Le Marxiste-Léniniste

Numéro 87 - 18 mai 2010

Trentième anniversaire du soulèvement
populaire de Gwangju
 
207e anniversaire du Jour du drapeau haïtien

Trentième anniversaire du soulèvement populaire de Gwangju
207e anniversaire du Jour du drapeau en Haïti

Haïti
L'«aide» du Canada pour l'ordre public en Haïti
Une manifestation pour réclamer la démission du président Préval
Un attrape-rêves: Le rôle de Cuba en Haïti - Réseau canadien pour Cuba
La démocratie à l'intérieur de la zone sinistrée d'Haïti: «Nous voulons que nos voix soient entendues» - Laura Flynn, HaitiAction.net

Accueil | Archives | English

Corée

Trentième anniversaire du soulèvement
populaire de Gwangju

C'est aujourd'hui le trentième anniversaire de l'héroïque soulèvement populaire de Gwangju qui s'est déroulé dans la ville de Gwangju en Corée du sud du 18 au 28 mai 1980. Cet anniversaire important est commémoré en Corée et dans d'autres pays.

Le soulèvement populaire de Gwangju a été une action révolutionnaire glorieuse dans le mouvement d'opposition à la dictature militaire brutale du général Chun Doo-hwan, qui avait été placé au pouvoir par un coup d'État militaire orchestré par les États-Unis, après avoir renversé le gouvernement du président Choi Kyu-hah et imposé la loi martiale en Corée du sud en mai 1980.

Selon des reportages et des témoins oculaires, le soulèvement de Gwangju a commencé par les manifestations des étudiants au matin du 18 mai qui défiaient le décret militaire qui ordonnait la fermeture des universités et la répression de toute dissidence politique. Les forces policières furent incapables de contenir la résistance organisée et on a alors fait appel à des unités spéciales entraînées pour des opérations d'assaut contre les soulèvements. Les unités spéciales usèrent de gaz lacrymogènes, de matraques et de balles de caoutchouc pour essayer de réprimer la révolte mais les travailleurs, les petits commerçants et les parents descendirent dans la rue pour défendre leurs enfants. Les militaires ouvrirent le feu, faisant 200 morts et des centaines de blessés.


Gwangju, Corée, le 18 mai 1980: Des soldats sont déployés contre le peuple
pour réprimer le soulèvement démocratique
.

Le 20 mai, près de 10 000 personnes manifestèrent à Gwangju. Dans le contexte de la militarisation avancée de la société, c'était la coutume dans la plupart des grandes entreprises de Corée du sud que d'avoir des caches d'armes. Les manifestants saisirent ces armes, des autobus, des taxis et même des voitures blindées appartenant au personnel et formèrent des milices armées pour combattre l'armée. Le 21 mai, les unités spéciales battirent en retraite et la ville tomba aux mains des résidents.

Les cinq jours qui ont suivirent furent sans pareil dans l'histoire la Corée du sud. Les gens se regroupèrent en comités de citoyens pour assurer le bien-être et la sécurité de tous. Les comités se chargèrent de la distribution de nourriture, des soins médicaux et du transport en commun et organisèrent des discussions politiques vivantes où les gens se rassemblaient pour discuter de leur avenir et de leur opposition à l'occupation américaine et à la dictature militaire.

Le 24 mai, plus de 15 000 personnes prirent part à un service funèbre à la mémoire de ceux qui avaient été tués par les unités spéciales au début du soulèvement. Le 25 mai, près de 50 000 personnes réunies à Gwangju adoptèrent une résolution exigeant l'abolition de la loi martiale et la libération de Kim Dae Jung. (Il s'agit du même Kim qui est décédé en août 2009 et qui était à l'époque un prisonnier politique bien connu. Il est devenu plus tard le 8e président de la République de Corée et il a joué un rôle important dans l'établissement du dialogue nord-sud pour la réunification. Avec le dirigeant de la République démocratique populaire de Corée (RPDC) Kim Jong Il, il a été le cosignataire de l'historique Déclaration conjointe nord-sud du 15 Juin 2000 qui a inauguré une nouvelle période dans la lutte pour la réunification de la Corée.)

