Invoquant les inquiétudes concernant la fonte de
la calotte glaciaire et la rivalité avec la Russie pour les
ressources énergétiques du Grand Nord, l'OTAN s'est
déclarée responsable de la sécurité dans
l'Arctique.
Les 28 et 29 janvier s'est tenu, à Reykjavik, en
Islande, un séminaire de l'OTAN sur « les perspective
en matière de sécurité dans le Grand
Nord ». Selon un communiqué de l'alliance atlantique,
la conférence a réuni le secrétaire
général de l'OTAN Jaap de Hoop Scheffer, le commandant
suprême des Forces alliées en Europe John
Craddock, « un certain nombres de ministres et
d'ambassadeurs des Forces alliées, le président du
Comité militaire, les deux commandants stratégiques ainsi
que plusieurs autres législateurs et experts des pays
alliés ». Il a été question des
« inquiétudes de l'OTAN concernant l'environnement
dans l'Arctique et la rivalité pour les
ressources énergétiques et les voies navigables de la
région ». « Les États-Unis, le
Danemark, le Canada et la Norvège, tous membres de l'OTAN, et la
Russie ont des établi leurs revendications territoriales [qui
s'entrecoupent] sur les matières premières de l'Arctique
maintenant que la fonte de la glace polaire facilitera l'accès
à 90
milliards de barils de pétrole, selon la U.S. Geological
Survey », écrit l'agence Bloomberg. Selon les
reportages, 25 % des réserves non découvertes de
pétrole et de gaz naturel du monde se trouvent sous le fond
marin de l'Arctique.
Parlant du changement climatique, le secrétaire
général de l'OTAN a dit : « Les
changements causés par la fonte progressive de la calotte
glaciaire suscitent des inquiétudes parmi plusieurs pays autres
que ceux qui appartiennent au Conseil de l'Arctique et à l'OTAN.
C'est en effet l'ensemble de la communauté internationale qui
sera touchée par les nombreux changements qui ont
déjà cours. Dans cette situation, l'OTAN doit
identifier comment elle peut mieux mettre en valeur ses
compétences uniques." (Notre souligné — ndlr)
Le Marxiste-Léniniste
condamne l'insolence de l'alliance militaire agressive à
déclarer que les affaires des peuples du monde sont de son
ressort, comme si l'OTAN était l'arbitre du droit international.
De Hoop Scheffer précise sa pensée en
disant : « Bien que les conséquences à
long terme du changement climatique et du recul de la glace polaire
dans l'Arctique demeurent incertaines, il reste néanmoins que le
Grand Nord devra retenir encore plus l'attention de l'alliance dans les
années qui viennent. Je crois que l'OTAN a
clairement un rôle à jouer. L'Alliance et la Russie ont
déjà acquis des expériences partagées en
recherche et sauvetage et en gestion de catastrophes. Je crois qu'il
serait utile de bâtir sur cette expérience pour nous
attaquer aux défis communs dans la région du Grand
Nord. »
Concernant les conflits qui existent au sein de l'OTAN
et avec la Russie à ce sujet, De Hoop Scheffer
déclare : « Il est déjà clair
qu'il y a certaines différences d'opinion entre les cinq
États sur la ligne de démarcation des 200 milles marins
des zones économiques exclusives, ainsi que sur l'extension du
plateau
continental. »
Un litige oppose le Canada au Danemark concernant la
propriété de l'Île Hans et une partie de la mer de
Lincoln ; un conflit oppose le Canada aux États-Unis sur
les 11 000 kilomètres carrés de la mer de Beaufort riche
en pétrole et sur le Passage du Nord-Ouest, que le Canada
considère comme faisant partie de sa voie navigable
intérieure.
Selon Dmitry Abzalov du Centre de conjoncture politique,
à Moscou, « l'Arctique est une région
militaire stratégique d'une importance vitale pour les pays
entourant le Pôle Nord. Il ne fait pas de doute que le
développement dans cette région est traditionnellement
lié à l'exploitation des bioressources, à
commencer par l'industrie de la
pêche. Mais évidemment on s'intéresse tout autant
à ses richesses d'hydrocarbure. »
En réponse à l'intention de la Russie
d'adopter une loi délimitant la frontière sud de la zone
russe de l'Arctique l'automne dernier, le Canada a menacé
d'imposer des conditions d'autorisation plus sévères pour
les navires qui empruntent le Passage du Nord-Ouest. Par ailleurs, les
États-Unis, la Norvège et d'autres soutiennent que cette
démarcation n'a aucun fondement dans le droit international,
selon les agences de nouvelles.
