Le Marxiste-L�niniste

Numéro 133 - 24 décembre 2012

La nécessité de briser le berceau historique

Une tâche cruciale pour l'année qui vient


La nécessité de briser le berceau historique
•  Une tâche cruciale pour l'année qui vient

Comment vous dépensez votre argent
•  Arrêtez de payer les riches! Augmentez les investissements dans les programmes sociaux! 

Projets de loi défendant le «droit d'être esclave» adoptés au Michigan
•  Assaut sans précédent contre les travailleurs et les syndicats
•  Les lois sur le secteur public excluent plusieurs questions dans le cadre des négociations

À la défense des droits des Premières Nations du Canada
•  La nation crie de Beaver Lake en Alberta conteste le droit de monopole
•  L'affirmation des droits ancestraux, issus des traités et constitutionnels

Note aux lecteurs
Joyeuses fêtes et nos meilleurs voeux pour la Nouvelle Année


La nécessité de briser le berceau historique

Une tâche cruciale pour l'année qui vient

L'organisation et la résistance de la classe ouvrière sont nécessaires pour débloquer la discussion et la résolution des problèmes économiques, politiques et sociaux.

Un des pouvoirs importants de l'État moderne est celui de manipuler le discours public et de diriger la pensée dans un sens précis. Sur toutes les questions d'importance, l'État par ses institutions politiques et les médias de masse subvertit le discours public de manière à bloquer la discussion, l'élaboration et l'analyse. La pensée est entraînée dans une direction donnée, comme du bétail, avec des idées préconçues et des conclusions tirées d'avance, et il est difficile sinon impossible d'y échapper sans l'organisation et la résistance collectives.

Des explications faciles sont données pour le chômage, la crise économique, le déficit, la dette, la guerre, le taux de criminalité, le système de santé, l'éducation, la retraite et surtout les rapports entre employés et employeurs. Ces réponses et explications sont le plus souvent des diversions ou des arguments qui tournent en rond et les problèmes ne cessent de refaire surface sous différentes formes et avec plus d'intensité puisque les causes restent inchangées.

C'est ce qui se passe avec la fusillade de Newtown dans laquelle des enfants et leurs protecteurs ont perdu la vie. Le cerveau n'avait pas encore absorbé la nouvelle que des enfants de dix à sept ans ont été tués, que déjà la direction du « débat » était fixée : pour ou contre le contrôle des armes à feu. Les chefs politiques n'ont pas perdu de temps à donner une direction au discours public et à proposer toutes sortes de solutions au problème des fusillades de plus en plus fréquentes. Le maire milliardaire de New York Michael Bloomberg, qui soit dit en passant possède un empire médiatique, a mené la charge. Puis ce fut au tour du président Obama, suivi de plusieurs commentateurs de renom qui ont admis avoir été contre le contrôle des armes à feu, mais ont changé d'idée après le massacre du 14 décembre.

D'abord sous le choc de la tragédie, l'esprit est aussitôt sous l'emprise paralysante d'un débat contrôlé. C'est toujours ainsi. Les individus peuvent rarement échapper au piège que Hardial Bains a appelé le « berceau historique ». Tôt ou tard ceux qui parviennent à faire du sens de ce qui se passe finissent par perdre toute pertinence et par sombrer dans l'isolement s'ils sont ou demeurent non organisés ou déconnectés du mouvement de la classe ouvrière.

Un mouvement organisé de la classe ouvrière qui défend ses droits et qui résiste à son asservissement par les rapports de production est la seule force sociale capable de rompre avec le berceau historique et de maintenir la rupture par la négation de sa négation et de ses négateurs. C'est la première chose à saisir. La pensée est routinièrement niée dans le berceau historique et cette négation doit être niée à son tour d'une manière organisée et soutenue. La perspicacité de l'individu n'est pas suffisante. Elle doit devenir une force organisée dans un mouvement social lié au mouvement de l'histoire, sinon le berceau historique et ses promoteurs et apologistes vont vite la submerger et l'étouffer grâce à leur énorme pouvoir de désinformation et leur capacité à contrôler le discours public. La perspicacité d'un mouvement organisé de la classe ouvrière, lorsqu'elle est disséminée, peut venir à bout du pouvoir et de l'empire du berceau historique et le surmonter.