Le gouvernement américain sous la présidence Jimmy Carter intervint peu après ces événements parce que le soulèvement de Gwangju menaçait les intérêts stratégiques des États-Unis dans la péninsule coréenne et en Asie. Les États-Unis ordonnèrent au régime de Chun de faire venir des troupes de la zone démilitarisée (DMZ) qui sépare le nord et le sud pour réoccuper Gwangju. À 3 h 30 le 27 mai, l'armée se lança à l'assaut de Gwangju dans le cadre de l'« Opération vacances splendides ». La population de Gwangju résista vaillamment à cet acte de terreur d'État.

Des milliers de civils furent tués et près de 15 000 personnes furent blessées dans bataille. Plus de 1500 personnes furent faites prisonnières et plusieurs d'entre elles furent torturées. Sept personnes furent exécutées et 14 condamnées à vie pour s'être opposées à la dictature militaire appuyée par les États-Unis et pour avoir revendiqué leurs droits.

Le soulèvement de Gwangju a porté un coup décisif à l'impérialisme américain dans la péninsule coréenne et il a marqué un point tournant dans la lutte collective du peuple coréen pour affranchir la partie sud de sa nation de l'occupation militaire américaine.

Ce fut aussi un moment décisif pour le projet d'édification nationale du peuple coréen et sa lutte pour des réformes démocratiques et pour mettre fin aux dictatures militaires installées en succession par les États-Unis dans la partie sud.


Le monument de Gwangju, en Corée, dédié à ceux qui ont donné leur vie durant le soulèvement démocratique de mai 1980. (ChrisJlTrekEarth)

Le soulèvement populaire de Gwangju vit aujourd'hui dans la détermination du peuple coréen du nord et du sud à combattre les activités criminelles du gouvernement fantoche de Lee Myung Bak installé au pouvoir par les États-Unis, un gouvernement de trahison nationale qui continue d'imposer des mesures antidémocratiques régressives en Corée du Sud en utilisant notamment l'anticommuniste Loi sur la sécurité nationale pour criminaliser et persécuter les forces patriotiques et pro-réunification en Corée du sud. Le trentième anniversaire du soulèvement populaire de Gwangju sert de symbole dans les conditions d'aujourd'hui à toutes les forces combattantes de Corée et du monde unies dans la lutte pour débarrasser l'humanité une fois pour toutes de l'impérialisme anglo-américain.

En cette occasion du trentième anniversaire du soulèvement populaire de Gwangju, Le Marxiste-Léniniste appelle la classe ouvrière et le peuple à intensifier leur appui à la juste lutte de l'héroïque peuple coréen contre l'occupation militaire américaine de la Corée du sud, à s'opposer résolument au chantage nucléaire des États-Unis et à leurs provocations militaires contre la RPDC et à appuyer la lutte du peuple de Corée qui depuis plus de 60 ans combat pour réunifier par ses propres efforts, en toute indépendance et de manière pacifique, son pays divisé.

Saluons le trentième anniversaire du soulèvement populaire héroïque de Gwangju !
Troupes américaines, hors de Corée !

Haut de page


207e anniversaire du Jour du drapeau en Haïti

Le 18 mai 1803, les principaux chefs du peuple en révolte contre l'armée française à Saint-Domingue (aujourd'hui Haïti) furent convoqués au quartier général de l'Arcahaie par leur commandant, le général Jean-Jacques Dessalines. L'heure était grave. Il s'agissait ni plus ni moins de créer un signe de ralliement qui signifierait d'une part le détachement définitif de la France, d'autre part le rejet de tout ce qui, de près ou de loin, put rappeler l'asservissement d'Haïti. En présence de tous ses généraux, Jean-Jacques Dessalines se fit apporter un drapeau français et, d'un geste, en arracha violemment la couleur blanche. Une certaine Suzanne Flon cousit bout à bout les couleurs restantes, le


Toussaint L'Ouverture (à gauche) et Jean-Jacques Dessalines, chefs légendaires de la Révolution haïtienne.

bleu et le rouge, lesquelles, dans l'esprit de tous les assistants, devaient symboliser l'union des noirs et des mulâtres. Le drapeau haïtien était né.

Le drapeau haïtien et le Jour du drapeau représentent donc plus de 200 ans de luttes pour l'affirmation définitive de la souveraineté haïtienne. En 2010, le drapeau et ce qu'il représente prennent une importance toute particulière dans l'effort du peuple haïtien pour se remettre du tremblement de terre du 12 janvier à l'heure où les États-Unis, le Canada, la France et d'autres cherchent à tirer avantage de cette tragédie.