De Hoop Scheffer a dit que les quatre pays de l'OTAN qui
ont des côtes arctiques et la Russie ont la responsabilité
de voir à ce que la région ne devienne pas une source de
division et de conflit militaire. S'il est
« compréhensible et tout à fait
légitime » pour les alliés de songer aux
conséquences de ces développements pour la
défense et la sécurité, dit-il, tous les pays du
Grand Nord doivent avoir « une présence militaire qui
n'est pas excessive ». « Tous les partis, sans
nous exclure nous-mêmes ni nos amis et partenaires russes,
doivent respecter l'espace aérien lorsqu'ils envoient des avions
patrouiller la région, mais je ne crois pas que nous nous
trouvions en ce moment dans une situation de nuisance ou de
menace », a-t-il dit.
Pour sa part, l'année dernière le Canada a
effectué les plus grands exercices militaires de son histoire
dans le Grand Nord et le gouvernement Harper met beaucoup d'accent
depuis qu'il est au pouvoir sur le développement du nord, allant
jusqu'à tenir une réunion symbolique de son cabinet
à Inuvik.
Par ailleurs, la revue Embassy note que si le
budget du 27 janvier du gouvernement Harper « ne
prévoit pas la construction de nouveaux navires pouvant naviguer
dans l'Arctique, il alloue 104 millions $ à la recherche et
à des installations portuaires dans le nord
canadien ».
« Le budget prévoit 87 millions $
pour l'amélioration des capacités de recherche du Canada
dans le nord. De cette somme, 85 millions $ seront
dépensés au cours des deux prochaines années par
l'entremise du ministère des Affaires indiennes et du Nord pour
le maintien et la modernisation des installations de recherche
actuelles dans l'Arctique.
« Les 2 millions $ qui restent seront
consacrés à une étude de faisabilité en vue
de la construction d'une station de recherche de classe mondiale dans
le Grand Arctique pour améliorer notre compréhension de
l'environnement nordique. »
L'Arctique dans la mire de l'OTAN
- David Brian, Voice of Russia, 26
janvier 2009 -
Le désert sans fin de neige et de glace de
l'Arctique a toujours fait l'objet de différends entre
politiciens, diplomates et scientifiques. Il fait maintenant l'objet
d'un différent militaire.
L'OTAN a déclaré que le territoire de
l'Arctique est une région d'importance stratégique.
L'annonce a été faite par le porte-parole de l'alliance
James Appathurai, qui a également dit qu'une rencontre aurait
lieu les 28 et 29 janvier à Reykjavik, en Islande, avec la
participation de hauts représentants de l'OTAN.
La liste de participants à cette rencontre ne
laisse aucun doute sur les véritables objectifs de l'OTAN dans
la région. La décision de l'alliance militaire
occidentale de déclarer les territoires nordiques une
région d'importance stratégique va accroître les
tensions internationales. La lutte pour l'Arctique est en train de
devenir l'enjeu d'une rivalité
militaire à long terme. Il y a donc de fortes
probabilités qu'on y envoie, tôt ou tard, des contingents
militaires.
Ceux qui observent de près l'évolution des
événements ne manqueront pas de noter que les propos de
M. Appathurai font directement suite à l'annonce de nouvelles
initiatives dans la directive de sécurité nationale des
États-Unis. Selon ce document, Washington aurait des
intérêts nationaux fondamentaux dans la région de
l'Arctique. Ces
intérêts sont on ne peut plus clairs : défense
anti-missile, dissuasion stratégique, opérations de
sécurité marine. On n'y parle pas de terroristes ou de
pirates, qui se sentent sans doute plus à l'aise dans le confort
des eaux chaudes près de la côte de la Somalie que parmi
les ours polaires du Grand Nord.