Le berceau historique porte le poids de 4 000 ans de systèmes de classe et de réponses faciles aux problèmes sociaux qui surgissent des contradictions des rapports de production à chaque période. La violence de la classe dominante et de son État, notamment de son armée, est le moyen premier par lequel sont maintenus les rapports de classe antagonistes et qu'est bloqué le progrès de la société. Le deuxième moyen est la capacité de convaincre la classe opprimée, la classe ouvrière dans le monde d'aujourd'hui, qu'elle ne peut pas penser à l'extérieur du berceau historique, qu'elle ne peut pas analyser les conditions telles qu'elles sont et s'établir comme classe dominante capable de donner une nouvelle direction à la société, avec son propre système économique, ses institutions politiques et ses formes sociales correspondant au niveau de développement de la grande production industrielle.

Une nouvelle direction dans les affaires politiques, dans l'économie et dans les formes sociales peut et doit surgir de la condition sociale dans laquelle les gens vivent, travaillent, produisent et se reproduisent. Dans les conditions concrètes du monde d'aujourd'hui, une nouvelle direction n'est pas possible sans la pensée indépendante, l'organisation et la résistance de la classe ouvrière.

Les travailleurs produisent tous les produits et dispensent tous les services nécessaires à notre existence collective. Ils produisent et pourvoient aux besoins de la société et sont garants de sa reproduction. De toutes les forces sociales modernes, ils sont les seuls qui possèdent la largeur d'esprit nécessaire pour voir la forêt plutôt que des arbres et surmonter l'étroitesse de l'intérêt privé qui provient de la propriété privée des composantes rivales de l'économie.

Le refus de l'élite dominante qui représente les propriétaires des composantes rivales de l'économie de reconnaître les droits de la classe ouvrière mène à la négation du droit des véritables producteurs des biens et dispensateurs des services d'être au centre de toutes les décisions touchant à l'organisation de l'économie et à sa direction et à la résolution des problèmes auxquels la société est confrontée. Ce droit n'est pas nié dans l'abstrait ou de façon générale, il est nié dans les institutions économiques et les secteurs économiques où ils travaillent directement. La loi 115 du gouvernement de l'Ontario prive les éducateurs de leur droit à avoir voix au chapitre sur l'éducation publique alors qu'ils sont les mieux placés pour le faire et les plus directement touchés, et elle les prive d'une voix au chapitre sur les salaires, les avantages sociaux, les pensions et les conditions de travail. La loi 115 est un exemple flagrant du pouvoir de priver du gouvernement qu'il faut surmonter par l'organisation et la résistance.

L'établissement de l'harmonie entre la classe ouvrière et l'économie socialisée ouvrira les possibilités de résoudre les problèmes en apparence insurmontables de la société, y compris la violence meurtrière de la guerre et son expression dans nos communautés, comme les fusillades et les tueries. En privant l'élite dominante de son pouvoir de priver la classe ouvrière de ses droits, on brise le berceau historique dans lequel sont piégés les problèmes économiques, politiques et sociaux, ce qui ouvre les possibilités de résolution.

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Comment vous dépensez votre argent

Arrêtez de payer les riches! Augmentez les investissements dans les programmes sociaux!

La façon dont une personne ou un gouvernement dépense son argent en dit long sur elle ou lui. Il n'y a pas longtemps, le ministre des Finances Jim Flaherty a dit que le gouvernement Harper n'améliorera pas le Régime de pensions du Canada parce que cela ferait du tort à l'économie. Il n'a pas expliqué comment le fait de donner plus d'argent à nos aînés appauvris, qui le dépenseraient sûrement tout de suite, donc de l'argent remis immédiatement dans l'économie, ferait du tort à l'économie alors que dépenser 40 milliards $ pour les avions de combat américains aide l'économie.

Les gouvernements du Canada et des provinces disent qu'il faut réduire les dépenses pour l'éducation, la santé et les autres programmes sociaux. Les médias de masse appellent cela une politique d'austérité et faire preuve de restreinte. Les enseignants, travailleurs de la santé, activistes sociaux et autres appellent cela une attaque contre les droits des citoyens et contre le tissu social, et un signe que les gouvernements ont vraiment leurs priorités à l'envers.

Arrêtez de payer les riches !

Selon une étude de l'Institut de recherche sur les politiques publiques, le monopole General Motors, qui est une propriété privée contrôlée par des intérêts américains, a reçu au total 435 millions $ des gouvernements du Canada et de l'Ontario ne serait-ce qu'en 2005. Un autre monopole américain de l'automobile, Chrysler, a reçu 122 millions $ des deux paliers de gouvernements la même année et un troisième, Ford, a reçu au total 161 millions $ de 2008 à 2010.

Ford prétend avoir refusé de bénéficier du plan de sauvetage durant la crise économique de 2008-2010, mais il a quand même reçu 161 millions $ du gouvernement canadien pour ces années.