Haut de page


Haïti

L'«aide» du Canada pour l'ordre public en Haïti

Le 7 mai, le ministre des Affaires étrangères Lawrence Cannon a terminé sa visite de trois jours en Haïti, qui a été ponctuée par des annonces de différents projets qui seront financés par le gouvernement canadien. Étant donné que les soins de santé et de la reconstruction de logement restent les besoins les plus urgents du peuple haïtien, il faut noter que l'aide fournie à Haïti par le gouvernement du Canada concernent des mesures d'ordre public telles que les prisons, la police et le système judiciaire.

Le communiqué de presse du 7 mai du ministère des Affaires étrangères rapporte qu'« une contribution du gouvernement du Canada de 4,4 millions $ a été versée à l'Organisation internationale pour les migrations pour la construction de la prison de Croix-des-Bouquets ; un financement de 2,5 millions $ a également été accordé à Avocats sans frontières Canada pour un projet visant à accroître l'accès du peuple haïtien à la justice. [...]

« Le ministre Cannon a visité Jacmel et Léogâne, ainsi que Croix-

des-Bouquets, où la construction de la prison touche à sa fin. En plus d'appuyer la construction de la prison, le Canada s'est engagé à contribuer à rendre celle-ci opérationnelle grâce au déploiement d'agents du Service correctionnel du Canada, qui formeront et encadreront leurs homologues haïtiens. Le nouveau centre de détention de la région de Port-au-Prince aidera à réduire le surpeuplement et à améliorer la santé et la sécurité des prisonniers. »

Un communiqué de presse du 5 mai affirme que le gouvernement canadien « accroîtra son soutien aux institutions chargées de la justice et de la sécurité en Haïti, de 10 millions $ par rapport à la contribution de l'année dernière, ce qui fait un total de 25 millions $ ». Il cite également le ministre Cannon, qui affirme avec la plus grande condescendance : « Notre vision commune pour Haïti est celle d'un pays dont la reconstruction est fondée sur la sécurité, la souveraineté, la primauté du droit, la prospérité économique et l'égalité des chances. Ce n'est pas un objectif impossible à atteindre. Nous y arriverons grâce à un leadership du gouvernement d'Haïti, à un engagement à long terme et à une collaboration entre les donateurs. »

Le Marxiste-Léniniste dénonce « l'assistance » anti-peuple du Canada et la condescendance et le racisme exprimés par le ministre Cannon et le gouvernement canadien quand ils disent que le seul espoir de gouverne pour le peuple haïtien est de se ranger sous la tutelle des maîtres néo-coloniaux. En outre, ces institutions que le gouvernement du Canada finance sont précisément celles rejetées par le peuple haïtien, telle que la Police nationale haïtienne qui a été démantelée sous le gouvernement de Jean-Bertrand Aristide et ressuscitée après le putsch de 2004. La Police nationale haïtienne et les forces de maintien de la paix des Nations unies de la MINUSTAH (en collusion avec les ONG financées par le Canada) ont joué un rôle central dans la répression et l'emprisonnement des forces populaires, en particulier les partisans du président Aristide et les militants de Fanmi Lavalas, depuis le coup d'État orchestré par les États-Unis, le Canada et la France.

Loin de faire en sorte que l'aide canadienne à Haïti soit conforme au désir des Canadiens d'apporter une véritable aide humanitaire, le gouvernement canadien tente de poursuivre son programme annexionniste en Haïti sous le couvert de l'aide humanitaire en réponse au séisme du 12 janvier. Ça ne doit pas passer ! La classe ouvrière et le peuple savent par leur propre expérience comment les policiers et militaires sont utilisés pour réprimer les luttes du peuple et que les mesures d'ordre public ne peuvent résoudre aucun des problèmes sociaux ou économiques en faveur du peuple, que soit au Canada ou à l'étranger. Le Marxiste-Léniniste invite tous à intensifier et élargir le travail en appui au peuple haïtien.

