Listes noires et procès secrets

Joignez-vous à la campagne d'Abousfian Abdelrazik pour la justice contre les listes NOIRES!


Manifestation à Montréal en appui à Abousfian Abdelrazik le 11 décembre 2010, à l'occasion de la Journée
internationale des droits de l'homme.

Profilé, placé sous surveillance, emprisonné, torturé, exilé, et mis sur une liste noire, l'histoire d'Abousfian se lit comme une revue des outils orwelliens de la « guerre au terrorisme ». Et il n'est toujours pas libre des chaînes qui lui ont été imposées par l'État canadien et ses partenaires, la dictature soudanaise et le Conseil de sécurité de l'ONU anti-démocratique. Abdelrazik demeure sur une liste noire internationale et continue de vivre sous les sanctions qui gèlent ses avoirs et rendent illégal pour tout citoyen canadien de lui donner de l'argent (que ce soit un cadeau, un prêt ou un salaire).


Abousfian Abdelrazik est accueilli à son retour au Canada
par des parents et amis le 27 juin 2009.

Pendant un an et demi, depuis le retour d'Abdelrazik à Montréal en juin 2009, le projet Retour au bercail et ses alliéEs ont focussé sur le pouvoir et la responsabilité du gouvernement du Canada d'arrêter d'appliquer des sanctions à Abdelrazik et de se retirer du régime de la liste noire du Conseil de sécurité. Nous avons organisé des rassemblements et des marches, rencontré les trois partis d'opposition, organisé des campagnes de lobbying, organisé des événements publics d'information et une tournée de conférences pan-canadienne, répondu à la désinformation du gouvernement, coordonné la campagne Pour un travail juste avec les syndicats, organisé un téléthon anti-sanctions et plus. Abdelrazik aussi conteste, devant la Cour fédérale, la loi imposant le régime 1267 aux CanadienNEs.

Nous entrons maintenant dans une nouvelle phase de notre campagne de solidarité.

Le 25 janvier 2011, Abdelrazik a soumis une application pour être enlevé de la liste du « Comité 1267 » (essentiellement le Conseil de sécurité de l'ONU) à le nouveau bureau du Médiateur. Ceci enclenche un processus de révision qui peut durer entre six et dix mois. Ce qui veut dire qu'Abdelrazik va recevoir une réponse à sa demande d'être libéré entre le 25 juillet 2011 et le 25 novembre 2011 (dans moins de cinq à neuf mois).

Qu'est-ce que le Médiateur ? Face aux nombreuses critiques de son régime de liste noire, le Conseil de sécurité a entamé un exercice pour améliorer l'image de la liste 1267, créant en décembre 2009 un mécanisme de Médiateur pour recevoir les demandes d'individus voulant être retirés de la liste. La première personne nommée à ce poste, l'ancienne juge canadienne Kimberly Prost, fut annoncée le 7 juin 2010 - le même jour où Abdelrazik a déposé sa contestation constitutionnelle de la liste noire devant les tribunaux canadiens.

Le bureau du Médiateur ne représente aucun vrai changement dans le processus pour être retiré de la liste du régime 1267. En fait, le Médiateur n'est rien d'autre qu'un assistant à la recherche, chargé de recueillir de l'information et d'écrire un rapport. (Lisez le mandat vous-mêmes : http ://daccess- dds-ny.un.org/doc/UNDOC/GEN/N09/656/63/PDF/N0965663.pdf ?OpenElement - voir l'Article 20 et l'Annexe II.)

Son mandat ne lui confère aucun pouvoir significatif sur le résultat d'une demande d'être retiré de la liste, pas même le pouvoir de faire des recommandations. La décision d'approuver ou de rejeter une demande d'être retiré de la liste revient finalement à l'entière discrétion des quinze États qui sont membres du Conseil de sécurité, et dont n'importe lequel d'entre eux peut apposer son veto pour s'opposer à une telle demande sans devoir se conformer à aucune norme et sans obligation de donner une quelconque raison. Plus grave encore, la base de cette liste est aussi problématique qu'avant : le concept élastique d'« association » avec le « bonhomme sept-heures » favori de la « guerre au terrorisme ». En d'autres mots, le processus pour être retiré de la liste demeure l'esclave des considérations politiques des États qui ne respectent pas la vie humaine.

Ceci veut dire qu'il est important, même crucial, au succès de la demande d'Abdelrazik d'être retiré de la liste de s'impliquer durant les cinq à neuf prochains mois en : mettant autant de pression que possible pour soutenir la demande d'Abdelrazik et de publiquement dénoncer l'injustice et les dangers de ce régime.

Nous demandons à nos alliéEs partout de se joindre à nos efforts, par les moyens qu'ils sont les mieux placés pour utiliser.