On apprend maintenant que ces trois monopoles possédés et contrôlés par des intérêts américains viennent de signer des conventions collectives avec les travailleurs canadiens de l'automobile avec comme condition qu'ils doivent recevoir encore plus d'argent du trésor public.

L'accord sur le Passage international de la rivière Détroit

Les dépenses consenties aux termes de l'accord avec les États-Unis pour construire un autre pont reliant Windsor à Détroit en disent long sur les gouvernements du Canada, des États-Unis, de l'Ontario et du Michigan. Le gouvernement Harper et le gouvernement de l'Ontario ont accepté de verser 550 millions $ des fonds publics à des monopoles privés pour construire et gérer le pont et les voies d'approche des deux côtés de la rivière. Le gouvernement canadien paie la part du gouvernement de l'État du Michigan parce que ce dernier dit n'avoir plus d'argent après avoir versé 6,5 milliards $ en subventions à différents monopoles, dont la majeure partie a été accaparée par les monopoles de l'automobile.

Le Michigan est l'État qui a vu grandir GM, Ford et Chrysler et on y trouve encore aujourd'hui beaucoup d'usines de l'industrie de l'automobile. C'est en grande partie ces mêmes monopoles de l'automobile qui ont demandé la construction du nouveau pont pour répondre à leurs besoins de transport d'automobiles et de pièces automobile d'un pays à l'autre. Ils veulent aussi accroître la concurrence entre les gouvernements à savoir lequel leur donnera le plus d'argent en subvention et la concurrence entre les travailleurs de l'automobile des deux côtés de la frontière à savoir lesquels auront les réclamations les moins élevées sur la valeur qu'ils produisent.

Pour s'assurer que les fonds publics continuent d'aller aux monopoles possédés et contrôlés par des intérêts privés et non aux programmes sociaux, le Michigan a adopté une nouvelle loi qui affaiblit les syndicats pour que la classe ouvrière et ses collectifs soient privés de leurs droits et d'une voix au chapitre sur la façon dont l'argent public est dépensé.

Le gouvernement libéral de l'Ontario a adopté une loi semblable, la loi 115, qui enlève aux enseignants et autres travailleurs de l'éducation leurs droits et une voix au chapitre sur la façon dont l'argent public est dépensé.

On peut donc savoir beaucoup de choses sur une personne ou sur un gouvernement en regardant la façon dont elle ou il dépense son argent. Toutes ces subventions d'État pour payer les riches, tout ce discours à propos du besoin de faire preuve de restreinte et d'austérité dans les dépenses publiques, toutes ces attaques de l'État contre les droits des travailleurs sont un appel à l'action pour la classe ouvrière de l'Ontario et du Michigan, car cela montre à quel point il est urgent de s'organiser et de résister pour défendre les droits des travailleurs et leur voix indépendante sur comment l'argent des gouvernements doit être dépensé.

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Projets de loi défendant le «droit d'être esclave» adoptés au Michigan

Assaut sans précédent contre
les travailleurs et les syndicats


Grande manifestation au Michigan contre l'adoption de lois antiouvrières défendant prétendument «le
droit de travailler», 11 décembre 2012

Grande manifestation au Michigan contre l'adoption de lois antiouvrières défendant prétendument «le droit de travailler», 11 décembre 2012 Y allant « à haute vitesse » et avec peu ou pas de débats et d'audiences publics, l'instance législative du Michigan a rapidement adopté deux projets de loi défendant le « droit d'être esclave », l'un pour le secteur privé et l'autre pour les travailleurs du secteur public, y compris les enseignants. Les monopoles et leurs représentants politiques espèrent que ces lois, portant le nom de « droit au travail » (DAT), vont paralyser le mouvement syndical en le privant des fonds nécessaires à son fonctionnement et à son organisation. Par le biais de cet assaut législatif et par l'introduction massive d'une main-d'oeuvre aux salaires et aux avantages sociaux variables, même au sein d'une même entreprise privée ou publique, les monopoles et leurs agents politiques sont en pleine conspiration pour diviser la classe ouvrière et pour mater sa résistance.

Mais il y a lieu de croire que leur plan ne fonctionne pas comme prévu. Plus de 10 000 travailleurs provenant de tous les secteurs ont manifesté contre les projets de loi et ont envahi l'édifice du Capitol à Lansing. Trois districts scolaires ont dû fermer leurs écoles parce qu'un trop grand nombre d'enseignants ont indiqué qu'ils ne rentraient pas au travail pour assister à la journée d'action du 11 décembre. Des travailleurs de l'état du Michigan, mais aussi d'états avoisinants y ont participé. Les travailleurs ont aussi ciblé la politisation des intérêts privés impliquant des groupes comme Américains pour la prospérité, un groupe financé par les frères Koch et qui a dépensé des millions pour organiser l'adoption du projet de loi défendant le « droit d'être esclave » tel qu'il a été adopté au Michigan. Les Américains pour la prospérité avaient dressé une tente géante devant l'édifice du Capitol. Les travailleurs l'ont fait tomber, défiant une cavalerie de state troopers.