Haut de page


Une manifestation pour réclamer
la démission du président Préval

Une manifestation populaire d'au moins 2 000 personnes a eu lieu le 10 mai devant les ruines du Palais national haïtien pour dénoncer l'inaction du président René Préval en réponse au séisme du 12 janvier et exiger sa démission immédiate. Selon les rapports des agences de presse, de nombreux Haïtiens estiment que, suite au tremblement de terre, le président se maintenait dans l'ombre, ce qui est inacceptable à la lumière de la gravité de la situation, et qu'il essaie maintenant d'utiliser la catastrophe pour prolonger son mandat. Les manifestants ont également demandé le retour du président démocratiquement élu Jean-Bertrand Aristide évincé par un coup d'État orchestré à l'étranger en 2004. La manifestation, appelée par près de 40 partis politiques et autres groupes d'opposition, a été accueillie avec des camions remplis de policiers anti-émeute qui ont lancé des gaz lacrymogènes, tandis qu'un hélicoptère de l'armée américaine survolait.

Lors d'une conférence la semaine dernière, Préval a assuré le public qu'il quitterait ses fonctions à la date prévue, le 14 mai 2011, exactement cinq ans après son investiture de 2006. « Je veux instaurer la stabilité dans ce pays », avait-il déclaré Préval.

Haïti doit tenir des élections présidentielles avant février 2011. Toutefois, le 10 mai un quorum de 29 députés au Sénat a voté en faveur du prolongement du mandat de Préval de 96 jours en raison de la situation d'urgence au pays. La Chambre basse composée de 99 sièges a approuvé la mesure la semaine précédente. Ceux qui s'opposent à la prolongation disent que tout report de vote est inconstitutionnel. Il convient de noter que, depuis le coup d'État de 2004 qui a renversé le président démocratiquement élu Jean-Bertrand Aristide, les partisans d'Aristide et son parti Fanmi Lavalas ont été écartés du processus électoral par des moyens bureaucratiques, sinon par la violence.

Une dépêche du 10 mai de la chaîne Al-Jazira souligne le grave problème auquel le peuple haïtien est confronté, à savoir que ceux qui veulent qu'il demeure un peuple subjugué veulent écarter toute possibilité de prise en main de son destin :

« [À compter de minuit le 10 mai,] toute la Chambre basse et un tiers du Sénat ne siègent plus parce que le tremblement de terre a empêché la tenu des élections législatives de février. "Le parlement cesse effectivement d'exister en tant que corps gouvernant et les gens dans la rue sont très préoccupés par cela", a dit Seb Walker d'Al Jazeera, de Port-au-Prince. "Cela concentre le pouvoir entre les mains du président et de la commission internationale mise en place avec l'ancien président américain Bill Clinton en tant que co-président. Les gens disent que cela signifie que le fonctionnement au jour le jour du pays est maintenant hors de leurs mains." »

La commission, qui comprend également le premier ministre haïtien Jean-Max Bellerive, supervisera la répartition des 9,9 milliards $ en argent étranger promis pour la reconstruction lors d'une conférence internationale des donateurs à la fin de mars. Ce montant est 40 % supérieur au PIB d'Haïti. Bon nombre des manifestants ont déclaré que Préval a vendu le pays aux puissances étrangères, alors que la Commission viole la souveraineté d'Haïti. « Préval devrait quitter le pouvoir et il doit être arrêté », dit Maxime Geffrard, un des manifestants. « C'est un traître parce qu'il veut vendre le pays aux étrangers. »

Claudy Louis, un enseignant de 29 ans, a déclaré : « Préval a utilisé la tragédie que notre pays a traversée et l'a transformée en une opportunité pour lui-même. Au lieu de s'occuper du peuple, il a rapidement concocté un plan au profit du petit groupe de personnes autour de lui, la bourgeoisie. »

(Press TV, Al Jazeera. Associated Press)

Haut de page


Un attrape-rêves: Le rôle de Cuba en Haïti


La Havane, Cuba, le 5 mai 2010: Raciel Proenxa Rodríguez (deuxième de la gauche) et Isaac Saney (deuxième de la droite).

Le 5 mai 2010, une émouvante cérémonie avait lieu à La Havane, Cuba, pour marquer le succès de la campagne du Réseau canadien pour Cuba (RCC) en faveur de Haïti. En réponse à la catastrophe du tremblement de terre, la campagne, lancée en janvier 2010, a récolté à ce jour près de 100 000 $ pour soutenir l'oeuvre de la brigade médicale cubaine Henry-Reeves en Haïti. Participant à l'événement, qui s'est tenu au siège de l'Institut cubain d'amitié avec les peuples (ICAP), il y avait Raciel Proenxa Rodríguez, directeur pour la coopération économique, ministère du Commerce extérieur et de l'investissement, Isaac Saney, co-président et porte-parole national du RCC, les responsables de l'ICAP, les membres du mouvement de solidarité Canada-Cuba et des jeunes haïtiens étudiant à Cuba.

