des experts monétaires occidentaux ainsi que par la Chine et la Russie, peu convaincues par les preuves mises de l'avant par le Trésor étasunien. Cependant, par craintes de représailles de la part des États-Unis, la plupart des banques se sont pliées à la politique étasunienne, ce qui eut un grave impact sur l'économie nord-coréenne.

Le moment choisi pour les accusations de contrefaçon est révélateur. Le Trésor étasunien connaissait le problème des super billets de banque depuis 1989 et avait d'abord accusé l'Iran. Le total de ces billets était de seulement de 50 millions $ et ceux-ci ne circulaient même pas aux États-Unis. Il ne s'agissait de toute évidence que d'une nouvelle tentative de saboter le processus de normalisation et d'intensifier la pression économique sur la Corée du Nord.

La Corée du Nord a annoncé que le prérequis pour sa participation aux Pourparlers des six était que les États-Unis retirent leurs accusations de contrefaçon et qu'ils remboursent ses dépôts en dollars à la Banco Delta Asia. Après des mois d'inaction de la part des États-Unis, la Corée du Nord, elle, est passée à l'action. Le 4 juillet 2006, elle a fait des tirs d'essai de six missiles au-dessus de la mer du Japon, y compris un missile intercontinental. Les États-Unis et le Japon ont condamné ces actions et ont intensifié leurs sanctions contre la Corée du Nord. La Corée du Nord a riposté le 8 octobre 2006 en procédant à son premier essai nucléaire. En fin de compte, les États-Unis se sont dits prêts à reconsidérer l'embargo financier et la Corée du Nord a annoncé que si son argent était remboursé et qu'elle recevait de l'aide économique et des approvisionnements d'énergie elle pourrait envisager de fermer à nouveau ses installations nucléaires, de laisser aussi entrer les inspecteurs internationaux et de discuter d'un désarmement nucléaire, le tout conformément à des efforts de normalisation de ses relations avec les États-Unis.

Les Pourparlers des six ont repris à nouveau en décembre 2006, mais le processus de mise en oeuvre de la déclaration conjointe était tout sauf harmonieux. Le négociateur en chef pour les États-Unis aux pourparlers a annoncé en février 2007 que tous les dépôts nord-coréens seraient dégelés et rendus à la Corée du Nord en l'espace de 30 jours. On accordait à la Corée du Nord 60 jours pour fermer son réacteur. Cependant le Trésor a refusé de retirer ses accusations et aucune banque ne voulait se porter volontaire pour gérer l'argent de peur d'être accusé de complicité avec le terrorisme. Le 25 juin, le département d'État avait réussi de façon détournée à trouver une alternative permettant de résoudre le problème, ce qui a fait que l'entente des six a pu aller de l'avant.

L'entente des six, 2007-2009

Tel que mentionné, l'entente des six devait se faire par étapes. La première étape, qui avait connu du retard du fait que les États-Unis avaient mis du temps à rembourser les fonds nord-coréens, fut complétée sans heurts. En juillet 2007, la Corée du Nord a fermé et scellé son complexe nucléaire de Yongbyon où se trouvaient le réacteur, l'installation de retraitement et l'usine servant à fabriquer les barres de combustible. Elle a aussi fermé et scellé ses deux réacteurs nucléaires dont elle n'avait pas terminé la construction. Elle a aussi invité à nouveau les inspecteurs de l'AIEA. En retour, les États-Unis y ont expédié une cargaison de mazout.

La deuxième étape a débuté en octobre et la Corée du Nord devait procéder à la désactivation de toutes ses installations nucléaires avant le 31 décembre 2007 et « rendre disponible toute l'information faisant le point sur tous ses programmes nucléaires existants ». Selon une entente conclue séparément, elle donnait aussi son accord à révéler où en étaient rendues ses activités d'enrichissement d'uranium. En retour, la Corée du Nord devait recevoir, par étapes, « de l'aide pour ses besoins d'énergie, économiques et humanitaires ». Dès que ces conditions de la deuxième étape seraient respectées, la Corée du Nord devait être exclue de la Loi sur le commerce avec l'ennemi des États-Unis ainsi que de la liste des États qui appuient le terrorisme.