Les travailleurs ont aussi tenu responsable le milliardaire local Richard DeVos du monopole Amway pour s'être servi de sa fortune pour endosser ces projets de lois antiouvriers. Le centre Mackinac, financé par DeVos, a dépensé 5,7 millions $ l'an dernier et a intensifié ses efforts ces dernières semaines pour que ces projets de loi soient adoptés.

L'esprit des travailleurs est tel, que loin d'envisager de mettre un terme à la résistance, ceux-ci discutent présentement de nouvelles tactiques à prévoir. Il est question de grèves d'une journée, comme celles organisées par les travailleurs de Walmart à l'échelle nationale lors du Black Friday ainsi que par les travailleurs du McDonald et d'autres travailleurs de restauration rapide. Il est aussi question d'augmenter le tempo de l'organisation politique, d'exiger des comptes des politiciens actuels, de retirer les projets de loi et, au cours du mouvement de résistance, de s'organiser pour qu'émerge du mouvement des politiciens ouvriers représentatifs des travailleurs et de leur programme prosocial.

Les deux projets de loi éliminent l'atelier fermé, faisant en sorte que les travailleurs d'une entreprise donnée ou d'un lieu de travail public ne soient pas tenus de devenir membres d'un syndicat et de payer des cotisations pour devenir employés. Les cotisations ne sont pas automatiquement déduites des talons de paie. Le projet de loi prohibe même les conventions collectives qui contiendraient de telles mesures. Ces projets de loi privent les syndicats de leurs fonds organisationnels et visent à diviser les travailleurs.

En surcroît, ces projets de loi contiennent des articles qui serviront sans aucun doute à criminaliser la résistance. Par exemple, un « conflit de travail » est défini ainsi : « tout litige touchant aux termes, à la période d'affectation ou aux conditions d'emploi, ou touchant à l'association ou à la représentation des employés négociant, fixant, préservant ou modifiant les termes ou les conditions d'emploi, sans égard à la personne impliquée, qu'elle soit ou non en relation employeur- employé immédiate. »(article 2b). Cet article cible en particulier toute action menée par les membres de la communauté ou par des groupes d'appui, mais aussi les boycottages secondaires et les lignes de piquetage, etc. Aussi, « un employé ou toute autre personne ne peut avoir recours à la force, à l'intimidation ou à toute menace illégale pour obliger une personne à : (a) devenir membre ou rester membre d'une organisation syndicale (b) s'empêcher d'accepter un emploi ou de devenir membre d'une organisation syndicale ». La loi se veut « équitable », mais en réalité, elle peut facilement être utilisée contre des piqueteurs, contre des travailleurs qui empêchent des briseurs de grève de passer, contre l'organisation de syndicats, etc. La définition d'« intimidation » et de « menaces illégales » reste vague, mais clairement l'employeur et la police y auront recours de façon arbitraire pour attaquer ceux qui luttent pour leurs droits, qu'ils soient travailleurs ou « tout autre personne ».

Ces projets de loi défendant le « droit d'être esclave » ciblent directement les organisations des travailleurs et leur résistance. Ils permettent aux monopoles de piller encore davantage le trésor public, en particulier dans le domaine de l'éducation. Qu'il s'agisse de « programmes pilotes » dictés par les monopoles ou financés par l'État, la sous-traitance ou l'élimination définitive des unités de négociation, toutes ces mesures contribuent à ce que l'État paie toujours davantage les riches. Au Michigan et ailleurs, la revendication est d'Arrêter de payer les riches. L'antidote à ces attaques est de riposter de façon directe, en intensifiant l'organisation, la résistance et une conscience sociale qui exige une nouvelle direction pour l'économie de sorte que les droits du peuple sont garantis.