M. Proenxa a remercié le RCC pour sa contribution et a expliqué comment l'argent est utilisé. Au moment du tremblement de terre en Haïti, 402 internationalistes cubains, dont 302 du personnel médical, aidaient déjà les Haïtiens, a-t-il dit. Depuis le tremblement de terre le personnel attaché à la coopération cubaine est passé à 1 304 personnes, soit 679 Cubains et 625 diplômés et étudiants de 26 autres pays, formés et instruits gratuitement à l'École de médecine d'Amérique latine à Cuba. Il a noté en outre qu'en date du 4 mai 2010, 330 306 patients ont été traités et 8 428 chirurgies effectuées.

M. Proenxa a souligné que l'aide cubaine comprend plus que la simple fourniture de soins médicaux immédiats. Il a maintenant également mis l'accent sur le renforcement et la reconstruction du système de santé haïtien. À cette fin, les internationalistes médicaux et paramédicaux cubains travaillent dans 56 hôpitaux et centres de soins de santé et ils ont installé et équipé 30 salles où 85 401 patients ont été traités.

Au nom du RCC, Isaac Saney a souligné que non seulement la mission internationaliste cubaine aide-t-elle le peuple haïtien au moment où le besoin se fait le plus ressentir, mais elle témoigne de la grande générosité et de l'altruisme national de Cuba. À cet égard, le succès de la campagne de Cuba pour Haïti ne réside pas seulement dans le financement qui a été recueilli mais aussi dans la possibilité qu'elle offre de participer à un projet de solidarité vraiment humaine, a dit M. Saney. Il a rappelé qu'en 1998, lors d'une rencontre entre le premier ministre canadien d'alors Jean Chrétien et le président cubain Fidel Castro, le leader de la révolution cubaine avait proposé un projet conjoint de coopération Cuba-Canada pour reconstruire le système de santé haïtien. Cuba pourrait fournir le personnel et le Canada pourrait contribuer aux ressources matérielles nécessaires, avait expliqué Fidel Castro. Si Jean Chrétien n'a pas retenu la proposition, le RCC a décidé de la reprendre, a-t-il annoncé. La collecte de fonds pour Haïti par le biais de la mission internationaliste cubaine a été très chaleureusement reçue par les Canadiens. Même si elle a été boudée par les médias monopolistes canadiens, la campagne témoigne néanmoins de la confiance que le peuple canadien accorde à Cuba, a dit le représentant du réseau canadien. Il a souligné que certaines des contributions ont été données par des gens pour la simple raison que si l'argent qu'ils veulent donner à Haïti passe par Cuba, ils se sentent confiants qu'il atteindrait en toute sécurité sa destination et ne serait pas gaspillé dans la corruption ou le détournement de fonds. Cela montre le respect et l'admiration des Canadiens pour le peuple cubain et ses efforts pour construire et défendre une société centrée sur l'indépendance, la justice et la dignité humaine, a dit M. Saney.

Le co-président du RCC a conclu en présentant à M. Proenxa un attrape-rêves faits par les Mi'kmaq de la Nouvelle-Écosse. Il a noté que tout comme l'attrape-rêves, dédié à la brigade médicale Henry-Reeves, permet de conserver les bons rêves tout en détruisant les cauchemars, de même les missions internationalistes médicales et éducatives cubaines contribuent à ce que les cauchemars de la maladie et de l'analphabétisme n'atteignent pas les gens et montrent l'alternative qui permet aux gens de réaliser leurs aspirations les plus profondes, dont la conviction qu'un autre monde meilleur est possible.

Pour plus d'informations sur la campagne de Cuba pour Haïti du RCC, aller à www.canadiannetworkoncuba.ca ou pour faire une contribution, veuillez communiquer avec : CNC@canadiannetworkoncuba.ca. Pour contribuer directement, faire vos chèques à « Mackenzie-Papineau Memorial Fund », en indiquant sur le chèque « Cuba pour Haïti » et le poster à : Mackenzie-Papineau Memorial Fund & Friends of the Ma Pap (Int'l Brigades), Att : Sku S., 56 Terrasse Riverwood, Bolton, ON L7E 1S4.