Pour commencer, deux très petites étapes :

* Entre le 14 et le 25 mars, SVP contactez votre député local ou, s'il ne se laisse pas convaincre, les porte-parole en matière d'Affaires étrangères des trois partis d'opposition en leur demandant d'endosser une courte déclaration contre la liste 1267. Tous les détails nécessaires se retrouvent ci-dessous.

* SVP joignez-vous à notre groupe facebook, Abdelrazik - Project Fly Home, pour rester en contact au cours des prochains mois. Nous voyons ce geste comme une façon de délibérément et publiquement S'ASSOCIER AVEC ABDELRAZIK, un petit geste pour contrer la peur, l'isolement et le contrôle que visent à créer ces régimes de listes noires.

C'est notre espoir et nous croyons que tous nos efforts ces prochains mois pourront aider à obtenir la liberté et la justice pour Abdelrazik, malgré les énormes pouvoirs auxquels nous sommes confrontés. Nous le faisons pour nous battre pour notre liberté. Nous n'avons rien à perdre, que nos chaînes !

Projet Retour au Bercail
www.commissionpopulaire.org/fr/abdelrazik

* * *

Entre le 14 et le 25 mars, SVP contactez votre député local ou, s'il ne se laisse pas convaincre, les porte-parole en matière d'Affaires étrangères des trois partis d'opposition en leur demandant d'endosser cette courte déclaration contre la liste 1267 :

Le Conseil de sécurité de l'ONU impose un gel des avoirs et une interdiction de vol international aux individus dont le nom a été placé sur sa « Liste 1267 ». Les procédures pour inclure un nom ou l'exclure de cette liste ne respectent pas les standards d'équité procédurale et de justice naturelle, pourtant fondamentaux dans un contexte d'État de droit. Le régime imposé par la liste 1267 - ainsi que le « Règlement d'application des résolutions des Nations unies sur Al-Qaïda et le Taliban » qui met en application ce régime au Canada — viole les droits à la liberté et à la sécurité ainsi que la liberté d'association.

Le SCRS et la GRC ont blanchi Abousfian Abdelrazik de tout soupçon d'activité criminelle en novembre 2007. C'est appuyé de cette certitude que le Canada a supporté les requêtes de M. Abdelrazik pour être retiré de cette Liste 1267.

Je demande au ministre des Affaires étrangères d'immédiatement : 1) lever les sanctions contre M. Abdelrazik (une chose que le précédent gouvernement a déjà fait dans le cas de M. Liban Hussein en 2002) ; 2) contacter tous les ambassades des membres du Conseil de sécurité des Nations Unies pour les informer que le retrait du nom de M. Abelrazik de la liste 1267 est une priorité diplomatique pour le Canada ; et 3) révoquer le règlement anticonstitutionnel « sur Al-Qaïda et le Taliban », crée par un Décret du conseil.

* Les coordonnées de votre député fédéral :
www.parl.gc.ca/common/index.asp ?Language=F

* Les porte-paroles en matière d'affaires étrangères :

Paul Dewar, NDP, Dewar.P@parl.gc.ca, (613) 996-5322
Jean Dorion, Bloc, Dorion.J@parl.gc.ca, (613) 992-8514
Bob Rae, Liberal, Rae.B@parl.gc.ca, (613) 992-5234

* Pour vous aider à les convaincre, vous pouvez leur envoyer par courriel notre document de mise en contexte de la Liste 1267 (www.commissionpopulaire.org/fr/1267.php) ainsi que deux récents rapports d'organisations se préoccupant des droits humains que vous trouverez sur notre site Internet (www.commissionpopulaire.org/fr/abdelrazik/secret.php. Il s'agit de "The U.N. Security Council's 1267 Regime and the Rule of Law in Canada » produit par la BCCLA et de "Blacklisted" du Centre européen sur les Droits humains et constitutionnels (ECCHR).

SVP faites-nous parvenir la réponse de votre député local à cette adresse : projectflyhome@gmail.com.

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Le gouvernement soutient qu'il n'a pas à
être de bonne foi lors des audiences secrètes

Mohamed Harkat, un réfugié algérien détenu au Canada sur la base d'allégations secrètes qu'il n'a pas le droit de voir, depuis le 10 décembre 2002, a reçu de mauvaises nouvelles le mois dernier, lorsque le juge de la Cour fédérale, Simon Noël, a enclenché le processus de sa déportation vers la torture.