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Les lois sur le secteur public excluent plusieurs questions dans le cadre des négociations


Protestations contre les lois antiouvrières sur le «droit de travailler» à Lansing, Michigan, le 11 décembre 2012

Protestations contre les lois antiouvrières sur le «droite de travailler» à Lansing, Michigan, le 11 décembre 2012 Une des lois sur « le droit d'être un esclave » adoptées récemment au Michigan contre les travailleurs du secteur public définit plus spécifiquement ce que sont des grèves et contient une liste de thèmes exclus des négociations. Une grève comprend un ensemble de tactiques. Par exemple, une grève « signifie un effort concerté pour ne pas se présenter au travail, l'absence volontaire de son poste, l'arrêt du travail ou le refus en tout ou en partie de l'accomplissement entier, fidèle et approprié des devoirs liés à l'emploi dans le but d'encourager, d'influer ou de forcer un changement dans les conditions ou la rétribution de l'emploi, ou des droits, privilèges ou obligations liés à l'emploi ». Cela inclut aussi une action « prise dans le but de protester ou de répondre à un acte qui prétend ou qui est jugé être une pratique de travail injuste mise en place par l'employeur des écoles publiques » (article 1j). Ainsi, des pratiques de travail injustes sont permises, mais toute protestation contre elles est déclarée illégale! Et c'est l'employeur qui décide ce qui constitue « l'accomplissement entier, fidèle et approprié des devoirs ». Tout cela vise à miner et criminaliser l'organisation et les actions collectives des travailleurs du secteur public.

La loi (article 15) inclut plusieurs questions importantes qui ont fait partie des négociations précédentes et qui sont maintenant exclues et déclarées comme étant « sous l'autorité unique de décision de l'employeur du secteur public ». Par exemple, « toute décision de l'employeur du réseau des écoles publiques en ce qui a trait à l'assignation d'un enseignant ou de l'impact de cette décision sur un seul employé ou de l'accréditation syndicale qui le représente » (15j) ne peut être négociée. C'est une attaque directe contre le droit d'ancienneté et cela crée des conditions de précarité, puisque les enseignants peuvent être affectés à n'importe quel poste dans le réseau scolaire et ne peuvent remettre en question les décisions arbitraires. Pareillement, les décisions en ce qui a trait aux « réductions du personnel » et aux « contenus, normes, procédures, approbation et mise en pratique » des politiques pour de tels licenciements ne peuvent aussi être négociées (15k).

Les décisions en ce qui a trait au choix de la société d'assurances retenue pour la prestation des soins de santé ne font pas partie des négociations. Selon certains contrats, plus d'une société a été utilisée dans le passé, ce qui a été à l'avantage des travailleurs. Il y a beaucoup de résistance à n'utiliser qu'une seule société, telle que la Croix Bleue, détenant le monopole sur les travailleurs du secteur public. La loi garantit maintenant un tel monopole pour la société d'assurance choisie ainsi qu'une réduction des prestations en santé et l'augmentation des contributions versées aux monopoles.

L'horaire du début de la journée d'école et le temps d'enseignement dispensé aux élèves ne peuvent être négociés. La décision de sous-traiter les services d'accompagnement des élèves et l'impact sur les travailleurs actuellement en poste seront maintenant décidés uniquement par l'employeur du secteur public. Il en est de même des bénévoles, « les décisions en ce qui a trait à la mise en place et l'assignation du personnel pour des projets pilotes ou expérimentaux et les décisions en ce qui a trait à l'usage de la technologie aux fins de fournir des services et des programmes d'enseignement, ainsi que l'affectation du personnel pour fournir cette technologie ou l'impact de ces décisions sur » les travailleurs déjà en poste (15f et h). De cette manière, de nombreuses personnes et des projets pilotes, y inclus les classes enseignées via l'internet, par exemple, peuvent être assignés et utilisés sans que les enseignants en poste ne puissent dire quoi que ce soit sur ces questions.

Les programmes d'évaluation des enseignants, qui sont en train d'être mis en place à l'échelle du pays, conformément aux demandes du gouvernement fédéral, ne font pas aussi partie des négociations. C'est très significatif puisque les évaluations vont être utilisées pour justifier le congédiement des enseignants, ainsi que pour décider des échelles de salaires et de primes. Les programmes d'évaluation qui sont mis en place se sont déjà avérés être arbitraires et non fiables, sans aucune mesure cohérente sur laquelle les évaluations peuvent être basées. C'est une source majeure de conflits en même temps que les enseignants tentent de défendre la qualité de l'enseignement et de résister aux efforts de les diviser et de miner la qualité de leurs conditions de travail. La loi est spécifiquement écrite pour arrêter toute forme de résistance, déclarant que « les décisions se rapportant aux contenus, normes, procédures, approbation et mise en pratique d'un système d'évaluation du rendement mis sur pied par l'employeur des écoles publiques » pour les employés et « les décisions en ce qui a trait au contenu de l'évaluation du rendement » ne sont pas négociables. (15l) Parallèlement à cela, le « développement, contenu, normes, procédures, adoption et mise en pratique de la méthode de compensation » et « comment l'évaluation du rendement d'un employé est utilisée pour déterminer la compensation basée sur le rendement » sont aussi non négociables.