Haut de page


La démocratie à l'intérieur de la zone sinistrée d'Haïti: «Nous voulons que nos voix soient entendues»

« Nous vivons dans la boue. Nous sommes mouillés et nous avons faim. Les autorités
nous ont laissé sans espoir. S'ils ont un plan, nous n'en savons rien. Nous nous posons
des questions à propos de notre avenir et nous voulons que nos voix soient entendues. »

– Suzette Janvier, une résidente de St-Martin (un quartier de Port-au-Prince) le 24 avril 2010

À chaque samedi depuis deux mois, plus d'un millier de survivants du séisme en Haïti se réunissent dans l'amphithéâtre de la Fondation Aristide pour la Démocratie (FAD) pour parler de l'avenir de leur pays. Depuis sa création en 1996, la Fondation Aristide, dont l'amphithéâtre peut accueillir jusqu'à 3 000 personnes, a donné un endroit où activistes et simples citoyens peuvent venir débattre et discuter des questions d'intérêt national. En réponse au séisme, la Fondation anime un forum public hebdomadaire dans lequel les participants peuvent raconter leurs histoires, parler de leurs conditions de vie et définir leurs besoins. Ils reçoivent aussi de l'information sur la situation actuelle, leurs droits selon la constitution haïtienne et les principes des Nations unies sur les personnes déplacées. Ensemble, les participants et les animateurs discutent des actions qui pourraient être prises pour que leurs voix soient entendues. Les forums ont attiré entre 900 et 1 500 participants ; la majorité vivant dans des habitations de fortune à l'intérieur de la zone sinistrée, comme la majorité des citoyens de Port-au-Prince. Des délégations provenant des autres régions du pays, particulièrement du sud et du sud-est (Jacmel et Les Cayes), qui eux aussi ont été durement touchés par le séisme.

Les participants aux forums ont offert des témoignages frappants à propos des conditions de vie à Port-au-Prince depuis le séisme. Depuis que les pluies ont commencé, plusieurs racontent comment ils passent la nuit en faisant du « domi pandeye » (dormir debout en équilibre), sous les feuilles de plastiques parce que l'eau inonde les tentes et qu'il n'y a pas assez d'espace pour permettre à tout le monde d'être à l'abri et de se coucher. Pendant la saison pluviale, il pleut chaque nuit et cette pluie s'intensifiera en mai. Le matin, le soleil est très fort, la chaleur sous les feuilles de plastiques – la seule chose qu'ils ont pour se protéger – est étouffante. Maintenant, ils vivent dans « labouye » (la boue) 24 heures par jour dans des camps où les toilettes extérieures et les autres installations sanitaires font gravement défaut.

Ils décrivent la lutte quotidienne pour nourrir leurs familles. Le prix des denrées alimentaires de bases (le riz, les fèves, la semoule de maïs, de l'huile à friture et du charbon pour cuire) ont augmenté de 15 à 30 % depuis le séisme, pendant que les revenus ont presque tous disparus. Seuls ceux qui reçoivent de l'argent de leur famille à l'étranger peuvent s'acheter de la nourriture. Pour ceux qui dépendent de l'aide internationale, trouver de la nourriture pour leurs familles est une quête sans fin. Des coupons pour la nourriture peuvent être distribués dans les camps une fois par semaine, par contre les distributions ne sont pas prévisibles et ils ne sont pas distribués à tout le monde. Les femmes qui réussissent à obtenir un coupon doivent se rendre à un camp différent, souvent très loin, et se mettre en ligne bien avant le lever du soleil. Si elles sont chanceuses, elles recevront un sac de riz de 50 livres vers midi, qu'elles doivent transporter là où elles vivent. La journée suivante, la lutte recommence, cette fois pour trouver de l'huile à friture : une journée à attendre pour des coupons en ligne et une autre pour se rendre à un camp différent de celui de la distribution de riz où l'huile est distribuée. Souvent, ces déplacements ne rapportent rien : il n'y a pas assez de coupons pour tout le monde, il n'y a plus de riz, le centre de distribution a été déplacé ou il n'ouvre pas pour des raisons de sécurité. De plus, avec les pluies, les sacs de riz deviennent humides et pourrissent.