La deuxième étape a été lente à finaliser dû à l'insatisfaction de la Corée du Nord face aux délais dans la livraison de mazout. En mai 2008 cependant, la Corée du Nord a accompli les exigences finales de la deuxième étape en publiant une documentation détaillée de son programme de plutonium et, en juin, une déclaration sur son inventaire nucléaire. De son côté, les États-Unis ont retiré la Corée du Nord de la liste des États appuyant le terrorisme.

Cependant, le gouvernement étasunien n'a pas respecté son engagement de fournir l'aide promise selon l'entente et de lever les sanctions contre la Corée du Nord. Il exigeait dorénavant que la Corée du Nord accepte un protocole de vérification des plus intrusifs qui ouvrirait toutes les installations militaires nord-coréennes à l'inspection des États-Unis, déclarant que son engagement envers la deuxième étape était conditionnel à cette nouvelle imposition. Les États-Unis étaient conscients que cette exigence ne faisait pas partie de l'entente originale. La secrétaire d'État Rice avait déclaré : « Ce que nous venons de faire, en effet, est de passer en accéléré aux engagements de la troisième étape touchant à la vérification et à l'accès aux réacteurs. »

La Corée du Nord a proposé un compromis, c'est-à-dire un mécanisme de vérification chapeauté par les six par lequel des visites sur les sites nucléaires déclarés seraient permises ainsi que des entrevues avec le personnel technique. Elle a aussi proposé de négocier un nouveau protocole de vérification au moment du démantèlement final. Le gouvernement étasunien a rejeté ce compromis et a interrompu toutes ses livraisons d'aide.

En février 2009, la Corée du Nord a commencé ses préparatifs pour le lancement d'un satellite. La Corée du sud devait procéder à son propre lancement de satellite en juillet. La Corée du Nord avait signé tous les protocoles internationaux régissant les satellites et avait rendus publics les détails de son plan de lancement. L'administration Obama a mis en garde la Corée du Nord qu'elle ne serait pas conforme aux sanctions qui lui avaient été imposées suite à son essai nucléaire. La Corée du Nord a affirmé qu'elle avait tous les droits de développer sa technologie de satellite et que si les États-Unis ripostaient par de nouvelles sanctions, elle se retirerait des Pourparlers des six, elle sortirait les inspecteurs de l'AIEA du pays, elle remettrait ses réacteurs en marche et elle consoliderait son programme nucléaire comme moyen de dissuasion.

La Corée du Nord a lancé son satellite en avril. En juin, les États-Unis avaient gagné l'appui de l'ONU pour imposer de nouvelles sanctions et la Corée du Nord a mis sa menace à exécution. En mai, elle a procédé à un autre essai nucléaire donnant lieu à encore de nouvelles sanctions.

Les événements récents

En avril et en décembre 2012, la Corée du Nord a à nouveau lancé des satellites d'observation. Chacun de ces lancements a été accueilli par des protestations des États-Unis prétendant qu'il s'agissait en réalité d'essais de missiles balistiques représentant une menace pour les États-Unis, même si la presque totalité des observateurs s'entendaient pour dire que les caractéristiques des lancements -- le trajectoire, la faible propulsion et l'autonomie prolongée -- répondaient aux exigences d'un lancement de satellite dans l'espace et non d'un essai de missile.

Suite au lancement de décembre, le seul lancement réussi, les États-Unis ont encore une fois convaincu le Conseil de sécurité d'imposer une nouvelle ronde de sanctions. La riposte de la Corée du Nord a été de mener à bien son troisième essai nucléaire en février 2013. Le ministère des Affaires étrangères de la Corée du Nord a fait valoir qu'il y avait eu « plus de 2 000 essais nucléaires et 9 000 lancements de satellite » dans le monde, « mais le conseil de sécurité de l'ONU n'a jamais adopté de résolutions empêchant les essais nucléaires ou les lancements de satellites ». Le Conseil de sécurité a réagi à l'essai nucléaire de la Corée du Nord en approuvant des sanctions encore plus draconiennes.