Les États-Unis, le Canada et l'OTAN ne cachent
pas les raisons qui les poussent à vouloir déployer des
unités militaires dans la région. Leurs brise-glace
arriveront dans l'Arctique pour défendre les
intérêts nationaux des membres de l'alliance qui
prétendent avoir droit aux richesses naturelles de cette partie
de la planète. L'Arctique contient
environ 90 milliards de barils de pétrole brut non
exploré et d'énormes réserves de gaz naturel, qui
pourraient se comparer à celles de la Russie et qui
représenteraient environ 30 % des réserves mondiales
de gaz naturel. Selon certains experts, d'ici 2030 la Russie exploitera
ses gisements dans l'Arctique et c'est de là que sera extrait
50 % de son gaz naturel. Le gisement de Shtokman dans la mer de
Barents, par exemple, contient quatre billions de mètres cubes
de gaz naturel.
Pleinement consciente de l'importance stratégique
de l'Arctique, la Russie est disposée à répondre
aux prétentions de l'OTAN. C'est pourquoi celle-ci est si
pressée d'établir ses revendications territoriales. Le
territoire de l'Arctique est une des cibles premières de la
nouvelle doctrine maritime de la Russie, instituée durant la
présidence de
Vladimir Poutine. Le Conseil de sécurité de la Russie
publiera une nouvelle stratégie du développement de
l'Arctique à la fin de janvier. Le message central de cette
stratégie sera celui-ci : La Russie ne va pas renoncer
à l'Arctique. Moscou désire accroître
considérablement la circulation marchande dans la voie navigable
du nord durant les
années qui viennent et a l'intention de bâtir à
cette fin dix nouveaux brise-glace à propulsion nucléaire
d'ici 2020.
D'ici environ un an, la Russie soumettra à l'ONU
des documents appuyant ses revendications territoriales dans plateau de
l'Arctique. Cinq pays de l'océan Arctique (Russie, Canada,
États-Unis, Norvège et Danemark) ont pris la
décision raisonnable l'an dernier de diviser la région
arctique uniquement selon les conventions existantes.
Or, l'ajout, par l'OTAN, d'une dimension militaire au
dialogue pourrait entraîner un changement important dans
l'approche prise par rapport aux enjeux actuels. Tout cela pourrait
mener à une escalade des tensions à l'échelle
mondiale...
La conférence de Munich «sur la
sécurité»
Depuis 1962, des députés, hauts
représentants des forces armées, représentants de
monopoles internationaux et scientifiques des pays membres de l'OTAN se
réunissent à la « Conférence de Munich
sur la sécurité » pour discuter de ce qu'ils
croient être « les intérêts
européens et nord-américains ». Cette
année la
rencontre a lieu du 6 au 8 février.
Selon le président de la Conférence de
Munich, Wolfgang Ischinger, environ 300 représentants
participeront à l'événement cette année.
Les discussions porteront sur l'avenir et l'expansion de l'OTAN, la
politique de l'Europe en matière de sécurité, la
non-prolifération des armes nucléaires et les enjeux dans
différentes régions stratégiques, dont
l'Afghanistan, le Moyen-Orient, le Caucase central et les Balkans. Plus
spécifiquement cette année il sera question des relations
entre l'OTAN et la Russie, qui seraient particulièrement tendues
depuis la provocation de l'OTAN entre la Géorgie et
l'Ossétie en août dernier.
Lors d'un point de presse à Munich le 1er
décembre, Ischinger a souligné que la Conférence
devait conclure une entente avec la Russie. En tant qu'ambassadeur de
la conférence, il a dit : « Une nouvelle entente
entre l'Occident et la Russie concernant les enjeux fondamentaux de la
sécurité européenne et mondiale, dont les futures
adhésions à l'OTAN, est depuis longtemps
nécessaire. Nous n'avons pas besoin de nouveaux systèmes
d'armements. Nous devons plutôt trouver une façon de
collaborer face à la crise actuelle et aux crises futures. La
Conférence de Munich sur la sécurité offre une
excellente occasion de le faire. » Le diplomate allemand
exprime ainsi le désir
de la Vieille Europe qui préfère une politique de
pacification et de refoulement de la Russie à l'approche plus
provocatrice de l'OTAN.