Les participants décrivent avec horreur l'augmentation dramatique de la prostitution : des jeunes femmes et des jeunes filles vendent leurs corps pour pouvoir nourrir leurs familles.

Ils décrivent les conditions de vie extrêmes qui sont propices à des maladies infectieuses dans les camps. Chaque mercredi depuis le 10 mars 2010, la Fondation Aristide tient une clinique gratuite dans l'amphithéâtre de la Fondation qui fournit des soins de santé primaires à 1 200 personnes. Ce que les docteurs de la FAD voient et entendent des patients de la clinique confirment les témoignages des forums : un taux de maladie élevé causé par les conditions de vie dans lesquelles les gens vivent : malnutrition, la diarrhée chez les enfants, infections urinaires et autres infections.

La première revendication de ceux qui ont participé aux forums de la Fondation est des habitations temporaires dans des endroits sécuritaires et sanitaires. La deuxième est de la nourriture. Au-delà de cela, ils réclament des emplois, un accès à l'éducation, des services de santé et aussi des investissements dans l'agriculture pour la production de nourriture qui assurera un jour la sécurité alimentaire du pays. Cette dernière revendication est en dépit du fait que la plupart des participants proviennent de zones urbaines.

À la base de tout cela, les participants du forum demandent de participer à la planification d'un projet d'édification nationale, qui est la condition nécessaire au rétablissement du pays. Ceux qui se réunissent à la FAD se sentent, plus qu'auparavant, exclus de toute prise de décision.

Il n'y a eu aucune tentative de consultation des organisations locales d'Haïti, ou de les faire participer, dans la préparation de l'évaluation des besoins après désastre proposée par le gouvernement haïtien à la Conférence internationale des donateurs le 31 mars dernier. Le 27 mars, à la veille de la rencontre des donateurs, plus de 1 200 personnes se sont rencontrées à la FAD pour un débat pour déterminer la constitutionnalité de la création de la Commission intérimaire pour la reconstruction d'Haïti qui est dominée par des étrangers qui superviseront le financement international. Les participants au débat suivant étaient encore plus nombreux. Le débat portait sur le plan du gouvernement haïtien de prolonger son pouvoir d'urgence de 18 mois afin de permettre à la Commission intérimaire d'être crée et d'exercer des pouvoirs extra-constitutionnels. Mille quatre cents personnes étaient réunies et la plupart étaient profondément préoccupées par les effets que cette proposition pourrait avoir sur la souveraineté d'Haïti. Le débat a été suivi par trois jours de sit-in de 500 à 600 personnes au Parlement haïtien pour manifester contre l'adoption de cette loi.

En plus de préparer le plan et de créer la Commission intérimaire sans aucune participation, il n'y a eu pratiquement aucune information diffusée sur ce que pourrait contenir ce plan. Tous ceux qui viennent au forum de la FAD ont entendu parler de ce « plan », mais personne ne sait ce qu'il contient. Ils ont entendu dire que des milliards de dollars ont été promis à New York. Par contre, ils ont peu d'espoir que cet argent leur soit versé et aucun espoir que l'argent reçu soit dépensé dans leur intérêt.

La question qui préoccupe tout le monde est celle des habitations temporaires, c'est-à-dire déplacer les personnes à l'écart du danger des pluies saisonnières. Mais trois mois après le séisme, aucun plan ou message n'a été formulé par le gouvernement haïtien ou par les ONG internationales.

Au début d'avril, il y a eu plusieurs rapports de personnes évincées qui campaient sur les lieux d'écoles et de propriétés privées ainsi que dans le stade de soccer. À certains endroits, des bulldozers sont arrivés de nulle part pour détruire les abris et les familles se retrouvaient sans aucun moyen d'hébergement. Jusqu'à présent, il semble que le seul déplacement de population volontaire qui a eu du succès soit celui de Corail où le gouvernement haïtien, depuis une semaine ou deux, en collaboration avec les ONG internationales, a commencé à transporter des gens du terrain de golf de Pétionville (où plus de 45 000 personnes vivent temporairement). Ils sont transportés à un centre de relocalisation à Corail, mais ce camp peut seulement contenir 7 500 personnes.