Les systèmes d'évaluation arbitraire et de rémunération basée sur elle seront déterminés uniquement par l'employeur du réseau des écoles publiques alors que les enseignants et leurs collectifs n'auront aucun mot à dire. Un système selon lequel chaque enseignant sera rémunéré selon un montant différent, possédant différentes qualifications, faisant face à un congédiement arbitraire ou forcé de déménager à tout moment, est actuellement mis en place alors que le droit des enseignants de défendre leurs droits est criminalisé. Et puisque le Michigan a octroyé au gouverneur la capacité de nommer une personne responsable « de gérer une urgence » et de mettre sous sa tutelle les commissions scolaires, ces décisions relevant de l'employeur pourront être faites par un individu sans formation dans le milieu scolaire, nommé par le gouverneur, comme ce fut le cas à Détroit. En effet, la loi exige notamment que « chaque convention collective négociée après le 16 mars 2011 entre un employeur et des employés du secteur public devra inclure, selon la présente loi, une clause permettant l'embauche d'une personne responsable « de gérer une urgence » afin de « rejeter, modifier ou annuler la convention collective négociée ».

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À la défense des droits des Premières Nations du Canada

La nation crie de Beaver Lake en Alberta
conteste le droit de monopole

Le 10 décembre, les participants aux journées d'action Idle No More (« fini l'inaction ») pour défendre les droits des Premières Nations se sont arrêtés devant le Palais de justice d'Edmonton où se tiennent les audiences sur la poursuite légale entreprise par les Cris de Beaver Lake contre le gouvernement fédéral et le gouvernement albertain. Les Cris de Beaver Lake ont intenté une poursuite contre le gouvernement Harper et contre celui de Redford pour avoir transgressé leurs droits conformément à la responsabilité qui leur incombe en tant que protecteurs du territoire ainsi que de leur droit de tirer un moyen de subsistance de ces terres.

Cette poursuite judiciaire est au coeur de la lutte pour affirmer la souveraineté autochtone. En vertu de son droit à l'existence, une nation souveraine a le droit de prendre librement ses décisions et de façonner son existence, ce qui comprend le droit inhérent de dire non (le droit de veto) à tout ce qui pourrait porter préjudice au peuple.

La nation crie de Beaver Lake est une communauté de 900 Cris du Woodland, un territoire ancestral à deux heures et demi au nord- est d'Edmonton, au sud de la ville du Lac La Biche, dans la région des sables bitumineux de Cold Lake. Le 14 mai 2008, les Cris de Beaver Lake ont émis la déclaration de Kétuskéno, laquelle confirme leur rôle en tant que protecteurs des territoires formant leurs terres ancestrales. Ils y affirment qu'en tant que protecteurs du territoire, ils partageront ce territoire avec tous ceux qui respecteront leurs obligations et leurs droits traditionnels, constitutionnels ainsi que leurs droits issus de traités.

Les Premières Nations doivent avoir un véritable mot à dire sur l'issu des futurs développements de leurs terres ancestrales. Les Cris de Beaver Lake soutiennent avec justesse que le gouvernement fédéral et le gouvernement de l'Alberta doivent s'acquitter de leur responsabilité d'assurer une consultation en profondeur et d'être ouverts à l'accommodement. Plus particulièrement, l'effet cumulatif de l'exploitation gazifière, pétrolière et des sables bitumineux sur les territoires ancestraux de la nation de Beaver Creek menace son mode d'existence, transgresse ses droits et l'empêche de s'acquitter de ses obligations.

Les Cris de Beaver Lake ont entamé cette poursuite il y a quatre ans. Les deux niveaux de gouvernements ont tenté de faire rejeter leur requête. Le gouvernement de l'Alberta a prétendu que l'action était « frivole, vexatoire et un abus de procédure ». Le gouvernement fédéral a même soutenu qu'il ne devrait pas être appelé à témoigner en tant que défendant, tentant de se laver les mains de ses obligations fiduciaires envers les Cris de Beaver Lake et continuant d'agir comme si le polygone de tir de Cold Lake n'était pas sur le territoire de Beaver Lake.