Le juge Noël maintient le certificat de sécurité contre Mohamed Harkat sur la base d'allégations secrètes sans fondements, ainsi que de « résumés » produits par le SCRS de supposées conversations téléphoniques datant de plus de dix ans, dont les originaux, s'ils ont jamais existé, ont été détruits depuis longtemps. (Les certificats de sécurité permettent au gouvernement, en utilisant les normes de preuves les plus basses, de détenir de façon indéfinie des immigrants et des réfugiés sur la base d'allégations secrètes ainsi que d'informations inadmissibles en justice, dans le but ultime de les déporter — habituellement vers la torture). Le juge a aussi fait une constatation défavorable contre Mohamed Harkat qui contredisait complètement la décision d'un autre juge rendue l'an dernier sur la même question mais un cas de sécurité séparé.[1]

Des notes de bas de page secrètes

Comme pour justifier le secret de la condamnation de Mohamed Harkat, le juge Noël a depuis publié plusieurs notes de bas de page « top secrètes », nouvelles et caviardées sur ce jugement qui, selon les avocats du gouvernement, mettraient en péril la sécurité nationale si elles étaient publiées. Leur disponibilité récente n'a pas fait tomber le ciel sur nos têtes, mais quiconque est intéressé à les lire découvrira que la chose la plus dangereuse à leur propos est la quantité d'encre utilisée pour imprimer page après page de larges blocs noirs pour garder secret ce qui se trouve en dessous, ponctués seulement de temps en temps par un mot ou deux. La page 7, par exemple, est incroyablement utile. Sous le chapitre « Armes », pas un seul mot, seulement beaucoup d'encre noire. Sous la section « Afghanistan », on ne peut lire que : « Harkat nie être allé en Afghanistan », suivi d'un tiers de page d'encre noire. La section « Ressources financières » est un autre grand bloc d'encre noire suivi de la phrase éclairante du juge Noël qui se lit : « Sur la base de ces informations, la Cour conclut que Harkat avait d'autres ressources financières à sa disposition au Pakistan ». Les pages 13 et 14 sont entièrement caviardées.

Et les choses ne font qu'empirer dans un document distinct, version expurgée d'une annexe anciennement « top secret » de ce jugement.

Aucun devoir de franchise et de bonne foi

Ce qui est révélé dans cette annexe est vraiment troublant, car est discutée une motion présentée par les avocats spéciaux (des avocats qui ont la plus haute cote de sécurité) qui ont fait valoir que les ministres du gouvernement qui ont déposé le certificat de sécurité « avaient manqué à leur devoir de franchise et bonne foi absolue, car ils n'ont pas fait leurs meilleurs efforts pour recueillir l'information pour la Cour afin que celle-ci puisse arriver à une décision éclairée ». (Pour ceux qui ne connaissent pas le terme, « franchise » signifie « la qualité d'être ouvert et honnête ; franchise, l'équité ; impartialité »)

Que les avocats spéciaux aient déposé une telle motion n'a rien de surprenant. Le SCRS, l'agence d'espionnage derrière les certificats, a une longue histoire de ne pas fournir toutes les informations dans son dossier dans les chambres secrètes où les audiences secrètes se tiennent. Cela comprend retenir des informations qui seraient favorables à la personne visée, comme ne pas dire aux juges que leurs informateurs ont échoué leur test au détecteur de mensonges et utiliser des informations obtenues sous la torture.

En effet, dans un jugement précédent en 2010 dans l'affaire Harkat, le juge Noël a écrit que de tels comportements et « l'incapacité du SCRS, et de ses témoins, d'agir en conformité avec l'obligation de bonne foi absolue ont porté atteinte à l'intégrité de la procédure de cette Cour .... La preuve d'une omission de divulguer des preuves pertinentes qui peuvent affecter négativement la décision de la Cour quant à la fiabilité d'une source humaine a été faite devant la Cour.... de l'information déposée par les ministres pour soutenir le certificat a été ‘filtrée' et que les promesses faites à la Cour n'ont pas été remplies. »

Pendant que sont en jeu la vie et la liberté d'une personne, le gouvernement a essayé d'en passer une petite vite et il s'est fait prendre. Le plus remarquable est que le juge Noël lui a permis de s'essayer encore et que la deuxième fois il l'a cru, même s'il n'avait aucun moyen de savoir si le SCRS et les ministres disaient vraiment la vérité cette fois-là. Pourtant, comme nous l'avons appris dans un jugement de la Cour fédérale de décembre dernier dans une autre affaire de certificat de sécurité, le SCRS, qui avait reçu l'ordre de cesser d'écouter les communications entre l'avocat et son client dans cette affaire, a continué de le faire pendant deux ans au mépris manifeste de l'ordre de la cour. Par quelle magie le juge Noël a-t-il pu en arriver à la conclusion que le SCRS et ses laquais n'étaient pas en train de lui en passer une autre et ne continuaient pas d'agir de manière illégale et malhonnête ?