Avant la conférence, l'OTAN aura ses
premières rencontres avec la Russie depuis la confrontation
Géorgie-Ossétie. Le 2 février le Conseil
OTAN-Russie, fondé en 2002 et constitué des 26 membres de
l'OTAN et de la Russie, tient une réunion où il sera
question de la reprise de ses travaux, qui furent interrompus par
l'OTAN en août dernier.
Selon un article de Russia Today en date du 26 janvier, le
secrétaire général de l'OTAN Jaap de Hoop Scheffer
prétend que la Russie demeure un partenaire essentiel de
l'alliance et voudrait que les deux parties maintiennent le dialogue
sur les questions qui les divisent. Selon Scheffer, cela comprend les
systèmes anti-missile et le
Traité sur les forces conventionnelles en Europe, deux aspects
qui, selon lui, « établissent l'équilibre
militaire dans le monde ». L'article cite l'envoyé de
la Russie à l'OTAN Dimitri Rogozin selon qui Moscou serait
disposée à dialoguer avec l'alliance militaire. Or,
dit-il, la partie russe « ne va pas prétendre que
rien ne s'est
produit ». « Nous avons plusieurs questions
importantes à soulever, notamment en ce qui concerne son
évaluation extrêmement unilatérale de l'intrusion
de la Géorgie en Ossétie du Sud. Ce problème sera
à l'ordre du jour. »
La questions des systèmes anti-missile est
particulièrement litigieuse, disent les commentateurs. Les
États-Unis et l'OTAN prétendent que leur infrastructure
militaire en Europe de l'est, y compris les bases militaires et les
systèmes anti-missile, sont à des fins défensives,
pour se protéger contre des « États
voyous » comme l'Iran et
la Corée du Nord, mais l'emplacement de leurs bases ne
correspond pas à ces prétentions. En dépit des
protestations de la Russie, les États-Unis ont
considérablement accru leur présence militaire dans la
région et ils ont l'intention d'établir une station de
radar en République tchèque et une batterie de missiles
intercepteurs en Pologne. L'Agence
France presse écrivait le 28 janvier que la Russie a
remisé ses plans en vue de l'installation de missiles au seuil
de l'Europe centrale après avoir détecté un
refroidissement dans l'administration Obama envers les plans de
défense anti-missile des Américains en Europe. Les Russes
attendent la confirmation, disent les rapports de presse.
L'Afghanistan occupe également une place
importante dans les relations entre l'OTAN et la Russie, surtout que la
Russie, depuis le conflit en Ossétie du Sud, a cessé de
permettre à l'OTAN d'utiliser son territoire pour
l'approvisionnement non militaire en Afghanistan, selon les agences de
presse. Cette permission permettait à l'OTAN de
contourner les « risques d'attaque » contre ses
convois en provenance du Pakistan. Selon une dépêche du 23
janvier de Reuters, le président russe Dimitri Medvedev se
serait montré disposé à coopérer avec la
politique américaine en Afghanistan, dans l'espoir d'une
amélioration des relations sous la nouvelle administration
Obama.
Reuters cite Medvedev : « Nous sommes ouverts à
une coopération entière et sur un pied
d'égalité sur la question de la sécurité en
Afghanistan, y compris avec les États-Unis. Nous sommes
prêts à discuter d'enjeux complexes, dont le transport de
biens non militaires. »
Bien que la Russie ait soutenu l'invasion de
l'Afghanistan par l'OTAN en 2001, selon les commentateurs elle croit de
moins en moins à la capacité de l'OTAN à
stabiliser la situation dans ce pays et craint une
déstabilisation générale dans cette région
considérée comme faisant partie de l'arrière-cour
de la Russie. D'autres États de la région ont
exprimé des inquiétudes semblables et les commentateurs
disent qu'il est probable que l'OTAN se serve de l'Afghanistan à
dessein pour provoquer cette déstabilisation dans la
région, dans le but de nuire au commerce et aux
intérêts de la Russie dans les régions
avoisinantes. Reste à voir comment l'administration Obama entend
procéder vis à vis
de l'Afghanistan et du Pakistan.