Le gouvernement albertain soutient que vis-à-vis les Premières Nations, les organismes de réglementation ne sont pas tenus de s'acquitter de leur responsabilité de consulter et d'accommoder les peuples autochtones. Il a plus ou moins dit aux Premières Nations : Si vous n'êtes pas contents, nous nous reverrons devant les tribunaux, puisque nous avons des fonds illimités pour ce genre de recours. Le gouvernement a déclaré aux tribunaux : Il n'est pas approprié de remettre intégralement en question la procédure permettant à la Couronne de prendre des décisions et de tenter de faire en sorte que ces décisions soient déclarées nulles. Plusieurs raisons politiques empêchent les tribunaux d'empiéter sur la juridiction exclusive d'un décideur, d'une commission ou d'un tribunal prescrits par la loi. »

L'Alberta a fait valoir que seule une demande en dommages- intérêts après le fait pourrait être plaidée. En d'autres mots, si la nation crie peut prouver qu'à partir de la date de sa réclamation, les effets cumulatifs de l'exploitation des ressources sur ses territoires ont, de façon injustifiable, transgressé ses droits, elle pourra demander une compensation. Ainsi, le droit de décider reviendrait exclusivement au ministre ou au Cabinet, qui peuvent ainsi tout détruire à volonté, sans que personne ne puisse les en empêcher.

Madame la juge B.A. Brown de la Cour de l'Alberta a rejeté ces allégations. Elle a soutenu le droit des Premières Nations de contester l'exploitation des ressources sur leurs terres ancestrales ainsi que les effets cumulatifs de ces activités sur les droits issus de traités et protégés par la constitution. Donc, après quatre ans, cette cause se fera enfin entendue.

Par cette prise de position, les Cris de Beaver Lake défendent les intérêts de tous, sauf des monopoles privés et des gouvernements qu'ils contrôlent. Le pouvoir économique et politique se trouve de plus en plus concentré entre les mains de quelques-uns et sert à imposer les intérêts des investisseurs mondiaux. Les Canadiens veulent avoir un mot à dire et le droit de décider afin que l'économie puisse être développée de façon indépendante et intégrale.

Alors que le peuple exige un pouvoir de prise de décisions, le gouvernement Harper et celui de Redford adoptent des lois qui annulent les lois environnementales ainsi que le processus d'audiences et d'approbation qui sont là pour garantir une certaine participation et une certaine consultation publiques. Le fait d'accorder aux monopoles mondiaux de l'extraction des ressources un droit de monopole sans restriction leur permettant de piller les ressources naturelles et de les exporter pour un profit le plus rapidement possible transgresse les droits des Canadiens et des Premières Nations, en plus d'avoir des répercussions très négatives sur la Terre Mère.

Des projets comme l'oléoduc Northern Gateway ainsi que les graves conséquences de l'intensification présente et à venir de l'exploitation des sables bitumineux soulèvent de sérieuses questions sur la direction de l'économie. Ils touchent aussi à des questions telles la souveraineté des Premières Nations, les préoccupations environnementales, la santé et la sécurité publiques ainsi que l'incidence de l'exportation massive du bitume brut. De surcroît, ces monopoles mondiaux mènent une offensive inlassable contre les conditions de travail et de vie des travailleurs qui transforment les richesses de la Terre Mère.

C'est une question de droits et surtout, du droit de décider. Cette lutte mérite l'appui de tous car notre sécurité est dans la lutte pour les droits de tous !

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L'affirmation des droits ancestraux,
issus des traités et constitutionnels

La déclaration de Kétuskéno émise en 2008 par les Cris de Beaver Lake affirme que les droits qui appartiennent à la nation crie sont des droits ancestraux, issus des traités et constitutionnels. Les droits traditionnels ou droits ancestraux sont des droits inaliénables qui appartiennent aux peuples autochtones du fait qu'ils sont des peuples autochtones. Ils ne peuvent être donnés ou enlevés par un quelconque pouvoir. La reconnaissance des droits ancestraux exige nécessairement la reconnaissance de la souveraineté des nations autochtones et de leur droit à l'existence.

Les droits constitutionnels sont des droits énoncés dans la Loi constitutionnelle de 1982. La loi déclare : « Les droits existants — ancestraux ou issus de traités — des peuples autochtones du Canada sont reconnus et confirmés. » Il est de plus défini que « les droits issus de traités » doivent inclure les droits qui existent maintenant suite aux ententes sur les revendications territoriales.

Les droits issus des traités sont des droits reconnus dans les traités signés entre les peuples autochtones souverains et la Couronne. Les traités sont des ententes de paix et d'amitié qui permettent l'existence de deux systèmes de loi et de gouvernance où chaque partie respecte l'autorité de l'autre.

Le traité 6 et les autres « traités numérotés » sont considérés par l'État canadien comme des traités dans lesquels des territoires sont cédés. Cette prétention s'est avérée tout à fait sans fondement. La tradition orale du peuple cri et des autres nations qui ont signé le traité 6 prouve que les traités ne sont pas des traités par lesquels des territoires ont été cédés, mais des ententes pour partager le territoire. Les traités ont été conclus sur la prémisse que les peuples autochtones vont maintenir le contrôle de leur mode d'existence. C'est exprimé comme une entente entre nations souveraines pour vivre en paix et en amitié aussi longtemps que le soleil brille et que les rivières coulent.