Il y a quelques années, la Cour suprême du Canada a statué que le devoir de franchise et de bonne foi absolue était particulièrement important lors des audiences secrètes (notez le contresens), parce que la personne qui n'était pas dans la salle ne pouvait pas se défendre elle-même. Mais selon l'annexe rendue publique dans l'affaire Harkat, en réponse à la motion de l'avocat spécial disant que cette bonne foi faisait manifestement défaut, « les ministres ont répondu que le devoir bonne foi absolue ne s'applique pas à la procédure des certificats de sécurité ».

Un aller simple vers la torture

Noël dit que tout cela importe peu puisque, à son avis, les ministres lui ont fourni suffisamment d'information pour condamner Mohamed Harkat in absentia. Par conséquent, il écrit qu'il ne souhaite pas « se prononcer quant à la portée du devoir de bonne foi » lors des audiences secrètes, une déclaration qui laisse supposer qu'il y a une marge de manoeuvre pour justifier, par exemple, 50 %, voire 30 % de bonne foi au lieu des 100 % à laquelle on est en droit de s'attendre. Son approche particulièrement sévère envers Mohamed Harkat, surtout après les malversations du gouvernement, en dit long, encore une fois, sur l'injustice inhérente et le danger des audiences secrètes : le manque de transparence fait qu'il nous est impossible de savoir exactement ce qui s'est passé et, en conséquence, Mohamed Harkat se voit remettre un billet aller simple vers la torture à moins que les gens à travers le continent n'interviennent et ne manifestent leur opposition.

Cette intervention, pour commencer, serait d'ajouter votre nom à la liste de ceux qui condamnent les procès secrets au Canada à : www.harkatstatement.com où vous pouvez signer la déclaration en ligne contre les procès secrets au Canada.

Campagne pour arrêter les procès secrets au Canada, PO Box 2020, 57 rue Foster, Perth, ON K7H 1R0

Note

1. Homesnotbombs.blogspot.com/2010/12/harkat-condemed-by-secret-allegations.html

(Traduction : LML)

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Mohamed Harkat reçoit un ordre de déportation

Mohamed Harkat a reçu un ordre formel de déportation le vendredi 21 janvier. L'avocat de M. Harkat, Matthew Webber, a dit vendredi avoir reçu un avis d'intention pour demander l'opinion du ministre de la Sécurité publique Vic Toews à savoir si M. Harkat doit être déporté sous la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés. Selon la section 115 de la loi, le ministre peut décider de ne pas permettre à un individu de demeurer au Canada avec le statut de réfugié s'il croit que l'individu constitue un danger pour le public ou pour la sécurité du pays.

L'ordre a été déposé après que le juge de la Cour fédérale Simon Noel ait rendu trois jugements le 9 décembre concernant le caractère raisonnable du certificat de sécurité contre M. Harkat. Les jugements sont entièrement basés sur la « croyance probable » et sur de l'information et des renseignements secrets « ne pouvant être admis dans le système » de justice mis de l'avant lors d'audiences secrètes et que personne ne peut jamais voir, particulièrement Mohamed Harkat et ses avocats. Les avocats de M. Harkat arguent que la majeure partie de la preuve consultée par le juge Noel pour évaluer la validité du certificat contre Harkat demeure secrète et n'a jamis été testée en contre-interrogatoire. Le juge Noel a rejeté une demande de la défense pour faire déclarer inconstitutionnel le processus de certificat de sécurité, et une autre pour un arrêt des procédures à cause de la façon dont on a traité la preuve. Un des avocats de Harkat a dit qu'il n'a reçu aucune assurance du gouvernement fédéral que celui-ci ne serait pas expulsé du pays. « Je n'ai reçu aucune assurance de la part de l'Agence canadienne des services frontaliers, mais un pays qui respecte la procédure légale et possède une charte des droits n'expulse pas quelqu'un vers des dangers possibles alors qu'il est en appel, » a-t-il dit. « Nous avons une longue route de litige devant nous. On parle ici d'années. Si nous ne l'emportons pas devant la Cour d'appel fédérale, nous mettrons tout en oeuvre pour présenter cette cause devant la Cour sûprême ».

Le jugement de la Cour fédérale vise à enchâsser dans la loi le système moyenâgeux de certificats de sécurité. Le peuple canadien dénonce les certificats de sécurité et exige qu'ils abolis parce qu'ils violent les droits humains et les droits de collectifs entiers, garantissant l'impunité pour les abus de pouvoir par les organes de répression d'État et de la police politique, en particulier ceux du Service canadien du renseignement de sécurité. En février 2008, le gouvernement canadien a été forcé d'amender la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés ainsi que le certificat de sécurité, mais a remplacé une loi injuste par une autre loi injuste, avec l'introduction des défenseurs spéciaux. L'opposition aux certificats de sécurité et à la menace de déportation de Harkat se poursuit, devant les tribunaux, au moyen de pétitions, de manifestations et autres actions.

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Bulletin du 14 mars 2011 • Retour à l'index • Écrivez à: redaction@cpcml.ca