Au-delà des sanctions, les États-Unis ont aussi intensifié leurs provocations militaires contre la Corée du Nord en espérant déstabiliser le nouveau régime nord-coréen dirigé par Kim Jung Un. Par exemple, en 2012 les analystes militaires des États-Unis et de la Corée du sud ont mené l'exercice de simulation de guerre informatisée le plus important au monde, déployant plus de 100 000 troupes sud-coréennes simulant une invasion de la Corée du Nord dans le but de « stabiliser le pays en cas de chute du régime ». Leurs exercices militaires annuels comprennent aussi le déploiement de la part des États-Unis et de la Corée du sud des plus importantes opérations de débarquement amphibies depuis 20 ans : 13 navires militaires, 52 véhicules blindés amphibies, 40 chasseurs à réaction et hélicoptères et 9 000 soldats américains.

Lors des exercices de guerre en mars 2013, les États-Unis ont utilisé des bombardiers Stealth B-2 à capacité nucléaire au-dessus de la Corée du sud. Il s'agit des seuls avions en mesure de lancer une bombe de pénétration Massive Ordonnance de 30 000 livres, mise au point pour détruire les installations souterraines de la Corée du Nord. Des bombardiers à capacité nucléaire B-52 ont aussi survolé la Corée du sud, utilisant des munitions factices. Les États-Unis ont aussi déployé le sous-marin à propulsion nucléaire USS Cheyenne, armés de missiles Tomahawk, dans les eaux coréennes.

Le gouvernement de la Corée du Nord a répondu à ces menaces de trois façons. D'abord, le ton de ses déclarations a changé. En particulier, elle a commencé à concentrer ses propres menaces contre les États-Unis et contre la Corée du sud. Par exemple, le gouvernement a déclaré : « Si les impérialistes étasuniens brandissent des armes nucléaires, alors nous, contrairement à nos réactions antérieures, au moyen d'attaques nucléaires diversifiées, précises et de notre cru, allons transformer non seulement Séoul mais Washington elle-même en une mer de feu. » Elle a aussi affirmé, pour la première fois, que ses armes nucléaires étaient dorénavant non négociables, du moins, aussi longtemps qu'existeront « les menaces nucléaires et la politique hostile des États-Unis ».

Deuxièmement, le gouvernement a placé les forces nord-coréennes en état d'alerte, y compris toute l'artillerie, les fusées et les missiles. Kim Jong Un a annoncé que le pays « riposterait au chantage nucléaire des États-Unis par une attaque nucléaire sans merci ». En dernier lieu il a annoncé, en avril, qu'il rétablirait son programme d'uranium enrichi et son réacteur Yongbyon.

Ce que réserve l'avenir

L'administration Obama a adopté ce qu'elle appelle la doctrine de la « patience stratégique » vis-à-vis la Corée du Nord. Mais comme permet de le constater l'histoire récente, en réalité les États-Unis ont toujours maintenu leur politique agressive envers la Corée du Nord, motivés par l'espoir que le régime s'effondre et que la réunification de la Corée se fasse par l'absorption du nord par le sud, comme en Allemagne.

La conséquence de cette politique est l'aggravation des conditions économiques dans le nord, la hausse des tensions militaires entre les États-Unis, le Japon, la Chine et les deux Corée, l'encouragement des forces de droite en Corée du sud et au Japon et la menace grandissante d'une nouvelle guerre sur la péninsule coréenne. Il y a de puissants intérêts au Japon, en Corée du sud et aux États-Unis qui favorisent une militarisation de la politique étrangère et intérieure, même au risque de provoquer la guerre. Tragiquement, cela se fait aux dépens de la majorité des gens touchés dans ces pays, même si la guerre est évitée.

La Corée du Nord a clairement énoncé sa disposition à entamer des pourparlers directs avec les États-Unis. Seule la pression populaire aux États-Unis peut forcer le gouvernement américain à changer sa politique et à accepter l'offre de négociation. Il est temps que le gouvernement des États-Unis signe un traité de paix mettant finalement un terme à la Guerre de Corée et fasse des gestes sincères en faveur de la normalisation des rapports avec la Corée du Nord.

* Martin Hart-Landsberg est professeur d'économie et directeur du programme d'économie politique au collège Lewis and Clark, à Portland, en Oregon et chercheur attaché à l'Institut des sciences sociales de l'Université nationale de Gyeongang, en Corée du sud. Son domaine d'enseignement et de recherche comprend l'économie politique, le développement économique, l'économie internationale et l'économie politique de l'Est asiatique. Il est également membre du Conseil pour les droits des travailleurs (Portland). Cet article a été publié par le Korea Policy Institute.

(Traduction : LML)

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