Les lois et la forme de gouvernance des Cris ne permettent pas l'usage de pouvoirs arbitraires ou exécutifs dans les institutions démocratiques canadiennes. Même si un chef est sous la contrainte d'accepter quelque chose qui est contraire aux lois de son peuple et qui n'a pas été approuvé comme l'exigent les lois de sa nation, cela n'a aucun statut juridique.

Les traités n'éliminent pas les droits et responsabilités des peuples autochtones en tant que gardiens du territoire. De plus, les dispositions telles que le droit de continuer de chasser, pêcher et piéger sur leurs territoires confirment le droit à leur fondement économique, tout comme les vieilles ententes à propos d'une « une trousse médicinale » qui suggèrent la responsabilité d'offrir des soins de santé modernes. Aussi lit-on dans la déclaration de Kétuskéno : « Nous, les gardiens du territoire, allons le partager avec ceux qui respectent nos obligations et nos droits traditionnels, constitutionnels et issus des traités. »

Pour les intérêts privés des monopoles tels que les immenses cartels pétroliers avant tout étrangers et les gouvernements à leur service, les droits des Premières Nations et des peuples métis sont un obstacle à l'exploitation effrénée des ressources naturelles du Canada. Par le biais du projet de loi C-27 et de neuf autres projets de loi, la dictature Harper cherche à éliminer ces droits ancestraux en violation des traités conclus entre les Premières Nations et la Couronne, et reconnus par le droit international.

Depuis 1990, lorsque Elijah Harper a tenu la plume d'aigle à la défense des droits des autochtones à l'assemblée législative du Manitoba et a bloqué l'Accord du lac Meech, les gouvernements fédéraux qui se sont succédés ont déclaré que c'est « business as usual ». Ce refus de renouveler la démocratie a aggravé la crise politique. Les peuples autochtones et les peuples du Canada et du Québec exigent leurs droits. En concentrant le pouvoir entre les mains de l'exécutif, la dictature Harper veut poursuivre l'annexion du Canada aux États-Unis d'Amérique du Nord, menaçant l'existence même du Canada en tant que nation.

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Note aux lecteurs

Joyeuses fêtes et nos meilleurs voeux
pour la Nouvelle Année

Avec ce numéro nous suspendons la publication du Marxiste-Léniniste jusqu'au 14 janvier 2013. Nous vous invitons à regarder le reportage photo de l'année 2012: «Année de résistance et organisation» et les nouvelles qui seront affichées sur le site à l'occasion.

À l'occasion du Nouvel An, nous vous souhaitons de joyeuses fêtes en toute sécurité et du succès dans ce que vous entreprendrez en 2013. Ce sera une année importante pour faire des progrès décisifs dans la lutte pour faire valoir les droits de la classe ouvrière et du peuple. La dictature Harper et les gouvernements à tous les niveaux accélèrent l'offensive antisociale brutale pour démanteler tous les arrangements d'État qui reconnaissent le droit public. À l'échelle internationale, le gouvernement Harper continue de favoriser la guerre aux dépens de la résolution des conflits sur la base de négociations et par la voix pacifique. Pour la classe ouvrière et le peuple, le droit le plus important est le droit de participer aux prises de décisions qui les affectent pour s'assurer que la crise soit résolue en leur faveur. La lutte pour renouveler le processus démocratique et moderniser les arrangements constitutionnels du Canada est au centre de l'effort pour ouvrir la voie au progrès de la société et Le Marxiste-Léniniste continuera de développer les forums politiques nécessaires.

En 2013 nous continuerons de compter sur vos rapports, photographies, articles, réseaux de distribution et contributions financières.

Prière de vous assurer que vos chèques ou mandats soient à l'ordre du Parti marxiste-léniniste du Canada, boîte postale 666, succursale «C», Montréal, QC H2L 4K4. La contribution maximale à un parti politique autorisée par la loi en une année civile est de 1 200$. Toutes les contributions aident. Un reçu est émis pour les contributions de plus de 20$. Vous avez droit à un crédit d'impôt fédéral de 75% du premier 400$ à concurrence de 300$, de 50% de la prochaine tranche de 350$ à concurrence de 475$ et de 33,3% de toute somme dépassant 750$ à concurrence de 1 200$, pour un crédit maximum de 624,99$.

Nos salutations communistes
Équipe rédactionnelle et technique
Le Marxiste-Léniniste
25 décembre 2012

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