On estime que plus d'un million de personnes sont sans-abris dans la région métropolitaine. S'il y a des plans pour créer des habitations temporaires pour des gens autres que ceux sur le terrain de golf, ils ne sont pas diffusés au public. Ceux qui se rencontrent à la FAD ont peur d'être évincés des camps dans lesquels ils vivent. Ils sont aussi sceptiques à propos des plans pour relocaliser les gens à des régions éloignées, ce qui les isoleraient de la vie économie de la ville. Ils ne recevraient pas d'aide mutuelle des familles, des communautés, des associations des quartiers, de l'économie parallèle, etc.

L'aide mutuelle et l'économie parallèle sont les seules choses qui gardent les Haïtiens en vie. Cela était vrai avant et l'est toujours après le séisme. Les efforts de l'aide internationale doivent renforcer les réseaux d'aide mutuelle et d'économie parallèle d'Haïti. Ils ne doivent pas les ignorer et les démanteler.

Qu'est-ce que renforcer signifierait ? Des cuisines communautaires dans les camps, des prêt aux femmes afin qu'elles remettent en marche le « ti komès » (les petits commerces), relocaliser ceux qui sont en danger avec leur participation, trouver des façons de garder les personnes qui le veulent près de la ville. Et si, comme nous l'entendons dire, la décentralisation est un élément important pour l'avenir d'Haïti, alors qui parle aux résidents de Port-au-Prince à propos des vies qu'ils peuvent imaginer en dehors de la ville ? Et pourquoi sur les 12,2 milliards $ demandés dans l'évaluation des besoins après désastre, seulement 41 millions $, ou 0.3 %, est alloué à l'agriculture et à la pêche, c'est-à-dire pour la production locale de nourriture ?

Les forums tenus à la FAD le 13, 20, 27 mars et le 3, 17, 24 avril, avec l'événement de la Journée internationale de la femme le 8 mars 2010 (et la participation de 3 000 femmes), représentent les plus grands rassemblements intérieurs d'Haïtiens pour discuter et débattre de l'avenir du pays depuis le séisme. Depuis le 12 janvier 2010, nous ne sommes au courant d'aucun cas où le gouvernement haïtien, l'ONU ou les ONG internationales qui planifient l'avenir d'Haïti et la distribution des fonds d'aide aient rassemblé les Haïtiens en grand nombre pour leur demander leurs opinions, leur participations et leurs témoignages.

Finalement, ceux qui participent aux forums de la FAD sont unanimes dans leur appel au retour de l'ancien président Jean-Bertrand Aristide en Haïti. Cela est bien résumé par Jean Vaudre, un animateur communautaire de Bel Air, qui a dit au forum le 17 avril : « Si Aristide était ici, même s'il n'avait pas d'argent pour nous aider, il serait avec nous sous la pluie dans les tentes. S'il était ici, nous pourrions croire, nous aurions l'espoir que nous allons pouvoir participer à l'avenir du pays. » L'espoir est une denrée rare en Haïti présentement. Est-ce qu'il y a une façon de reconstruire le pays sans cela ?

* Laura Flynn est membre du conseil de la Fondation Aristide pour la démocratie aux États-Unis qui supporte le travail de la Fondation Aristide en Haïti. FAD en Haïti a été crée en 1996 par Jean-Bertrand Aristide sur le principe que pour amener un changement véritable, la démocratie doit inclure ceux en marge de la société : enfants de la rue, femmes du marché, paysans sans terre, « restaveks » (enfants vivant dans des ménages haïtiens comme des travailleurs domestiques non payés) et les pauvres de la ville. Pendant 14 ans, la Fondation s'est dédiée à offrir des possibilités d'éducation et l'ouverture d'avenues dans la participation démocratique pour ceux qui n'ont traditionnellement pas eu accès à l'éducation ou à une voix dans les affaires nationales. Depuis le séisme, la FAD a mobilisé son personnel, ses docteurs, des volontaires et des supporteurs au niveau national et international. La FAD opère des écoles mobiles dans cinq camps de réfugiés, participe aux cliniques mobiles et fourni de l'aide médicale à 1 200 personnes à l'amphithéâtre chaque semaine. Pour plus d'information sur les travaux en cours et l'histoire de la FAD ou pour de belles photos des écoles mobiles, visitez notre site Web à l'adresse suivante : aristidefoundationfordemocracy.org/

(Traduit de l'anglais par Le Marxiste-Léniniste)

Haut de page


Lisez Le Marxiste-Léniniste
Site web:  www.pccml.ca   Courriel: redaction@cpcml.ca